Timing serré pour la mise en œuvre de la sélection en master

Aurore Abdoul-Maninroudine Publié le
Timing serré pour la mise en œuvre de la sélection en master
Pou Gilles Roussel, président de l'Upem, les équipes universitaires seront mobilisées dès la promulgation de la loi pour voter les capacités d'accueil ainsi que les critères d'admission pour chaque master. // ©  UPEM
Alors qu'un accord vient d'être trouvé sur la sélection en master, Gilles Roussel, président de l'université Paris-Est Marne-la-Vallée et de la commission formation de la CPU, liste les difficultés opérationnelles de la réforme. Les universités doivent être prêtes pour janvier 2017.

L'accord trouvé entre les organisations étudiantes, les syndicats, le ministère et la CPU sur la sélection en master prévoit que les universités pourront fixer des capacités d'accueil à l'entrée du master. Quels en seront les critères ?

Dans quasiment chaque université, pour chaque master, des capacités d'accueil existent déjà. Celles-ci dépendent principalement des locaux disponibles, des enseignants à disposition, ou encore des perspectives d'insertion professionnelle. Pour l'année prochaine, les universités partiront de l'existant.

Quoi qu'il en soit, les universités n'ont pas l'intention de développer de politique malthusienne. Je ne doute pas que l'État, avec lequel ces capacités d'accueil seront définies, y veillera.

Y a-t-il des points sur lesquels la CPU sera particulièrement vigilante lors de la mise en place de la réforme ?

La CPU (Conférence des présidents d'université) a validé cet accord car il constitue un compromis acceptable, mais la faisabilité opérationnelle de la réforme nous inquiète.

Dès que la loi sera promulguée, les universités vont devoir voter les capacités d’accueil mais également définir puis voter les critères d’admission pour chaque master, et faire remonter toutes ces informations dans le système pour janvier 2017. Cela supposera une mobilisation très importante des équipes universitaires.

D’autant plus que, parallèlement, il faudra modifier le décret pris en mai 2016. Ce dernier liste l’ensemble des masters qui, à titre temporaire et de manière dérogatoire, vont continuer de sélectionner entre le M1 et le M2. Pour 2017, il s'agira principalement désormais de masters 2 en droit et en psychologie.

Nous ne souhaitons pas que l'affectation des étudiants se fasse via la plate-forme, ni que l'étudiant ordonne ses vœux.

Najat Vallaud-Belkacem a évoqué le fait que la plate-forme d'information "trouvermonmaster.gouv.fr", qui sera opérationnelle en janvier 2017, puisse être "enrichie".  Êtes-vous favorable à ce qu'elle devienne, à terme, une plate-forme d'affectation ?

La position de la CPU est claire : nous ne souhaitons pas que l'affectation des étudiants se fasse via la plate-forme, ni que l'étudiant puisse ordonner ses vœux. Il pourra postuler partout où il le souhaite, les universités lui répondront, puis il choisira la formation qui l'attire le plus.

Cela étant dit, pour que la réforme ne soit pas une usine à gaz, il faut que les recteurs aient accès à une information précise et centralisée sur la plate-forme. Dans cette perspective, il serait utile que celle-ci répertorie les formations auxquelles l'étudiant a postulé, s'il a été accepté ou recalé, ainsi que les masters où des places sont restées vacantes.

On peut également imaginer que l'étudiant puisse déposer un dossier unique, qui serait ensuite complété selon les exigences spécifiques de chaque université.

Les étudiants qui n'auront été admis dans aucun des masters demandés se verront proposer trois propositions par le recteur, après accord des chefs d'établissements concernés. Y a-t-il un risque de créer des masters poubelles ?

Des masters poubelles dans lesquels on mettrait tous les mauvais étudiants d'une mention, c'est un mythe ! Tout d'abord, les universités sont responsables du niveau des étudiants auxquels elles délivrent le diplôme national de licence. Si elles estiment que des étudiants titulaires d'une licence n'ont pas le niveau pour poursuivre dans un master, c'est qu'il y a un problème en amont.

Cela me rappelle le débat qu'il y a eu lors de la réforme de la formation des enseignants : certains plaidaient pour un concours à l'entrée du master, sous-entendant que le fait d'avoir obtenu une licence n'était pas un élément suffisant pour poursuivre ses études universitaires. Cette idée est extrêmement contre-productive pour l'image de l'université.

Aurore Abdoul-Maninroudine | Publié le