M. Martin (ADIUT) : "Le BUT a permis de donner plus de cohérence aux formations en IUT"

Caroline Celle Publié le
M. Martin (ADIUT) : "Le BUT a permis de donner plus de cohérence aux formations en IUT"
Martial Martin, président de l'Adiut, fait le point sur la réforme des IUT. // ©  HJBC/Adobe Stock
Lancée en 2021, la réforme des DUT en BUT prolonge le cursus de deux à trois ans. Martial Martin, président de l'Assemblée des directeurs des IUT, dresse son bilan de la mise en place des bachelors universitaires de technologie.
Martial Martin, directeur de l'IUT de Troyes et président de l'ADIUT depuis 2021
Martial Martin, directeur de l'IUT de Troyes et président de l'ADIUT depuis 2021 © Adiut

Depuis la rentrée 2021, le Bachelor universitaire de technologie (BUT) remplace le Diplôme universitaire de technologie (DUT). La réforme engagée dans le IUT par le ministère de l'Enseignement supérieur a mis en place un bachelor sur trois ans, avec grade de licence.

L'année universitaire 2023-2024 achève donc un premier cycle de BUT, avec environ 50.000 diplômés d'ici septembre 2024. Martial Martin, président de l'Assemblée des directeurs d'IUT (ADIUT), revient sur les évolutions du cursus.

En quoi la nouvelle formation en BUT permet-elle aux étudiants d'avoir un diplôme plus solide ?

Le DUT, en deux ans, était une forme de vestige assez atypique dans le paysage des diplômes européens, parce qu'il n'était pas très bien articulé aux autres formations universitaires. Les élèves devaient passer par une sélection à l'entrée du DUT puis une deuxième sélection s'ils souhaitaient s'orienter vers une troisième année de licence professionnelle.

Le BUT a permis de sécuriser un cycle de trois ans pour nos étudiants, avec un grade de licence.

Le BUT a permis de donner plus de cohérence aux formations en IUT et de sécuriser un cycle de trois ans pour nos étudiants, avec un grade de licence. Les étudiants peuvent ensuite faire le choix d'entrer dans le monde du travail ou de poursuivre en master.

La formation a-t-elle donc atteint son objectif de devenir plus professionnalisante ?

On vise effectivement un taux d'insertion professionnelle directe de 50% à la fin de l'année universitaire 2023-2024. Je pense que cela sera possible parce que la réforme des BUT donne une part beaucoup plus large part à l'alternance, en 2e ou en 3e année.

Actuellement, sur l'ensemble des IUT, 25 à 35% des étudiants sont apprentis. En 3e année, la proportion d'apprentis oscille entre un quart et la moitié des élèves, selon les spécialités. Les projets professionnels et les stages en entreprise sont aussi plus nombreux qu'en DUT, avec 22 à 26 semaines de stage.

Et dans les programmes, un tiers des activités pédagogiques sont maintenant adaptées aux besoins locaux pour permettre à nos diplômés de s'insérer auprès des acteurs de leur région. Par exemple, dans les régions très axées sur l'agriculture, on donne aux élèves certains enseignements spécifiques comment la gestion de la comptabilité d'une entreprise agricole.

Mais le diplôme reste national, et il permet d'exercer son métier dans toute la France.

Est-ce que le nouveau cursus a changé la manière d'enseigner en IUT ?

La réforme a permis de définir un référentiel de compétences pour chaque spécialité du BUT, et les enseignants ont dû revoir leur façon d'enseigner pour mettre en œuvre cette approche par compétences.

Ils ont dû articuler l'enseignement universitaire à des situations d'apprentissage et d'évaluation. C'était un travail nécessaire pour permettre aux étudiants de mieux saisir l'utilité de leurs savoirs universitaires dans leur future vie professionnelle.

La nouvelle formation a aussi l'avantage d'être maintenant liée à un conseil de perfectionnement composé d'étudiants, d'enseignants et d'acteurs du monde socio-économiques. Ils réfléchiront, de manière continue, à ce qui doit être amélioré, afin que les programmes puissent être modifiés rapidement.

Y a-t-il suffisamment d'enseignants en IUT pour assurer un cursus qui se prolonge d'une année ?

Les IUT ont dû recruter davantage pour assurer ces enseignements. On a bénéficié du soutien du ministère de l'Enseignement supérieur pour les universités avec une enveloppe de 13 millions d'euros pour la masse salariale.

Parmi nos stratégies de recrutement, on a cherché davantage d'enseignants issus du monde socio-professionnel et on aimerait qu'un quart des enseignements soient effectués par des professionnels. Cela est plus ou moins simple en fonction de la zone géographique et des disponibilités.

On a bénéficié du soutien du ministère de l'Enseignement supérieur pour les universités avec une enveloppe de 13 millions d'euros pour la masse salariale.

Les IUT mettent aussi à profit les ressources financières issues de l'apprentissage pour recruter des enseignants contractuels et enseigner certaines spécialités que les enseignants-chercheurs n'ont pas.

Les élèves de BUT doivent-ils attendre la 3e année pour tenter des passerelles et intégrer une école d'ingénieurs ou de commerce ?

Les étudiants gardent la possibilité de poursuivre leur cursus vers une licence ou une école à bac+2, car la réforme du BUT ne supprime pas définitivement le DUT. Ils l'obtiennent automatiquement à la fin des deux ans, mais ce DUT ne donne pas de titre professionnel, alors que la formation des BUT l'attribue désormais et, en cela, elle donne un bagage plus confortable.

Les élèves qui partent en bac +2 sont minoritaires : on en compte moins de 10% sur l'année universitaire 2023-2024 dans l'IUT de Troyes que je dirige, par exemple. La plupart souhaitent conduire leur cursus à son terme avant de tenter les écoles. Ils comprennent qu'il vaut mieux acquérir de l'expérience pour éviter le risque d'être en échec dans l'école de leur choix, après l'IUT.

Vers un nouveau changement de nom ?

Alors que la réforme du DUT vers le BUT a vu le jour à la rentrée 2021, ce diplôme pourrait déjà changer de nom. En effet, le rapport issu de la mission d’information sur l’enseignement supérieur privé à but lucratif considère que le terme de 'bachelor' est "associé aux formations délivrées par l’enseignement supérieur privé".

Aussi la création du bachelor universitaire de technologie, diplôme national conférant le grade licence, apparaît comme "une source de confusion", selon les rapporteurs. Ces derniers estiment qu'il "pourrait être opportun que le BUT change de nom afin de ne plus utiliser la terminologie "bachelor", et donc de modifier le nom des BUT.

Caroline Celle | Publié le