Cordées de la réussite : des résultats malgré un manque de moyens

Camille Jourdan Publié le
Cordées de la réussite : des résultats malgré un manque de moyens
Les Cordées de la réussite proposent des ateliers de tutorat pour des collégiens ou lycéens. // ©  Adobe Stock/insta_photos
La DGESIP publie les résultats d’une enquête auprès des "têtes de cordées", établissements leaders des Cordées de la réussite. Ce dispositif du MESRI créé en 2008 met en lien l’enseignement supérieur et le secondaire, afin de "lutter contre l'autocensure et de susciter l'ambition scolaire des élèves". Cette enquête, parue en juin dernier, dresse un bilan plutôt positif, tout en relevant des pistes d’amélioration et un manque de ressources.

Quand le supérieur va à la rencontre du secondaire pour ouvrir les possibles et encourager des collégiens et lycéens issus de milieux défavorisés à poursuivre des études. C’est toute l’ambition du dispositif d’ouverture sociale "les Cordées de la réussite", mis en place en 2008. Quels sont les résultats et modalités de ces initiatives ? Comment faire mieux ? La DGESIP (Direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle) a fait le bilan.

Une cordée de la réussite, c’est d’un côté, une "tête de cordée", c’est-à-dire un établissement d’enseignement supérieur (une université, une grande école, un lycée accueillant une CPGE…) ; et de l’autre, des établissements "encordés", à savoir des collèges et/ou lycées de la voie générale, technologique ou professionnelle.

Ce dispositif, mis en place en 2008, vise à développer des partenariats entre ces deux niveaux d’enseignement, dans le but de permettre à des élèves d’accéder plus facilement aux études supérieures, notamment lorsqu’ils sont issus de quartiers prioritaires de la politique de la ville ou de zones rurales isolées.

200.000 collégiens et lycéens bénéficient du dispositif

Alors que 80.000 élèves avaient bénéficié des Cordées en 2019, ils sont plus de 200.000 en 2022. Dans le même temps, le nombre de "cordées" est passé de 400 à plus de 800, articulées autour de 500 établissements d’enseignement supérieur – une même "tête de cordée" pouvant en construire plusieurs.

Ce développement résulte notamment d’une extension du programme, depuis 2020, aux élèves de quatrième, mais aussi de l’attribution de nouveaux financements accordés dans le cadre du plan de relance. À un budget annuel de 1,5 million d’euros se sont ajoutés 2 millions d’euros supplémentaires en 2021 et 2022.

Information, tutorat et ouverture culturelle

Des activités culturelles, des séances d’information sur les métiers ou encore des ateliers de renforcement des compétences psychosociales sont également proposées. À l’Insa Lyon (69) par exemple, école à la tête de deux "cordées", du tutorat scolaire dans les sciences dures est mis en place, mais aussi des visites de campus, ou encore des ateliers de sensibilisation à la mixité femmes-hommes dans les métiers scientifiques.

Concernant le tutorat, l’enquête relève que 51,5% des établissements peinent à recruter des étudiants volontaires, pour de multiples raisons : difficulté à valoriser leur engagement et à le maintenir dans la durée, manque de moyens pour les encadrer, les soutenir, les former, éloignement géographique de certains établissements encordés…

Pour y remédier, les "têtes de cordée" ont des idées : rémunérer ces tuteurs, organiser des réunions de suivi, créer une communauté de tuteurs, lancer une campagne de communication sur les réseaux sociaux afin de vulgariser les "cordées"… Certains établissements valorisent d’ailleurs déjà leurs étudiants volontaires, en leur attribuant des crédits ECTS, ou encore en aménageant leur emploi du temps ou en les dispensant de certains cours.

Des résultats satisfaisants…

Même si les résultats des Cordées semblent difficiles à évaluer, la grande majorité des établissements estiment avoir atteint plusieurs des objectifs fixés par le dispositif, à savoir :
- élever l’ambition des élèves ;
- aider à leur orientation ;
- leur faire découvrir les établissements / les formations ;
- réduire l’autocensure.

Moins nombreux sont ceux qui parviennent à leur faire découvrir des métiers, développer leur ouverture culturelle, ou à leur apporter un appui méthodologique.

…malgré le manque de moyens humains et financiers

Outre les difficultés d’organisation imputables à la crise sanitaire au cours des deux dernières années, certaines "têtes de cordées" soulignent la mobilisation insuffisante des équipes pédagogiques, tant au sein de leur établissement que dans les établissements encordés.

Manque de temps, trop faible reconnaissance, et manque de moyens, sont les principales raisons évoquées. 33% des "têtes de cordée" jugent le budget alloué insuffisant. 36% d’entre elles le complètent avec des fonds propres, et 20% avec l’aide de partenaires.

"À l’Insa, nous comblons la baisse des subventions, parallèle à la hausse du nombre d’établissements partenaires, avec des dotations d’entreprises privées", rapporte Anna Loehr, référente pour l’école d’ingénieurs. Selon elle, les Cordées sont "bénéfiques pour les élèves et les étudiants, mais restent insuffisantes".

Outre des "moyens supplémentaires", elle préconise, comme d’autres têtes de cordées, de "développer les liens avec les familles" des élèves, pour mieux les accompagner vers les formations de l’enseignement supérieur.

Camille Jourdan | Publié le