À Rennes, vers la création d'une nouvelle "grande université"

Morgane Taquet Publié le
À Rennes, vers la création d'une nouvelle "grande université"
Six établissements envisagent de créer une "grande université", à l'horizon 2018 ou 2019. // ©  UR1
À la suite de l'échec de l'Isite lors de la dernière vague du PIA 2, six écoles et universités rennaises ont affiché leur volonté de créer un nouvel établissement, espérant pouvoir profiter des évolutions législatives promises par le nouveau gouvernement.

La "grande université de Rennes" pose ses premiers jalons. Après l'échec du projet Isite, annoncé le 24 février 2017, six établissements rennais (ENSC, ENS, Insa, Sciences po, universités Rennes 1 et Rennes 2) se sont engagés dans la création d'un nouvel établissement. Ces dernières semaines, leurs conseils d'administration ont tous voté en faveur d'une délibération visant à s'engager dans un tel processus.

Le projet a été transmis jeudi 13 juillet au ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation. "Ce document de travail donnera lieu a plusieurs navettes durant l'été, avant une explication du projet à la rentrée", détaille Olivier David, président de Rennes 2.

Le nouvel établissement pourrait voir le jour fin 2018, début 2019. Un calendrier serré, qui correspond à la volonté clairement affichée par les établissements dès le lendemain de l'annonce de l'échec de l'Isite

Délivrance du doctorat et marque commune

Ce projet prévoit "la coordination des stratégies de recherche, une politique partenariale commune avec le monde économique, le portage des grands programmes scientifiques et académiques dans le cadre du PIA (Programme d'investissements d'avenir), la délivrance du doctorat, le développement d'une marque commune, des services interuniversitaires communs", détaille le communiqué annonçant le projet. D'ores et déjà, les établissements ont répondu de manière groupée à trois appels à projets, lancés dans le cadre du PIA 3 (école universitaire de recherche, nouveau cursus universitaire et disrupt campus).

Les établissements souhaitent par ailleurs mettre en place une signature commune d'ici à la fin 2017. Quant au budget, "nous aimerions que cet établissement soit le lieu de la contractualisation avec l'État, dit Olivier David. Mais, pour l'instant, nous restons sur un budget par établissement, excepté pour les financements éventuels du PIA et des appels à projets communs. Pour le prochain contrat quinquennal (2022-2026), nous ferons un bilan en 2020 afin de voir comment nous pouvons aller plus loin sur la question budgétaire."

Quel statut pour l'établissement cible ?

Après les déclarations d'intention, reste à régler un problème de taille : celui du statut du futur établissement. Ce dernier pourrait-il prendre la forme d'un grand établissement, à l'image de ce que souhaitent obtenir les acteurs lillois, lancés dans une fusion entre Centrale, l'Ensait et Chimie ? "Nous ne savons pas encore, mais il est hors de question d'aller sur une fusion ou une association, prévient Olivier David. Nous attendons de voir ce que vont proposer les évolutions législatives. Nous aimerions une université fédérale, qui préserve la personnalité juridique et morale des membres."

Nul doute que les acteurs rennais vont observer de près les possibilités offertes par le projet d'ordonnance, visant à faciliter les regroupements d'écoles et d'universités. Le texte du projet de loi d'habilitation doit être présenté en Conseil des ministres durant l'été.

Quel avenir pour la Comue Université Bretagne-Loire ?
"La question ne s'est pas encore posée et aucune décision politique n'a été prise, affirme Olivier David, président de Rennes 2. Mais nous avons du mal à voir comment pourront s'articuler deux superstructures au-dessus des établissements rennais." L'avenir de l'Université Bretagne-Loire pourrait bien être mis à mal par le nouveau projet rennais.

Mais du côté de la Comue, Pascal Olivard préfère tempérer. "Il ne faut pas prendre de décision hâtive. Il est essentiel de prendre le temps d'évaluer l'ensemble des conséquences pour les établissements et pour le collectif. Je fais en sorte que le collectif n'explose pas, car je crois que la Comue n'a pas donné tout ce qu'elle avait à donner", affirme le président de l'UBL. Ce dernier appelle de ses vœux une évolution sur les contrats de site signés avec les Comue. "La loi de 2013 a un défaut majeur : elle ne prévoit qu'un seul contrat au niveau du site, réduisant ainsi la propre autonomie du président d'université. J'aimerais qu'on revienne à un contrat avec les établissements autonomes, en plus du contrat de site, afin de redonner confiance aux chefs d'établissement."

Et Pascal Olivard de rappeler qu'en "l'état actuel, le projet rennais n'est [juridiquement] pas possible. [...] Qu'il y ait des questions est légitime. Je salue d'ailleurs la réactivité des établissements et leur capacité de rebond, mais est-ce véritablement incompatible avec la Comue ? Rien n'interdit que l'établissement rennais soit membre de l'UBL. Dans ce cas, la notion de couche supplémentaire, dont ne veulent pas les établissements rennais, ne serait plus un frein", poursuit-il.

"Faire en sorte que le collectif n'explose pas"

Quant au départ du CNRS de la Comue, membre de l'UBL depuis janvier 2016, le président dit s'interroger sur la politique territoriale de l'organisme de recherche. "Nous ne sommes pas les seuls à ne pas avoir été labellisés Idex ou Isite. Pourtant, nous sommes les premiers à voir le CNRS se désengager", regrette le président, qui assure qu'une autre modalité de travail avec le CNRS devra être trouvée.

Morgane Taquet | Publié le