Entrée à l'université : le Cneser donne son feu vert pour l'application du nouvel arrêté licence

Laura Taillandier Publié le
Entrée à l'université : le Cneser donne son feu vert pour l'application du nouvel arrêté licence
Les universités ont jusqu'à la rentrée 2019 pour appliquer le nouvel arrêté licence. // ©  Myr Muratet
Dernière pièce manquante pour l’application de la réforme de l'entrée à l'université, le nouvel arrêté licence a été adopté par le Cneser lundi 9 juillet 2018. Avec à la clé une ultime rédaction de l'article 22 portant sur l'habilitation des établissements à délivrer le diplôme qui réaffirme le rôle pilote des universités.

La dernière version du projet d'arrêté relatif au diplôme national de licence aura fini par convaincre. Avec 42 votes pour, 34 contre et 5 abstentions, le Cneser a adopté le texte pris en application de la réforme de l'entrée à l'université, lundi 9 juillet 2018. Principal enjeu de la longue séance, les discussions autour de la rédaction de l'article 22 portant sur l'habilitation des établissements à délivrer le diplôme.

Ultime modification de l'article 22

"La ministre a fait valoir son droit à une seconde chance et concédé les premières rédactions maladroites. Elle a réaffirmé qu'il ne s'agissait pas d'étendre la capacité à délivrer la licence", rapporte Matthieu Gallou, le président de l'Université de Bretagne occidentale, qui siège au Cneser.

La Rue Descartes s'est donc engagée à modifier cet article et devrait y préciser que les universités ainsi que les regroupements qui intègrent au moins une université sont accrédités à délivrer les diplômes nationaux de licence, seuls ou conjointement avec d'autres établissements publics d'enseignement supérieur. Et si la préparation d’une licence peut être assurée par d'autres établissements d'enseignement supérieur, cela doit l'être dans les conditions fixées par des conventions conclues avec des établissements habilités à la délivrer et sous la responsabilité de ces derniers. Une ultime version qui satisfait la CPU (Conférence des présidents d'université) mais aussi le Sgen-CFDT et Sup-Recherche Unsa, lesquels ont voté en faveur du projet d'arrêté.

Frédérique Vidal aura profité de la séance pour insister sur le positionnement de l'université par rapport aux autres cursus. "Je le dis clairement : il est grand temps de cesser d’opposer les formations et les voies les unes aux autres. Nous avons des grandes écoles, des classes préparatoires, des BTS et des IUT comme nous avons des licences universitaires fortes et attractives", a-t-elle souligné. Le ministère de l'Enseignement supérieur lancera ainsi à la rentrée un chantier autour de la notion de professionnalisation des différentes formations, "en s’attachant non seulement à la licence, mais également à la licence professionnelle, aux DUT et même aux BTS".

Une "large autonomie" mais une régulation

Cette séance aura aussi été l'occasion pour la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche de rassurer sur les changements apportés par ce nouvel arrêté licence. "Nous reconnaissons enfin aux équipes pédagogiques la large autonomie qui doit être la leur, au niveau des formations comme des établissements", estime Frédérique Vidal. "Le cadre réglementaire demeure donc. La vraie différence, c’est qu’à l’intérieur de ce cadre nous explicitons et ouvrons des voies pédagogiques nouvelles pour les établissements et les formations. Chacun pourra ensuite s’en saisir et choisir celles qui lui conviennent, au regard de son histoire, de son expertise, de sa stratégie et bien entendu des étudiants qu’il accueille, a-t-elle développé. Ce seront de vraies décisions qui seront ainsi prises, qui engageront l’identité de chaque établissement et c’est cette identité qui, dans les années qui viennent, sera au cœur des choix faits par les étudiants."

Aussi, à côté des mentions génériques "ayant toujours vocation à être déployées dans de nombreux établissements et définies nationalement par arrêté ministériel, les universités pourront proposer lors de la procédure d’accréditation de leur offre de formation des mentions spécifiques relevant de leur projet d’établissement ou de site", indique la ministre. Mais celle-ci garantit aussi que "l’État sera pleinement présent". "Demain la régulation se fera au travers de l’accréditation, qui s’appuiera à la fois sur l’évaluation interne des établissements et l’évaluation du HCERES. Je le dis donc très clairement : l’État est et demeure le garant de la qualité des diplômes qui sont délivrés en son nom."

Un nouveau dialogue de gestion

Pour Frédérique Vidal, le déploiement de la réforme donne ainsi la possibilité de faire de la formation un axe stratégique de la politique de l'établissement décrite dans le contrat quinquennal avec l’État. Avec une nouveauté qui va être expérimentée en 2018 dans une poignée d'établissements : un dialogue de gestion "régulier" avec le ministère pour "faire le point avec les établissements sur leur action pédagogique en faveur de la réussite des étudiants". Les Comue PSL (Paris Sciences et Lettres) et de Côte d'Azur, les universités de Montpellier, de Reims, de Strasbourg, d'Aix-Marseille et Sciences Po Paris se seraient déjà portées volontaires pour tester ce nouveau dialogue de gestion.

La CPU a souhaité être associée à l'expérimentation mais se veut prudente. "Si la question est de travailler sur la mise en œuvre de la réforme, le dialogue de gestion peut être un bon outil, mais s'il est question de répartition des moyens entre établissements nous sommes beaucoup plus réservés", résume Matthieu Gallou. Le président de l'UBO y voit plusieurs points de vigilance : "que ce dialogue ne conduise pas à des plus ou des moins dans les dotations des établissements" et "qu'un interlocuteur spécifique soit identifié au niveau des régions académiques". Un interlocuteur qui pourrait être un vice-chancelier des universités comme évoqué dans la réforme de l'organisation territoriale des ministères de l'Éducation nationale et de l'Enseignement supérieur qui se profile.

Avec ce feu vert du Cneser, la réforme de l'entrée à l'université peut donc se déployer dans les établissements, dans le détail, jusqu'à la rentrée de septembre 2019 ; date à laquelle les universités devront toutes avoir appliqué les nouveautés de l'arrêté licence. "Par ce vote positif, la communauté éducative a fait un signe de confiance au gouvernement. Si ce dernier ne fait pas un pas sur les moyens nécessaires pour mettre en œuvre la réforme, l'année 2019 risque d'être compliquée", prévient Stéphane Leymarie, le secrétaire général de Sup-Recherche Unsa.

Laura Taillandier | Publié le