Universités : les facteurs qui expliquent un faible taux de réussite en licence

Manon Pellieux Publié le
Universités : les facteurs qui expliquent un faible taux de réussite en licence
Le décalage entre le lycée et l'université, le moindre accompagnement des étudiants sont des facteurs qui expliquent le faible taux de réussite en licence. // ©  Michael LUMBROSO/REA
L’Etudiant sort aujourd’hui son classement 2023 de la réussite en licence. Si le taux de réussite en trois ou quatre ans peut paraître bas, par rapport à ceux observés en BTS ou IUT, cela ne signifie pas pour autant que les étudiants réussiraient moins bien. Leurs parcours sont moins linéaires et continus du fait de cette orientation parfois "contrariée" en licence.

Seul un étudiant sur trois arrive à obtenir sa licence en trois ans selon les données statistiques du SIES. Le taux de réussite en licence en trois ou quatre ans s'élève ainsi à 46,4%. A l'inverse, en BTS et en IUT (BUT), les taux de réussite atteignent 80 à 90%.

Comment expliquer que les étudiants réussissent moins en licence que dans d'autres formations post-bac ? L'une des réponses pourrait être sa non sélectivité. En effet, la licence représente pour de nombreux candidats un moyen d’obtenir une formation dans le supérieur, même si celle-ci ne correspond pas au choix d'orientation initial.

Une orientation en licence par défaut ?

Ainsi, des étudiants peuvent se retrouver sur les bancs de la fac par défaut. Une "orientation contrariée" selon le sociologue Mathieu Rossignol-Brunet, qui a notamment travaillé sur les parcours d’orientation des candidats et admis dans les licences d’arts, lettres, langues et sciences humaines. Pour autant, le chercheur a plutôt constaté qu'une majorité d'étudiants faisaient des choix d'orientation cohérents.

En effet, selon lui, il existe malgré tout des affinités disciplinaires dans les vœux établis par les candidats. "J’ai par exemple constaté que de nombreux candidats recalés des BTS tourisme se retrouvaient dans des licences en langues. Et ceux qui voulaient intégrer des études d’orthophonie qui se retrouvaient finalement en science du langage", résume le sociologue.

Les changements de trajectoires sont en constante augmentation et pourraient devenir la norme, en lieu et place des parcours linéaires et continus. (rapport Igésr)

En ce sens, la première année de licence permet aussi aux étudiants d’affiner leur souhait de formation. Brigitte Mainguet, docteure en psychologie à l’université de Lille, suit les étudiants qui décident d’abandonner leur licence STAPS en cours de route. "Certains vont en psychologie car les cours à la faculté leur ont plu. D’autres vont chercher d’autres formations dans les métiers du sport, plus courtes et moins théoriques." Ces étudiants n’ont donc pas poursuivi leur licence de STAPS, mais se sont finalement orientés vers des formations plus satisfaisantes pour eux.

Ce constat rejoint celui du rapport de l’Igésr publié en 2020 : "les changements de trajectoires sont en constante augmentation et pourraient devenir la norme, en lieu et place des parcours linéaires et continus." La réussite en licence ne peut donc pas simplement se mesurer au taux d'obtention du diplôme. La capacité de l'université à réguler les changements de trajectoire en est aussi un indicateur.

Un décalage entre le lycée et l'université

Au-delà des choix d'orientation, d'autres facteurs peuvent expliquer ce taux global de réussite assez bas. En effet, intégrer l’université c’est aussi changer radicalement de cadre et de mode de formation. Un décalage que ne connaissent pas les étudiants inscrits en BTS ou en prépa qui gardent le même cadre d'études en lycée et des codes similaires à leur année de terminale.

La pédagogie, les méthodes d'apprentissage mais aussi les matières à l’université n’ont aussi rien à voir avec celles du lycée. Pour Brigitte Mainguet, "la découverte de nouvelles matières comme l’anatomie, la biomécanique, la psychologie, peut expliquer l’effet de surprise" à l’entrée en STAPS. Et déstabiliser de jeunes étudiants qui se retrouvent en totale autonomie face à des matières jusque-là inconnues.

Les petites universités, atout pour la réussite en licence ?

Le cadre d’études a aussi un impact sur la réussite. En effet, le classement des meilleures licences montre le lien entre la taille de l'université et la réussite en licence. Ce sont souvent les plus petites qui permettent une meilleure progression de leurs étudiants.

Cette année dans le classement des licences, les universités de Mulhouse et de Corse se distinguent sur leur valeur ajoutée avec respectivement 16,6 et 12,2 points. Cela signifie que ces deux universités ont un taux de réussite supérieur au taux estimé par le ministère de l'Enseignement supérieur selon les profils socio-économiques des étudiants inscrits en licence.

Ces deux universités font aussi partie des 30% qui ont accueilli le moins d’étudiants à la rentrée 2017. Un atout pour Mathieu Rossignol-Brunet qui constate que "la transition est moins brutale pour les étudiants dans les petites structures."

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