"Ma thèse en 180 secondes" : 10 conseils pour être efficace

Marie-Anne Nourry Publié le
"Ma thèse en 180 secondes" : 10 conseils pour être efficace
Docteurs-SorbonneUniversités-mai 2011 ©C.Stromboni // © 
Trouver une attaque originale, placer sa voix, ménager le suspense… La présentation d'un sujet de recherche n'est pas une mince affaire. Comment intéresser un auditoire profane ? Des spécialistes en communication scientifique, coachs pour le concours "Ma thèse en 180 secondes", vous livrent leurs recettes.

Rendre leur sujet de recherche accessible au plus grand nombre. Voilà le défi qu'ont accepté de relever les doctorants de 50 universités françaises, dans le cadre de "Ma thèse en 180 secondes". Après une première édition applaudie à l'université de Lorraine en 2013, la CPU et le CNRS se sont emparés du concours québécois pour l'étendre à l'ensemble du territoire. Car à l'heure où la science touche des enjeux majeurs, il incombe plus que jamais aux chercheurs de nourrir le débat public.

Mais comment présenter ses travaux de manière claire et attractive ? EducPros vous dévoile les conseils de Nicolas Beck, responsable de l'équipe de culture scientifique de l'université de Lorraine, et de Julien le Bonheur, responsable de la communication scientifique de Rennes 1, pour être efficace en moins de 3 minutes.

Conseil n°1 : choisir une approche originale

"Imaginons un monde où nous pourrions lire notre journal sur notre rideau de douche." Drôle d'entrée en matière pour un sujet sur les nanomatériaux que sont les clustomésogènes. Pourtant, l'originalité a contribué au succès de Marianne Prévôt, lauréate de la finale bretonne en 2014. "Son approche futuriste était suffisamment intrigante pour qu'on veuille savoir la suite", rapporte Julien le Bonheur. 

Conseil n°2 : ménager le suspense

Le talent de conteur n'est pas inné. Il importe pourtant de raconter une histoire et de ménager le suspense pour maintenir l'attention de l'auditoire. "Cela passe par un travail sur la respiration et les changements de rythme, détaille Nicolas Beck. Laisser un blanc après une phrase importante, par exemple, permet d'attirer l'attention."



Marianne Prévôt (Rennes 1), lauréate de la finale bretonne 2014

Conseil n°3 : connaître le texte à la virgule près

La présentation de Camel Makhloufi, lauréat européen en 2013, comprenait 470 mots, précisément. "Chacun a son débit, donc ce chiffre n'est pas la référence absolue, mais il est essentiel que le discours soit fluide, ni trop lent ni trop rapide", indique Nicolas Beck. Cela implique de connaître son texte à la virgule près. "Si l'on doit chercher un mot, on perd trois secondes et l'auditoire risque de décrocher", souligne Julien le Bonheur.

Conseil n° 4 : contrôler son corps

La gestuelle ne doit être ni absente, ni trop exagérée. "Arpenter la scène de long en large ou, à l'inverse, garder une position statique, sont les défauts classiques", commente Nicolas Beck. La bonne posture se situe à mi-chemin. En outre, il ne faut pas oublier de regarder l'auditoire. "Et surtout pas ses pieds", insiste le responsable de l'équipe de culture scientifique de l'université de Lorraine.

Conseil n° 5 : instaurer une complicité avec le public

Interpeller directement l'auditoire est un pari risqué. "S'il ne réagit pas au quart de tour, on perd du temps, prévient Julien le Bonheur. Il est préférable de lancer un pont : si l'auditoire répond, tant mieux, sinon on continue." Et de raconter comment, après avoir évoqué l'expérience d'un chercheur américain sur un cornichon, la lauréate bretonne a utilisé l'expression "ça sent un peu le vinaigre", qui a fait sourire le public. "Il ne faut pas en abuser mais les petits jeux de mots contribuent à rendre la forme attractive", estime le responsable de la communication scientifique.



Camel Makhloufi (université de Lorraine), lauréat européen en 2013

Conseil n° 6 : proscrire la position d'enseignant

Créer une opposition entre "vous le public" et "nous les chercheurs" est à bannir absolument. "Quand on fait de la médiation, on est sur un échange", martèle Julien le Bonheur. Plutôt qu'adopter une position professorale, il convient donc d'amener les spectateurs de façon bienveillante vers une démarche scientifique. En employant la forme "imaginons", qui inclut le public, la doctorante Marianne Prévôt l'a bien compris.

Conseil n° 7 : s'appuyer sur un support simple

Quand on choisit un support visuel fixe (obligatoire dans le cadre du concours "Ma thèse en 180 secondes"), il faut pouvoir s'y référer tout au long de la présentation. Tout ce qui figure dessus doit être compris à la fin, "sans être redondant au discours", précise Nicolas Beck. La diapositive doit contenir deux ou trois idées principales, très peu de texte et éventuellement une progression visuelle avec des flèches.

Le support visuel de Camel Makhloufi comprenait une mèche allumée, métaphore de mission impossible. "On comprenait qu'il devait tout expliquer avant que la bombe explose", sourit Julien le Bonheur. Et pour filer la métaphore jusqu'au bout, le doctorant a conclu sa présentation ainsi : "Dans trois mois, quand j'aurai soutenu ma thèse, je pourrai enfin dire... mission accomplie."

Conseil n° 8 : maîtriser son sujet sur le bout des doigts

Si l'on peine à formuler les différentes étapes de la démarche scientifique, l'auditoire le ressentira forcément. Nicolas Beck est catégorique : "Dès lors que la démarche n'est pas structurée, il faut remettre les choses à plat." En outre, il est impossible de tout dire en trois minutes. Se focaliser sur un point précis, un concept qui va à la fois être représentatif du sujet de recherche et parler au grand public, est donc nécessaire.

Conseil n° 9 : répéter devant un public profane

S'entraîner à dire son texte face à des proches est le meilleur des exercices. "Il faut reformuler ses propos jusqu’à ce que l'auditoire profane saisisse le sens  du discours", indique Julien le Bonheur. L'occasion également de tester le support visuel qui accompagne la soutenance.

Conseil n° 10 : Exprimer sa passion

L'enthousiasme, qui s'incarne par la voix et le corps, est enfin capital. "C'est ce qui peut faire la différence entre deux présentations", affirme Nicolas Beck. Camel Makhloufi, par exemple, avait les yeux qui brillaient. C'est très subjectif mais on le ressent sur le moment." À bon entendeur !

"Ma thèse en 180 secondes" en bref
Participants : 22 établissements (dont une cinquantaine d'universités) répartis sur 15 régions
Finale nationale : 10 juin 2014 à Lyon
Finale internationale : 24 septembre 2014 à Québec
Les concours de recherche sont à la mode
Concours de biologie de synthèse  : iGEM competition
Dance your PhD : site du concoursvidéo des finalistes

Aller plus loin
Lire sur le blog Gaïa Universitas : Ta thèse en 180 secondes ! 

Marie-Anne Nourry | Publié le