Parcours préparatoire au professorat des écoles (PPPE) : quel bilan après les premières expérimentations ?

Oriane Raffin Publié le
Parcours préparatoire au professorat des écoles (PPPE) : quel bilan après les premières expérimentations ?
REA // ©  Mathilde MAZARS/REA
Lancé à la rentrée 2021, le Parcours préparatoire au professorat des écoles, ouvert dès le post-bac, reçoit de nombreuses candidatures. Premier bilan de ce parcours exigeant.

Pensé pour faire face à la crise des vocations dans l’enseignement - et tout particulièrement pour les professeurs des écoles -, le PPPE, Parcours préparatoire au professorat des écoles, a accueilli ses premiers étudiants à la rentrée 2021. Le dispositif garantit un niveau généraliste suffisant dans les matières fondamentales à des étudiants ayant suivi des enseignements différents au lycée.

Parcours de formation hybride répartissant le temps de formation entre un lycée et une licence universitaire, le PPPE intègre des stages pendant les trois années, permettant rapidement de confirmer l’attrait des étudiants pour la profession d'enseignant.

"Un professeur des écoles, c’est un décathlonien, estime Daniel Auverlot, recteur de l’académie de Créteil. Il doit enseigner le français, les mathématiques, les langues vivantes, l’EPS, etc. Donc le PPPE, grâce aux professeurs de classes préparatoires, ils acquièrent la culture générale nécessaire sur différents domaines et avec les professeurs de l’université, la spécialisation en sciences de l’éducation".

Le PPPE, un "dispositif populaire"

Alors qu’il faisait partie du groupe de création des PPPE, il confie aujourd’hui en tirer "un bilan très positif. Nous ne pensions pas que cela marcherait si bien !" Daniel Auverlot évoque ainsi "une formation qui a trouvé son public".

Pas moins de 25 PPPE, toutes académies confondues, ont ouvert leurs portes en 2021, 24 nouveaux se sont ajoutés à la rentrée 2022, regroupant au total environ 1.500 étudiants chaque année. "Avec huit ou neuf fois plus de lycéens l’indiquant dans leurs vœux sur Parcoursup", précise-t-on au ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse. "C’est un dispositif populaire".

Les abandons ou réorientations des étudiants en PPPE en cours d’année universitaire ont été nettement plus limités que ce qui est généralement constaté en licence. (IGESR)

Autre indicateur marquant l’intérêt pour le parcours : un rapport de l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche publié en juillet dernier note que "les abandons ou réorientations des étudiants en PPPE en cours d’année universitaire ont été nettement plus limités que ce qui est généralement constaté en licence". Malgré une formation très exigeante, avec un volume horaire conséquent. A Créteil, les étudiants de L2 suivent 24 heures de cours par semaine auxquelles s’ajoute la partie stage, sur une journée.

Des parcours à adosser à des licences relevant de disciplines enseignées à l'école

Du côté des syndicats, le premier bilan est plus mitigé. "Le constat que nous pouvons tirer, c’est qu’il y a une demande très forte du côté des étudiants, donc cela montre qu’il y a bien un besoin. Mais il est intéressant de noter que la demande est plus importante quand le PPPE est adossé à une licence Sciences de l’éducation que mathématiques ou sciences. Il y a eu une erreur d’appréciation du ministère", souligne Laurent Alexandre, secrétaire fédéral du SGEN-CFDT.

Le rapport de l’IGESR livre une série de préconisations pour améliorer le dispositif. Il constate également que "les licences supports des PPPE ne sont pas toutes aussi pertinentes", celles en Sciences de l’éducation ou celles relevant de disciplines enseignées à l’école devant être prioritaires.

Les licences supports des PPPE ne sont pas toutes aussi pertinentes. (IGESR)

Si le dispositif entend lutter contre la perte de polyvalence des professeurs des écoles, le rapport de l’IGESR note cependant que pour les étudiants issus de filières technologiques ou professionnelles, "les professeurs signalent des difficultés", essentiellement en mathématiques et en français, avec des niveaux globalement très hétérogènes, en fonction des options suivies au lycée.

La professionnalisation un atout des PPPE

Mais le PPPE ne se résume pas à la formation académique. Autre atout : des stages pratiques présents dès la première année de licence. "Ce qui nous a étonnés, c’est que pratiquement tous les étudiants ont opté, dès la licence 2, pour un contrat AED Préprofessionnalisation, qui leur permet de gagner leur vie, tout en leur proposant une expérience professionnelle extrêmement intéressante", ajoute le recteur de l’académie de Créteil.

Pour la deuxième année du PPPE, des ajustements ont déjà été réalisés, notamment pour l’articulation entre le lycée et l’université. "Pour tirer un bilan complet, il faudra attendre que la première cohorte aille au bout de la formation pour vérifier le niveau des étudiants à l’entrée en master MEEF ainsi que la réussite au concours", souligne Laurent Alexandre. Avec un défi pour la rentrée prochaine : organiser des stages à l’étranger pour les étudiants en L3.

On n’est pas là pour privilégier les classes préparatoires au détriment des parcours universitaires. (L. Alexandre, SGEN-CFDT)

Laurent Alexandre précise par ailleurs que son syndicat conserve les réserves émises dès l’annonce de la mise en place du PPPE "notamment sur l’entorse au principe d’universitarisation de la formation : sous couvert de vouloir revaloriser un dispositif, le concevoir comme une CPGE, ce n’est pas un schéma qui nous convient. On n’est pas là pour privilégier les classes préparatoires au détriment des parcours universitaires". Il estime qu’il aurait été plus pertinent de renforcer les formations déjà existantes.

Déployer davantage de PPPE en France ?

Selon le ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, le dispositif a vocation à être déployé plus largement dans les années qui viennent. L’académie de Créteil a ouvert deux autres PPPE à la rentrée 2022, au lycée Eugène-Delacroix de Maisons-Alfort et au lycée François 1er de Fontainebleau. Mais pour le moment, pas de nouvelles ouvertures prévues.

"Elles sont conditionnées aux crédits d’un PIA", explique Daniel Auverlot. Le rapport de l’IGESR préconise pour sa part de "différer à la rentrée 2024 l’ouverture de nouveaux PPPE et définir le nouvel appel à manifestation d’intérêt en fonction des besoins (académies et licences supports) selon la carte des licences supports déjà existantes et des candidatures sur Parcoursup."

Oriane Raffin | Publié le