À Grignon, le PSG veut jouer sur le terrain d’AgroParisTech

Céline Authemayou Publié le
À Grignon, le PSG veut jouer sur le terrain d’AgroParisTech
Proche de Versailles, le domaine de Grignon et son château ont accueilli dès 1826 l'"Institution royale agronomique", ancêtre d'AgroParisTech. // ©  AgroParisTech
Prévu pour 2020, le déménagement d’AgroParisTech sur le plateau de Saclay provoque des remous. L’un des sites de l’école d’ingénieurs, situé à Grignon, attire les convoitises du club de football le Paris Saint-Germain. Au grand dam de certains proches de l'établissement, réunis en collectif.

Le 23 mars 2015, le conseil d'administration d'AgroParisTech se prononçait en faveur du déménagement à Palaiseau (91). Un changement d'ère pour l'école d'ingénieurs qui, il y a plus de cinquante ans, se posait déjà la question d'une installation sur le plateau de Saclay.

L'enjeu est de taille : il s'agit pour l'établissement de regrouper, au sein d'une parcelle de 4,2 hectares l'ensemble de ses activités franciliennes, jusqu'alors essaimées en quatre sites. Est également concerné l'Inra (Institut national de la recherche agronomique), dont des équipes sont installées dans les locaux d'AgroParisTech. Au total, ce sont environ 2.000 étudiants, 250 doctorants et quelque 1.300 agents de l'école qui sont concernés par le projet.

Après une première phase de concertation, réalisée avec toutes les parties prenantes du dossier, dont les riverains des sites, l'établissement parisien étudie désormais plusieurs projets architecturaux pour n'en retenir qu'un seul d'ici à début 2017. L'objectif étant de réaliser en septembre 2020 la première rentrée à Saclay.

"Être le caillou dans la chaussure du PSG"

Voté à une très courte majorité en mars 2015 (22 voix pour, 20 voix contre et 2 abstentions), le déménagement crée un certain émoi, notamment sur le site de Grignon, dans les Yvelines, où l'école accueille, entre autres, ses élèves de première année et dispose d'une ferme expérimentale.

En cause, une annonce fracassante intervenue il y a quelques mois. Le Paris Saint-Germain serait intéressé par le site, pour y construire son nouveau centre d'entraînement. Le PSG est déjà venu visiter les lieux, et a fait savoir au maire de Thiverval-Grignon qu'il était prêt à se plier aux – nombreuses – exigences des lieux.

Avec ses bâtiments classés et placé en zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF), le domaine ne peut pas se prêter à toutes les folies immobilières. C'est l'argument retenu par le Collectif pour le futur du site de Grignon  (CFSG) pour défendre le site. Créé fin 2015 et composé de riverains, d'étudiants d'AgroParisTech, d'anciens salariés ou encore de responsables syndicaux, le CFSG organise marches, manifestations et pétition pour éviter que "ce fleuron de l'agronomie française ne soit bradé". Il a engagé mi-avril un avocat, Arnaud Gossement, pour poursuivre la lutte.

"Le PSG a dit qu'il s'installerait là où il serait le bienvenu et où il n'y aurait pas de recours fait à son encontre, résume Jean Vincent, président du CFSG. Notre avocat mènera toutes les actions qui sont en son pouvoir pour décourager le club de foot. Nous serons le caillou dans leurs chaussures..."

Un regroupement des sites devenu indispensable

Dans ce flot médiatique entretenu par la notoriété du PSG, et alors que des montants de mise en vente circulent déjà pour Grignon (entre 30 et 50 millions d'euros), le directeur de l'école d'ingénieurs, Gilles Trystram, répond de façon lapidaire : "Officiellement, le domaine n'est pas en vente." Si le directeur avoue avoir effectué une visite du site avec le PSG, il précise qu'il n'a pas eu d'autres contacts avec le club, le dossier étant géré par la préfecture de Région.

"J'ai fait connaître mes contraintes à ma tutelle, détaille Gilles Trystram. Elles sont assez claires : la vente des quatre sites concernés par le déménagement à Saclay ne peut avoir lieu tant que tout n'est pas conclu du côté de notre futur bâtiment (permis de construire, etc.). Concernant Grignon, je ne suis pas favorable à une vente par morceaux et j'insiste fortement sur le respect des contraintes du site."

Le directeur souhaite de plus conserver une parcelle d'exploitation ainsi que la ferme expérimentale. "L'attachement au site est absolument normal, mais les arguments en faveur du déménagement sont factuels : il devient essentiel de pouvoir réunir en un même lieu tous nos étudiants et de réduire ainsi les lourdeurs d'organisation."

Des ventes, pour financer les futurs travaux

Si les propos du directeur de l'école d'ingénieurs se veulent rassurants, les membres du collectif restent inquiets. "Quelle est l'influence du directeur sur des décisions qui se prennent au niveau de la tutelle, voire plus haut encore ?" questionne Jean Vincent.

Pour que la vente ait lieu, le ministère de l'Agriculture devra dévoluer la propriété des sites à l'école. Ainsi cette dernière pourra les vendre et bénéficier des fruits de la transaction pour financer les travaux du futur bâtiment. Cette dévolution, rendue possible par la loi LRU de 2007, souffre d'une contre-partie : la vente devra être validée par le conseil d'administration de l'école. À ce jour, aucune date n'est avancée concernant ce transfert de propriété.

Un temps attendue début avril, l'annonce du PSG quant au choix de l'implantation de son futur centre d'entraînement pourrait être connue fin avril. Le club, qui vient d'essuyer une élimination en Ligue des champions, attend une victoire pour communiquer. De quoi transformer les adhérents du CFSG en amateurs de football...

AgroParisTech, 4 sites concernés par le déménagement
Outre Grignon, trois autres sites franciliens d'AgroParisTech sont concernés par le projet de Saclay et voués à être vendus :
– site de la rue Claude-Bernard (Paris 5e),
– site de Massy (91),
– site de l'avenue du Maine (Paris 15e).
Céline Authemayou | Publié le