La fronde des IUT de Toulouse 3 fera-t-elle tache d’huile?

Florence Pagneux Publié le
La fronde des IUT de Toulouse 3 fera-t-elle tache d’huile?
Universite - campus de Toulouse 3 // © 
Et si, un an après, la fronde des IUT reprenait de plus belle ? L’assemblée générale des directeurs d’IUT (Instituts universitaires de technologie) devrait fournir le 21 octobre un état des lieux. A Toulouse, la situation est tendue entre l’université Paul Sabatier (UPS) et ses deux IUT. Ces derniers dénoncent une perte de leurs prérogatives budgétaires liée au passage de l’université à l’autonomie en janvier 2010. Le président de l’UPS parle «d’incompréhensions» et de «désinformation».

Depuis la rentrée, le torchon brûle entre l’université Paul Sabatier (UPS) Toulouse 3 et ses IUT, qui rassemblent à eux deux 6500 étudiants (5200 à l’IUT Paul Sabatier et 1300 à l’IUT de Tarbes). Les discussions achoppent sur la lettre de cadrage budgétaire rédigée par la présidence de l’université en vue de son passage à l’autonomie en janvier prochain. L’UPS fait en effet partie des 33 universités qui disposeront à cette date des responsabilités et compétences élargies prévues par la loi LRU.

La lettre de cadrage crée deux nouvelles unités budgétaires (UB) pour l’année 2010 : « ressources humaines » et « patrimoine et logistique ». Pour le président de l’UPS Gilles Fourtanier , il s’agit de gagner en visibilité pour « un meilleur pilotage des moyens ». Mais selon Patrick Laurens, directeur adjoint de l’IUT Paul Sabatier, ce dispositif revient à « centraliser » une grande partie du budget des IUT. « Avant, nos crédits étaient fléchés directement par l’Etat, rappelle-t-il. Désormais, il passeront d’abord par le président de l’université ».

Jusqu’à présent gérées directement par les directeurs d’IUT, les heures complémentaires (heures supplémentaires des titulaires, intervenants professionnels, professeurs vacataires...) seront ainsi inscrites dans l’UB « ressources humaines ». Cette nouvelle architecture « retire aux directeurs d’IUT leur prérogative d’ordonnateur de droit des recettes et des dépenses et constitue une porte ouverte au démantèlement des instituts », dénonce Patrick Laurens, qui craint des redéploiements au profit d’autres composantes et s’inquiète pour l’avenir des IUT des villes moyennes.

« On utilise une situation locale pour dénoncer une situation nationale », regrette le président de l’UPS, rappelant que le directeur de l’IUT Paul Sabatier n’est autre que Jean-François Mazoin, président de l’Assemblée des directeurs d’IUT (ADIUT). Gilles Fourtanier rappelle qu’aucun moyen n’a été retiré aux IUT cette année. Il ajoute que des « centres financiers » ont été créés spécifiquement pour le budget des IUT. « Ce n’est quand même pas la même chose », répond Patrick Laurens.

Les compétences élargies inquiètent

Les directeurs toulousains en appellent à l’arbitrage du ministère de l’Enseignement supérieur. « Si la disparité de traitement devient la règle, ce sera la fin des IUT », prédit Patrick Laurens. La circulaire du 20 mars 2009 appelant à la signature de contrats d’objectifs et de moyens (COM) entre IUT et universités ne semblent pas apaiser les inquiétudes. D’ailleurs, un COM a été signé cet été à Toulouse 3. « De toute façon, les universités ne jouent pas le jeu, pointe Patrick Laurens, seuls 49 COM sur 115 avaient été signés en septembre ».

Qu’en est-il dans les autres IUT ? Une assemblée générale de l’ADIUT prévue mercredi 21 octobre devrait permettre d’établir un bilan. « Notre situation est emblématique de ce qui se passe ailleurs », assure Patrick Laurens. A Nancy 2, qui ne passera pas avant 2011 aux compétences élargies, le directeur de l’IUT Nancy-Charlemagne Herbert Nery affiche une certaine sérénité. « Chez nous, les IUT sont respectés, constate cet ancien président d’université. Je vois mal les IUT disparaître en raison de leur succès ».

Il reconnaît toutefois que le passage aux compétences élargies constitue « un moment délicat ». Ancien directeur de l’IUT de Clermont-Ferrand, Denis Richard se montre plus pessimiste. « La loi LRU rend les universités plus autonomes mais du même coup, retire l’autonomie aux IUT ». Pour lui, l’avenir des IUT pourrait s’écrire sans les universités. Une position qui reste pour l’heure minoritaire.

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