"Je suis Charlie" : les réactions des blogueurs EducPros

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Depuis mercredi 7 janvier 2015 et l'attentat contre "Charlie Hebdo", les blogueurs EducPros font part de leurs réactions. Avec une question prégnante : que peut faire l'École ?

- Jean-Michel Zakhartchouk : "Je suis Charlie, bien sûr! mais que faire à l’école?"

"[...] Lorsque les enseignants courageusement ont engagé la discussion sur les événements de mercredi et que certains d'entre eux se sont heurtés à des vents de fronde, de refus de minutes de silence et pire encore à des "ils l'ont bien cherché !", que cherchent-ils à faire ? Pas à empêcher des actes terroristes éventuels et à détourner du chemin des élèves tentés demain par les horribles sirènes de la Mort. Ils s'adressent surtout à une partie importante de notre jeunesse qui est fragile, qui ne passera jamais à des actes barbares, mais sera complaisante peut-être pour ceux-ci, se détachera de notre République si on n'y prend garde. Il est important de montrer qu'on croit en nos valeurs, qu'on ne fléchit pas, qu'on sait argumenter sans avoir recours à l'Autorité qui met fin à toute discussion.

Je salue la lettre de notre ministre qui va dans ce sens-là. Cela demande à la fois de la culture, y compris en l'occurrence une certaine culture religieuse et historique. D'autant qu'il faut aussi combattre sur un autre front : celui du racisme anti-arabe, celui du "front" justement. Savoir par exemple là que l'ignoble astuce de Le Pen père clamant "je ne suis pas Charlie, mais Charlie Martel" fait allusion à ce qui n'est qu'une légende non fondée historiquement (les Arabes arrêtés à Poitiers). De la culture donc, mais aussi et surtout des techniques pédagogiques pour s'outiller sur comment mener un débat, comment utiliser à bon escient l'écrit et l'oral, quel dispositif de prise de parole, etc. Il y a quelques années, j'avais travaillé avec des stagiaires sur des cas concrets d'élèves refusant Voltaire ou l'enseignement de la biologie darwinienne : comment faire, comment s'y prendre. Une façon autrement plus efficace de travailler autour de la laïcité que d'écouter de savantes conférences d'experts (comme cela a été le cas d'universités d'été sur cette thématique). [...]"

- Jean-François Fiorina : "Je suis Charlie : quand le temps de l’Action succède à celui de l’Émotion"

"[...] Si l’émotion et le recueillement ont envahi nos cœurs et nos villes, il faut continuer à bien les gérer dans nos écoles. Favoriser et faciliter l’expression de tous nos publics même si cela n’est pas facile. Nos écoles sont internationales, composées de sensibilités et de nationalités diverses dont les niveaux de maturité et de connaissance ne sont pas identiques.

Notre rôle en tant qu’éducateurs est d’expliquer pour donner à comprendre. La mondialisation ajoute un niveau de complexité supplémentaire mais peut-être est-ce là notre chance ? Celle de se parler à travers les cultures, de trouver les moyens du vivre et du travailler ensemble ? [...]"

- Romain Pierronnet : "L'université est Charlie"

"[...] Le monde universitaire est également très largement mobilisé pour revendiquer ces mêmes valeurs républicaines, avec la conviction qu'elles participent du vivre ensemble, de la tolérance par l'émancipation des individus, du développement de leur esprit critique, de son affirmation par l'exercice de la liberté d'expression [...]."

- Ghislain Bourdilleau : "ENS-SUP : notre rôle face à l'ignorance et la barbarie"

" [...] La recherche en France est une des plus brillantes au monde, notre force, c'est le savoir... dans un monde où la croyance aux sciences dures comme molles, humaines comme inhumaines s'atrophie. En pratique, que faire ?

Nous devons davantage ouvrir nos établissements, des conférences, des débats, des projections. Nous devons également y promouvoir toutes les cultures. Nous pouvons enfin donner un accès gratuit à un certain nombre de nos cours. Autant d'ouvertures qui existent déjà aujourd'hui.

Cependant, l'ouverture que nous pouvons être, doit se produire dans la société elle même. Nous devons propager les savoirs, les clés de compréhension de notre monde et ceci, à travers notre présence dans les médias, par la production directe de magazines de société, des sites internet qui engagent à la curiosité et la connaissance, par l'organisation d'événements hors les murs. Nous ne pouvons plus nous contenter de publier pour nous même, nous devons intégrer le monde, exister en lui et pour lui. Adaptons nous à la société plutôt que d'attendre qu'elle s'adapte à nous, elle sera bien mieux servie ainsi. Ce n'est plus une dispersion secondaire aujourd'hui, à côté de l'enseignement et de la recherche, c'est une mission, un engagement nécessaire. [...]"

- Didier Delignières : "7 janvier 2015"

" [...] Nous sommes aussi des enseignants, et nous avons de ce fait une responsabilité forte dans la formation des acteurs de la société de demain. Surtout lorsque nous formons des enseignants et des éducateurs, qui seront eux-mêmes en charge de la jeunesse. Au-delà des savoirs scientifiques et des compétences professionnelles, derrière lesquelles il est souvent confortable de se réfugier, l'université doit être porteuse de valeurs. On se pose beaucoup ces jours-ci la question de l'éducation à la citoyenneté dans les établissements scolaires. L'université n'est pas exonérée de cette responsabilité. D'aucuns pourrait considérer cette perspective comme une perte de temps, ou estimer qu'ils ne sont pas formés pour cela. La pédagogie universitaire est sans doute à réformer, et la formation citoyenne ne doit pas être occultée dans ce processus."

- Doctrix est Charlie

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