Fusion à l'Université de Toulouse : les établissements votent, les syndicats rejettent

De notre correspondant à Toulouse, Frédéric Dessort Publié le
Fusion à l'Université de Toulouse : les établissements votent, les syndicats rejettent
Le conseil d'administration de l'université Toulouse 2 a dû être reporté à cause d'une manifestation intersyndicale. // ©  Mathieu Oui
À l’exception de Toulouse 2, dont le conseil d'administration a été bloqué par une intersyndicale, les principales écoles et universités de Toulouse ont adopté une feuille de route pour reconquérir l'Idex. Une nouvelle université de Toulouse, fortement intégrée, qui suscite l'ire syndicale.

Une université de Toulouse avec plusieurs cercles d'établissement plus ou moins intégrés. Telle est la feuille de route adoptée depuis mi-janvier 2017 par les conseils d'administration des universités Toulouse 3 Paul-Sabatier, Toulouse 1 Capitole, de l'INP et de l'INSA de Toulouse, ainsi que de la Comue. À la clef : l'université de Toulouse proposée disposerait de larges prérogatives sur le site. Avec la volonté de reconquérir l'Idex, perdu en avril 2016, et la manne financière qui va avec.

Le nouvel ensemble, qui devrait prendre la forme d'un grand établissement au statut dérogatoire (qui n'existe pas encore) est appelé à être créé à l'horizon 2019. La feuille de route prévoit l'intégration de la Comue, Toulouse 2 et Toulouse 3, ces établissements étant appelés à perdre leur personnalité juridique. L'INP et l'INSA de Toulouse viendront se joindre à ce premier cercle, qui ne prendrait toutefois pas la forme d'une véritable fusion. Et cela, même si le nouvel établissement décidera de la stratégie de formation, de recherche et de la politique du site.

"Il ne s'agit pas de créer une entité centralisée. La définition des niveaux de subsidiarité sera un sujet important des prochaines semaines. Par exemple, les UFR ne vont pas disparaître, et continueront de préparer les diplômes", prévient Philippe Raimbault, président de l'université de Toulouse-Midi-Pyrénées.

Toulouse 1 hors du premier cercle

Toulouse 1 Capitole a décidé de soutenir le processus précisé par la feuille de route, mais en l'assortissant d'une motion suite au rejet très net de son comité technique et de son conseil académique. L'établissement présidé par Corinne Mascala a également choisi de ne pas appartenir au "premier cercle" de la future université de Toulouse, tout comme l'Enac, l'Isae et l'École nationale vétérinaire.

Ces quatre établissements devraient certes accepter que l'Université de Toulouse décide de leur stratégie de formation et de recherche. Mais ils ne lui délégueront pas leur politique RH, et conserveront la maîtrise des flux financiers provenant de l'État, à l'inverse, en tout cas à titre expérimental, du premier cercle. "D'autres établissements du site pourront venir s'adjoindre au deuxième cercle, et nous devrons réfléchir, pour eux, à un principe d'association", précise Philippe Raimbault.

Quant au projet Idex proprement dit, ses contours sont encore imprécis. Quels sont les établissements et équipes qui bénéficieront de ses mannes ? "L'ensemble des établissements du site, y compris au-delà du deuxième cercle, devront pouvoir candidater aux financements sur appel à projets, même si certaines thématiques pourront être réservées au premier cercle", plaide Philippe Raimbault.

toulouse 2 pose ses conditions

L'adoption assez nette de cette feuille de route par les conseils d'administration contraste avec les vives critiques des syndicats de personnels et étudiants, venus manifester en marge des votes des universités de Toulouse 3, Toulouse 2. Le 24 janvier, ils ont même envahi le CA de Toulouse 2 Jean-Jaurès, demandant l'annulation de la séance.

"J'ai décidé de souscrire à cette demande", a concédé Daniel Lacroix, président de l'établissement. "Je partage en partie les interrogations et réserves exprimées. C'est pourquoi je souhaite assortir le vote de la feuille de route d'un certain nombre de conditions de mise en œuvre." Des conditions qui, si elles n'étaient pas réunies en octobre, date d'un vote intermédiaire sur le contenu et la gouvernance du projet Idex, amèneraient Toulouse 2 Jean-Jaurès à sortir du processus.

Pour l'instant, Daniel Lacroix ne veut pas préciser les conditions en question. Les revendications syndicales sont des plus claires. "L'Idex instaure une organisation de l'enseignement supérieur et de la recherche à deux vitesses, explique un communiqué intersyndical. Les risques pour les étudiants et les personnels de l'université sont bien réels : offre de formation modifiée dans le but de s'adapter aux contraintes du tissu socioéconomique avec possiblement des fermetures de formation ; démarches administratives complexifiées du fait du mille-feuille administratif entre les composantes pédagogiques, les services et le sommet de l'UT."

Les syndicats inquiets du statut dérogatoire

Simon Dap, secrétaire adjoint de FO-SNPREES Haute-Garonne, souligne également le risque que pose le caractère dérogatoire du futur établissement : "C'est la porte ouverte à la modification du statut des enseignants-chercheurs, par exemple, en instaurant une modulation de service, ou encore l'augmentation des frais d'inscription."

Autant de craintes partagées par une intersyndicale élargie au site, venue manifester devant les portes du rectorat, vendredi 26 janvier, à l'occasion du vote de la Comue. "Le caractère dérogatoire des futurs statuts n'est pas du tout envisagé pour mettre en place des économies, il découle du modèle de gouvernance que nous voulons instaurer, balaie Philippe Raimbault. Aucun président ne m'a parlé de changer les statuts des personnels ni d'augmenter les frais d'inscriptions."

Forts des votes acquis, les membres de la Comue iront présenter leur projet en février au CGI (Commissariat général à l'investissement). Mais ils sont suspendus à la décision de Toulouse 2 qui doit à nouveau réunir son conseil d'administration dans les prochains jours.

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