Léonor Manent, UTT : "Nous sommes en codéveloppement avec les acteurs locaux"

Jean Chabod-Serieis Publié le
Léonor Manent, UTT : "Nous sommes en codéveloppement avec les acteurs locaux"
Malgré les difficultés, l’UTT a fait le choix d'utiliser des fonds de roulement pour investir et développer de nouvelles sources de financement. // ©  Emmanuel Laroche
La notion de territoire est centrale dans la stratégie de communication de l’UTT : c'est même la raison d'être de l’école publique d’ingénieurs depuis 1994. Sa directrice de la communication, Leonor Manent, revient sur les enjeux territoriaux de sa fonction.

Qu’est-ce que le "territoire" pour un établissement comme le vôtre ?

Le territoire est avant tout géographique : d'abord la ville de Troyes et le département de l’Aube, puis la Champagne-Sud, territoire de l’ex-Comue, dissoute fin 2017, et devenue depuis une association de 13 établissements, et enfin la région Grand Est.

Léonor Manent, directrice de la communication de l'UTT.
Léonor Manent, directrice de la communication de l'UTT. © Service communication UTT

Dans le cadre de nos discussions pour le rapprochement de l’UTT avec Sorbonne Université, nous nous tournons vers la région parisienne. D’ailleurs, si nous observons la région d'origine de nos étudiants, l’Île-de-France est fortement représentée. Nous ne sommes qu’à 185 kilomètres de Paris…

Dans ce périmètre, quels liens avez-vous tissés avec les acteurs publics et privés ?

Nous travaillons avec les acteurs publics, de la ville à la Région, mais aussi avec les entreprises via la Chambre de commerce et d’industrie et plusieurs associations de PME. Notre fondation partenariale, créée en 2009, joue un rôle majeur à cet égard.

Nous collaborons également avec de nombreuses associations, l’hôpital de Troyes, des maisons de retraite, des écoles élémentaires et des collèges-lycées. Enfin, nous travaillons avec l’EPF et l’ESTP, deux écoles d’ingénieurs parisiennes ayant récemment ouvert un campus à Troyes.

Quelle importance ces acteurs locaux ont-ils pour l’établissement ?

Notre territoire a connu une désindustrialisation massive : dans les années 1980-1990, les entreprises textiles qui avaient employé jusqu’à 40.000 ouvriers ont disparu. Il a donc fallu miser sur autre chose : l’économie de la connaissance. Il faut garder cela en tête pour comprendre dans quel contexte l’UTT est née il y a 24 ans.

La direction de la communication a immédiatement été associée à cette stratégie. Aujourd’hui, 35 % de notre budget – 39 millions d'euros dont 13,6 millions pour la recherche – repose sur nos ressources propres ; nous ne pourrions pas atteindre ce chiffre sans un lien étroit avec les acteurs du territoire.

Aujourd’hui, 35 % de notre budget repose sur nos ressources propres ; nous ne pourrions pas atteindre ce chiffre sans un lien étroit avec les acteurs du territoire.

Dans votre action de directrice de la communication, quels dispositifs privilégiez-vous ?

Chaque année, la technopole de l’Aube organise le concours Plug and Start qui récompense et distingue des start-up innovantes, qui adossent leurs recherches à l’UTT, dans une logique partenariale. LevelS3D (numérisation 3D instantanée) et Woodoo (fabrication de bois transparent) sont les dernières à avoir été distinguées et nous relayons leurs travaux.

Je citerais également notre implication dans deux structures publiques : Aube Développement – un guichet unique mis en place par le département pour la création d’entreprise – et la Maison des étudiants, créée par la ville. Nous sommes représentés dans leurs instances et associés aux propositions comme aux actions.

Les élus locaux jouent un rôle décisif sur leur territoire. Quels liens l’UTT entretient-elle avec eux ?

Le sénateur Philippe Adnot a été président du conseil général, puis du conseil départemental de l’Aube de 1990 à 2017. À ce titre, il a présidé à la création de l’UTT en 1994, il est donc ensuite devenu son parrain naturel. Ainsi, lorsqu’il se déplace à l’étranger – en Chine notamment –, il propose à des enseignants de l’UTT de l’accompagner.

Il sera à mes côtés lors de la conférence EducPros du 18 octobre pour évoquer les enjeux de communication. Le nouveau président du conseil départemental, Philippe Pichery, est, lui aussi, très impliqué dans la promotion de l’UTT.

Quelle part les étudiants de l’UTT prennent-ils dans votre stratégie de communication ?

Nos étudiants choisissent l’UTT avant de choisir Troyes. Mais, une fois diplômés, ils deviennent les ambassadeurs de la ville et de la région en promouvant le territoire et en en parlant sur les réseaux sociaux.

Beaucoup d’entre eux restent d’ailleurs dans les environs. Sur LinkedIn, nous avons dénombré 1.663 profils d'anciens élèves installés dans la région de Troyes, ce qui est conséquent dans une ville de 60.000 habitants. Je considère une fois de plus que cela relève du codéveloppement.

1.663 profils d'anciens élèves sont installés dans la région de Troyes, ce qui est conséquent dans une ville de 60.000 habitants. Cela relève du codéveloppement.

Que voulez-vous dire par "codéveloppement" ?

Je garde toujours en tête que nous sommes en codéveloppement avec les acteurs locaux. Lorsque nous signons sur les réseaux sociaux, nous signons "UT Troyes", et non "UTT". Les deux axes que j'approfondis quotidiennement en communication sont ceux de la stratégie de l’établissement : innovation et codéveloppement.

Lorsqu’on est excentré, la seule façon de se démarquer, c’est de se différencier. La nôtre est l’ouverture au territoire, à l’entreprise, et à l’international. Cette ouverture se retrouve systématiquement dans notre communication qui est adossée à la stratégie et au territoire de l’UTT. Autrement dit, notre communication s’appuie sur les invariants de l’UTT.

Pour vous, quels sont les grands enjeux de la communication dans l’ESR ?

Tout d’abord, la transition numérique, tant en communication externe qu’en communication interne. Puis l’international : notre communication est encore trop centrée sur des problématiques franco-françaises.

Enfin, dans le secteur public, pour un directeur de la communication, le développement de la marque peut être une difficulté si l'équipe dirigeante et les enseignants-chercheurs ne sont pas convaincus de l’importance de la marque. Un gros travail de pédagogie reste à faire sur ce sujet.


Le 18 octobre, une conférence EducPros : "Le sup change sa com"
Léonor Manent intervient jeudi 18 octobre lors de la conférence EducPros consacrée aux enjeux de communication dans le supérieur sur le thème suivant : "Territoires : le nouveau relais des établissements", aux côtés de Marie-Pauline Gacoin, directrice de la communication de l’université Paris-Saclay, et de Philippe Adnot, sénateur de l’Aube.
Retrouvez le programme complet de cette journée ici et le live-tweet de la conférence sur notre compte @Educpros.

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