Malgré une année "complexe", Kedge est "solide financièrement", selon Alexandre de Navailles

Agnès Millet Publié le
Malgré une année "complexe", Kedge est "solide financièrement", selon Alexandre de Navailles
Kedge présente les avancées de son plan stratégique 2020-2025. // ©  Kedge BS
Alors que Kedge traverse des difficultés internes, l'école de commerce présente les avancées de son plan stratégique 2020-2025 ainsi que ses projets pour les prochains mois, dans un contexte hautement concurrentiel.

Le 4 avril, Kedge présente, lors d'une conférence de presse à Paris, les projets accomplis de son plan 2020-2025 et ceux à venir. Il fallait pourtant aborder le sujet qui fâche puisque quelques jours plus tôt, Rue89 révélait un déficit de près de 6 millions euros sur l’exercice 2022-2023.

Nos confrères précisaient que 133 enseignants-chercheurs (sur près de 200) avaient signé un texte soulevant une "incompétence opérationnelle", une "stratégie défectueuse" et une "incapacité à comprendre les impératifs académiques". Cette "motion de censure" cible notamment le directeur général, Alexandre de Navailles.

Lors du point presse, celui-ci répond que cette motion "ne veut rien dire [dans cette situation]. Une motion de censure est une action d'un Parlement envers un gouvernement, mais non d'un groupe de professeurs contre un directeur général nommé par un conseil d'administration".

Des difficultés financières "conjoncturelles"

Sur la question financière, Alexandre de Navailles rétorque que si l'année 2022-2023 a été "complexe" pour Kedge, cela est le résultat d'éléments conjoncturels et non structurels, notamment dus à l'inflation. L'an passé, l'école a dû absorber "2,5 millions d'euros de plus de charges d'énergie". Les charges de fonctionnement ont aussi suivi cette inflation pour près d'un million d'euros". De plus, Kedge avait "fait le choix d'augmenter les salaires ".

Par ailleurs, l'école "a beaucoup investi ces quatre dernières années", sur ses campus, sa technologie, sa pédagogie". Au total, "30 millions d'euros investis et 10 millions d'euros encore cette année". L'école a également recruté "une cinquantaine de professeurs et doctorants".

Pour le directeur général, Kedge a des fondamentaux "extrêmement solides" et "a développé son activité de pas loin de 15% depuis le Covid. Kedge a une trésorerie très positive, des fonds propres très positifs. Kedge n'a pas de dette aujourd'hui. Kedge est solide financièrement", martèle-t-il.

Il ajoute que l'école a enregistré 4% de hausse des effectifs étudiants à la rentrée 2023. "Cela nous permet d'avoir un chiffre d'affaires - ou des frais de scolarité sur les nouveaux - en hausse de près de 10%".

De plus, il évoque des "relais de croissance", tels que la formation continue, le développement du campus parisien, ouvert début 2023 et les viviers d'étudiants internationaux, notamment en Afrique et en Inde.

Des discussions en cours avec le corps professoral

Au sujet de la fronde des professeurs, le directeur général affirme que l'école a des fondamentaux solides en matière académique. Quant aux relations avec les enseignants-chercheurs, s'il n'y a pas de négociations ouvertes, des discussions sont en cours pour amender le texte du corpus des règles professorales.

Elisabetta Magnaghi, directrice générale adjointe et doyenne des affaires académiques, complète en expliquant que l'origine de la grogne vient d'une décision de la direction de réécrire les règles professorales qui "n'a pas été faite au bon moment et de la bonne manière". Cela a créé "énormément de frustrations" et "une coupure avec le corps professoral que je suis arrivée heureusement à renouer, pour relancer le travail".

Depuis, des groupes de travail ont été mis en place sur la "recherche, la valorisation de certaines activité ou le plan de charge.(…) La démarche est appréciée. Cela permettra d'avoir un texte co-écrit avec la faculté" et la direction. Il servira de base "pour entamer éventuellement des négociations au deuxième semestre".

Poursuivre le plan stratégique 2025

Malgré ce passage difficile, l'école de 15.000 étudiants réaffirme son ancrage à Marseille et Bordeaux, son axe entrepreneurial et sa pédagogie basée sur l'expérience et le "faire", baptisée "Grow by doing".

À ce jour, quatre des 27 projets du plan 2020-2025 ont atteint leur objectif et plusieurs sont "matures", précise Alexandre de Navailles. Ainsi, les recrutements d'étudiants internationaux sont en hausse, puisqu'ils représentent 17% des élèves, contre 10% auparavant.

Pour la "dernière ligne droite", le plan se recentre sur sept priorités parmi lesquelles le développement de la formation continue, le développement du corps professoral et la robustesse économique du modèle.

Robustesse qui doit passer par la formation continue qui représente 10% de l'activité quand l'école souhaiterait atteindre 20%.

Face à la concurrence, proposer davantage de nouveauté

Par ailleurs une direction de la prospective et de l'idéation est créée. "Il faut sortir des sentiers battus et rebattus. Le mimétisme fait la loi" dans les écoles de management, déplore Sylvie Jean, directrice des programmes. Cette cellule doit aller plus loin que les investissements déjà réalisés dans l'innovation pédagogique.

En effet, selon Aurélie Dehling, nommée directrice de ce pôle, les entreprises déplorent que les diplômés aient "de moins en moins de relief". L'objectif est donc de "renifler ce monde qui bouge", pour lancer de nouveaux projets.

Une différenciation indispensable face à l'arrivée de nouveaux concurrents. "Il y a un certain niveau de financiarisation de l'enseignement supérieur", constate Alexandre de Navailles. Devant ces acteurs aux offres "très hybrides et très originales", l'école se trouve "bousculée" et est poussée vers plus de spécialisation ou d'hybridation.

Des évolutions dans l'articulation des programmes

Des évolutions sont déjà lancées puisque des enseignements sur l'intelligence artificielle (IA) seront obligatoires dans tous les parcours post-bac et en PGE 1. Des formations hybrides sur l'IA, les technologies de l'information et la cybersécurité pourraient être lancés avec des partenaires.

Par ailleurs, deux programmes post-bac seront repositionnés à l'automne 2024 : l'international BBA en quatre ans et l'EBP International en cinq ans.

Le bachelor en trois ans connaît également des changements. Ses spécialisations s'aligneront sur celles des MSc pour clarifier l'offre et augmenter le taux de poursuite d'études en interne actuellement de 30%. Il sera possible de suivre un semestre dans l'une des écoles internes de Kedge et éventuellement d'y poursuivre ses études en master.

Par ailleurs, le bachelor – qui recrute plus de 700 étudiants - ouvre en son sein deux parcours. Pour le parcours "maths +", 30 élèves seront sélectionnés parmi ceux qui avaient cette spécialité en terminale. Ils suivront des maths approfondies et, en 2e année, une passerelle permettra à dix d'entre eux de suivre un double diplôme ingénieur avec le Cesi. L'autre parcours est un double diplôme avec l'École supérieure des professions immobilières.

Du côté du programme grande école (PGE), les MSc seront davantage imbriqués au programme. L'objectif est que tous les étudiants de M2 qui ne sont pas en alternance – soit un tiers des promotions - suivent un double diplôme, sans surcoût.

Réorganisation de la direction des affaires académiques

Menée par Elisabetta Magnaghi, directrice générale adjointe et doyenne des affaires académiques, depuis la fin août 2023, la direction des affaires académiques est remaniée, avec la création d'une direction de la prospective et de l'idéation et d'une direction des opérations, chargée de l'amélioration continue.

Aurélie Dehling prend la tête du nouveau pôle de prospective. C'est Céline Hay, actuelle directrice adjointe du PGE de Skema, qui lui succède à la direction du PGE de Kedge. Quant à Sylvie Jean, arrivée d'emlyon il y a un an, son portefeuille de directrice marketing et recrutement s'élargit aux programmes.

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