Yves Palau (IEP de Fontainebleau) : "Nous voulons renforcer nos liens avec le tissu de l'Est francilien"

Agnès Millet Publié le
Yves Palau (IEP de Fontainebleau) : "Nous voulons renforcer nos liens avec le tissu de l'Est francilien"
IEP Fontainebleau // ©  Photo fournie par l'établissement
Créé en 2023, le nouvel IEP de Fontainebleau a fait sa première rentrée, il y a six mois. Bilan du recrutement étudiant et du premier semestre, nouveau campus et projets à lancer : Yves Palau, son directeur, fait le point pour EducPros.
Yves Palau IEP Fontainebleau
Yves Palau IEP Fontainebleau © Photo fournie par le témoin

C'est le 11e du nom : l'IEP de Fontainebleau a été lancé à la rentrée 2023. Créé par la transformation de l'École internationale d'études politiques et toujours rattaché à l'université Paris-Est Créteil (UPEC), il propose désormais, à côté des licences et de masters déjà existants, un diplôme d'études d'IEP. Et déploie progressivement sa stratégie.

Comment s'est passée la première rentrée ? Quel bilan tirez-vous du recrutement pour le diplôme d'IEP ?

Comme prévu, nous avons accueilli 70 nouveaux étudiants, recrutés sur concours, via Parcoursup, pour notre première promotion.

Ils ont un profil très national : 75% sont issus d'une académie hors d'Ile-de-France, répartis sur plus de 50 départements. Par ailleurs, 10% viennent de Seine-et-Marne.

L'origine géographique n'est pas un critère de sélection – même si nous espérions un certain équilibre. Cette répartition est plutôt le fruit du hasard mais elle illustre notre rayonnement national et notre ancrage territorial.

Et nous avons une bonne sélectivité. Nous avons enregistré cette année 555 vœux confirmés. Avec 7,9 candidatures par place, nous nous situons dans un ratio similaire à celui des sept IEP du concours commun.

Vous souhaitiez mettre en place un quota de boursiers : l'avez-vous fait ?

Comme pour tous les cursus, le ministère nous contraint à un certain objectif, via Parcoursup. Il se situait pour nous autour de 20%.

Lors de l'examen des dossiers, nous ne disposons pas d'indicateurs fins, car être boursier du secondaire et être boursier dans le supérieur ne se recoupe pas toujours. In fine, nous affichons 30% de boursiers dans notre formation IEP - et c'est à l'image de ce que l'on a dans nos autres diplômes.

Quel est le profil académique des étudiants admis ?

Beaucoup d'entre eux ont suivi une spécialité en sciences exactes et une autre en sciences humaines. Cela faisait partie de nos critères, puisque notre diplôme d'IEP présente cette pluridisciplinarité.

Ce n'est pas le cas pour tous, car si le système de Parcoursup nous permet de sélectionner des candidats, ceux-ci ont le choix ou non de valider. Nous n'avons donc pas 100% d'élèves au profil hybride.

Comment s'adaptent ceux qui n'avaient pas d'enseignement scientifique au lycée ?

Nous avions une petite inquiétude sur ce sujet. Mais ceux qui ne suivaient que des spécialités en sciences humaines et sociales suivent bien le rythme. Pour que tout se passe au mieux et pour favoriser les interactions, nous avons aussi mis en place des petits groupes.            

Par ailleurs, nos enseignants de sciences, venus de l'UPEC, savent bien qu'ils s'adressent à un public différent de leurs étudiants habituels. Sur la perception de leur niveau en sciences, on constate que les étudiants sont d'ailleurs plus inquiets que les enseignants. À la fin de l'année, nous referons un bilan.

Justement, concernant le bilan, avez-vous des premiers retours sur la maquette de votre diplôme ? Des ajustements sont-ils nécessaires ?

Nous avons organisé des réunions avec des étudiants et des enseignants, pour voir ce que l’on peut faire évoluer. La maquette ne sera pas modifiée, mais nous allons augmenter le nombre de conférences de méthode, c'est-à-dire nos classes à petits effectifs, avec une vingtaine d'étudiants.

Elles existent pour les cours en anglais. Nous les systématiserons en mathématiques pour mieux accompagner les étudiants à titre individuel, mais aussi en sciences, pour améliorer le fonctionnement par projet de ces cours.

Quels sont vos projets sur l'international ?

À la rentrée 2024, nos étudiants de 2e année partiront à l'étranger : cette mobilité est obligatoire pour notre diplôme d'IEP. Mais nous ne voulons pas que nos autres étudiants, inscrits dans nos L3 et M2, soient lésés pour leurs mobilités facultatives.

Nous sommes passés de 20 à 33 partenaires, en signant avec des établissements en Asie, au Brésil, en Turquie. Et nous continuons à chercher des partenaires, en privilégiant l'Europe, car nos étudiants d'IEP sont encore jeunes et cette proximité rassure.

Par ailleurs, nous ne voulons pas nous centrer sur l'anglais, mais enrichir notre offre de parcours en allemand, en italien et en espagnol.

Du côté de la gouvernance, les instances sont-elles installées ? Où en êtes-vous de vos recrutements de personnels ?

Les représentants ont été élus en décembre 2023. Il reste encore quelques personnalités extérieures à nommer pour que nous puissions nous réunir en séance plénière [le Conseil de l'Institut compte 32 membres dont 14 représentants des enseignants chercheurs, 6 représentants étudiants, 2 représentants des administratifs et 10 personnalités extérieures].

Nous avons un programme de recrutement mis en place avec la direction de l'UPEC, pour passer d'une douzaine d'enseignants-chercheurs à une vingtaine. À la rentrée 2023, nous avons pourvu deux postes, nous en ouvrirons deux autres en 2024, et ainsi de suite.

Du côté des personnels administratifs, nous avons déjà doublé nos effectifs pour atteindre une douzaine de personnes. Car nos étudiants demandent un accompagnement fort, pour leurs stages, l'international, etc.  

Nous avons également recruté une personne dédiée à la formation continue car nous souhaitons développer une offre à destination des élus territoriaux.

Avez-vous tissé des liens avec les autres IEP ?

Les IEP ne souhaitaient pas notre création – et s'en étaient d'ailleurs ouverts à la ministre [de l'ESR] par courrier. Pourtant, je pense que c'est une querelle qui n'a plus lieu d'être : il y avait eu les mêmes réticences quand l'IEP de Saint-Germain-en-Laye a été créé [en 2013].

Aujourd'hui, il existe des relations interpersonnelles mais il n'y a pas véritablement d'échanges institutionnels particuliers. Nous n'avons pas de besoin majeur en ce sens, car nous ne recrutons pas les mêmes profils. Si, plus tard, nos étudiants veulent intégrer des masters dans d'autres IEP, nous travaillerons le sujet.

Est-ce que la dynamique avec les composantes de votre université s'est renforcée ? Et avec les autres établissements de l'Est parisien?

Nous souhaitons lancer de nouveaux doubles diplômes et des passerelles, notamment avec nos collègues juristes et ceux de l'IAE. Nous envisageons aussi de créer un double diplôme avec Episen, l'école d'ingénieurs, à dominante santé et numérique.

Mais, pour le moment, l'UPEC est en pleine phase d'auto-évaluation et d'évaluation par le Hcéres.

Dans l'Est, nous avons déjà des liens en recherche avec l'université Gustave Eiffel. Quant à l'Insead, nous sommes en discussion avec la nouvelle direction pour des projets de formation communs.

Nous voulons surtout renforcer nos liens avec le tissu politico-administratif de l'Est francilien, mais aussi avec le tissu économique. Avec le lancement de doubles diplômes UPEC, c'est notre piste prioritaire.

Le 18 décembre, Sylvie Retailleau, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, était présente à l'inauguration de vos nouveaux locaux. Le signe d'un soutien fort ?

En effet, nous avons de jolis locaux, de 2.000 m², qui abritent notamment une bibliothèque depuis début janvier. Un autre bâtiment doit être livré plus tard, que l'on partagera avec un Institut de formation en soins infirmiers (Ifsi).

Concernant la présence de la ministre, c'est très clair qu'il y a une volonté de marquer un fort soutien à l'IEP. En tant que scientifique, l'idée d'élargir les sciences politiques aux disciplines scientifiques intéresse particulièrement Sylvie Retailleau. Notre ancrage territorial - pendant de l'ancrage de l'IEP de Saint-Germain-en-Laye - a également retenu son attention.

Agnès Millet | Publié le