Toulouse School of Economics devient un établissement autonome

Guillaume Mollaret Publié le
Toulouse School of Economics devient un établissement autonome
TOulouse School of Economics // ©  Lydie Lecarpentier/REA
Jusqu’ici composante de l’Université Toulouse 1-Capitole, Toulouse School of Economics, longtemps dirigée par le prix Nobel d’économie 2014, Jean Tirole, obtiendra prochainement le statut de grand établissement. Une émancipation d’une tutelle que la célèbre école estime encombrante pour son développement.

Toulouse School of Economics (TSE) va couper le cordon. La célèbre école d'économie, longtemps dirigée par Jean Tirole (Prix Nobel d’économie en 2014) et jusqu’ici composante de l’Université Toulouse 1-Capitole (UT1), se verra prochainement dotée d’un statut de grand établissement, synonyme d’une autonomie administrative, pédagogique, scientifique et financière.

Un statut de grand établissement qui ne doit pas fragmenter l'identité de TSE

C’est par un courriel envoyé lundi à l’ensemble des étudiants et personnels d’UT1 (plus de 20.000 personnes) que le président de la Toulouse school of economics (TSE), Hugues Kenfack, a informé sa communauté de cette décision émanant de son autorité de tutelle. "Le ministère de l’Enseignement supérieur vient de m’informer de sa volonté de conférer le statut de grand établissement à la Toulouse School of Economics", écrit-il, factuel, en préambule.

Tout en saluant la volonté d’excellence de la célèbre école toulousaine, Hugues Kenfack critique ensuite en creux la démarche : "Cette recherche de l’excellence ne doit pas permettre un modèle unique réservé à une élite. Vous le savez, ce n’est pas ma conception de l’excellence", grince-t-il devant le risque représenté par la "fragmentation de notre identité" liée à l’émancipation prochaine de TSE.

Car ce sont bien deux visions de l’enseignement supérieur et de la recherche qui sont ici défendues. D’un côté se présente un établissement universitaire attaché à offrir des débouchés professionnels à ses 20.000 étudiants dans leur diversité ; et de l’autre une école sélective dont les exigences sont calquées sur les plus hauts standards internationaux du genre.

Un grand établissement opérationnel à la rentrée 2023

Si les racines du mal sont anciennes entre l'école et sa maison-mère, elles se sont affichées au grand jour en janvier dernier lorsque TSE a souhaité proposer à la communauté universitaire un projet scientifique dissident de celui défendu par la Comue dans le cadre de l’appel à projet PIA 4.

Si, Toulouse Tech University, le projet travaillé par TSE en partenariat avec des chercheurs de l’Université Paul Sabatier (Toulouse 3) et l’ISAE-Sup’Aero, n’a in fine pas été retenu, la pugnacité de ses défenseurs semble avoir trouvé une oreille attentive rue Descartes. "Cela fait longtemps que TSE défend la création d’un grand établissement. Nous voulons croire que la qualité du dossier que nous avons présenté a servi d’accélérateur. Il y a en tous cas une prise de conscience que le potentiel de TSE sur le plan du projet scientifique et pédagogique est difficile à développer dans le contexte de gouvernance actuel", estime Joël Echevarria, le directeur général des services de TSE.

Sur le plan administratif, la publication d’un décret d’indépendance de TSE au Journal Officiel peut être rapide pour peu que le Conseil d’État décide de se montrer réactif. Mais concrètement, il faudra probablement attendre la rentrée 2023 pour que l’établissement autonome soit opérationnel. Transfert de postes, convention de partenariats et budget devront, être autres, être revus et réévalués à l’aune de la nouvelle situation juridique de TSE.

"Une mauvaise nouvelle" pour l'Université Toulouse Capitole (UT1)

Si Hugues Kenfack a décliné toutes les demandes d’interview, certains enseignants-chercheurs réagissent et regrettent la décision du ministère. "Il est certain que ce n’est pas, de mon point de vue, une bonne nouvelle pour notre université", juge Philippe Nélidoff, doyen de la faculté de droit et de sciences politiques d’UT1.

"Cette décision en faveur de TSE est bien la preuve que Jean Tirole a l’oreille d’Emmanuel Macron et qu’il ne pouvait rester sur le camouflet du rejet de son projet TTU dans le cadre du PIA 4. C’est une politique de l'entre-deux. Le gouvernement ne pouvait pas débouter un prix Nobel sans compensation rapide à ses exigences", estime un autre enseignant-chercheur.

"Nous ne souhaitons pas couper les ponts avec l’UT1. Au contraire, nous voulons apporter notre expertise et notre savoir-faire au projet commun. Nous voulons conserver nos doubles diplômes avec UT1 et les enseignants-chercheurs intervenants chez nous aussi", défend-on chez TSE qui souhaite développer "une école de sciences sociales quantitatives" de niveau international avec la London School of Economics pour modèle.

Reste à la communauté universitaire toulousaine d'absorber ce schisme et intégrer dans un futur proche une 32e membre au sein de la Comue Université fédérale de Toulouse…

Guillaume Mollaret | Publié le