Idex Lyon : désaccords autour des statuts

Muriel Florin Publié le
Idex Lyon : désaccords autour des statuts
L'université Claude-Bernard Lyon 1 qui fait partie du projet de l'université cible. // © 
Examiné avant l’été par les instances des cinq établissements fondateurs, le document préfigurateur des statuts de la future université cible du site Lyon-Saint-Étienne provoque déjà quelques remous.

Avec quelques jours de retard sur le calendrier initialement prévu, le DOS (document d’orientation stratégique) de l’université cible a été transmis lundi 27 mai 2019 aux instances des cinq établissements fondateurs, portant la candidature Idex. Il doit être examiné par les instances concernées, à savoir les universités Claude-Bernard Lyon 1, Jean-Moulin Lyon 3 et Jean-Monnet à Saint-Étienne, l’Insa et l’ENS à Lyon.

Ce document de 127 pages constitue la base des statuts juridiques de l’établissement expérimental en projet sur le site Lyon Saint-Étienne. Ces statuts devront être soumis aux conseils d’administration de ces mêmes établissements à l’automne 2019, moment où le jury doit évaluer le projet en vue de l’attribution du label Idex.

Mise en place en 2020

Le DOS est composé de trois parties. Une présentation générale (52 pages) qui rappelle le potentiel du site, les raisons du projet et sa structure générale, en huit pôles. Une deuxième partie (31 pages), consacrée à l’organisation et la gouvernance, aborde notamment la composition des instances et la procédure d’élaboration du budget.

Côté social, elle précise que "les mobilités géographiques seront proposées uniquement aux personnels volontaires" et que "les rémunérations et primes en place seront préservées et harmonisées positivement". La troisième partie (44 pages) porte sur les ambitions et les organisations des pôles de formation et de recherche (PFR). Le DOS précise également les jalons : la création juridique de l’université cible au premier semestre 2020, la même année est consacrée à la mise en place de toutes les instances ainsi la préparation du budget 2021, et, toujours selon le DOS, "les statuts confient aux instances de l’université cible la compétence sur les décisions exécutoires au 1er janvier 2021".

Comme prévu, la répartition des compétences entre l’établissement central, les huit pôles et leurs composantes est à géométrie variable, dans la mesure où l’ENS et l’Insa sont incluses comme "établissements-composantes", l’un pour le pôle sciences et humanités, l’autre pour le pôle ingénierie.

Faute d’accord réel sur certains points, le DOS laisse de nombreuses zones de flou qui vont rendre difficile la rédaction des statuts.
(C. Danthony)

Si ces écoles doivent s’inscrire dans la stratégie de l’université cible et associer leurs marques respectives, elles reçoivent leur dotation "directement du ministère" et conservent leurs prérogatives en matière de ressources humaines et de recrutement des étudiants. A contrario, le vote des statuts devrait valoir leur abandon pour l’université Lyon 1, Lyon 3 et Jean-Monnet à Saint-Étienne. Avec un transfert des droits et obligations des trois universités fixé le 1er janvier 2021.

La marque Insa dissoute ?

Le DOS apporte aussi des précisions sur l’organisation du premier cycle qui comprendrait "deux structures expérimentales". D'une part, une EST (École supérieure de technologie), qui recoupe essentiellement l’offre des IUT, avec des formations technologiques et professionnelles, et, d’autre part, l’EU1C (École universitaire de 1er cycle), avec une mission "d’accueil, d’orientation, prenant en compte les besoins de remédiation, et de formation des nouveaux bacheliers". En revanche, a priori, les premiers cycles de la Paces et de la faculté de droit resteraient dans leurs girons respectifs.

Dans ce contexte, Éric Maurincomme, le directeur de l’Insa vient d'annoncer sa démission pour septembre 2019. S’il met en avant un choix professionnel – il devrait prendre la tête d’une grande entreprise basée à Lyon –, le patron de l’Insa n’a jamais fait mystère de ses craintes au sujet de la dissolution de la marque Insa dans le futur établissement. Et il a sans aucun doute relevé qu’au sein du pôle ingénierie "Polytechnique", le DOS ne garantit pas le maintien des prérogatives de l’Insa à long terme.

Des oppositions

Le DOS doit être soumis entre le 20 et le 25 juin 2019 aux conseils d’administration des cinq établissements fondateurs. D’ores et déjà, deux instances de l’Insa (le CT et le CE) l’ont retoqué et, selon Philippe Guy, élu Snesup au sein de l’école, "il y a peu de chances que le CA l’adopte".

À Lyon 1, Fabien de Marchi, directeur de la puissante faculté des sciences et élu au CA, exprime de fortes réticences. Dans une interview accordée au Snesup, il évoque l’absence de concertation et de validation des jalons. "Je n’ai été invité à aucune réunion d’aucun groupe de travail, malgré le fait que je dirige la plus grosse faculté du site avec plus de 10.000 étudiants", assure-t-il. Et d’estimer que "casser le modèle d’UFR, c’est casser l’un des derniers remparts en France à la 'course' à l’étudiant et à son porte-monnaie".

Par ailleurs, un collectif lance une pétition dénonçant notamment une "désorganisation dangereuse des structures et missions" et un projet "qui impose des orientations nouvelles, durables et non partagées à nos missions de service public". Elle réclame aussi un référendum sur le projet.

Pour l’association Démocratie et transparence à l’Université de Lyon (DTUL), représentée par Claude Danthony, "faute d’accord réel sur certains points, le DOS laisse de nombreuses zones de flou qui vont rendre difficile la rédaction des statuts".

Muriel Florin | Publié le