Santé : l’université d’Angers révolutionne la première année

Virginie Bertereau Publié le
Santé : l’université d’Angers révolutionne la première année
La faculté de médecine d'Angers, à l'initiative du parcours PluriPASS // ©  Virginie Bertereau
Finie la Paces, voici PluriPass. Dans le cadre des expérimentations menées par dix universités sur la première année des études de santé, Angers est la seule à remplacer totalement le cursus précédent à partir de la rentrée 2015. Revue de détail de ce parcours novateur mais gourmand en moyens. 

"Remplacer la sélection par l'échec par un parcours de réussite": telle est la volonté de l'université d'Angers avec le lancement de PluriPASS (Parcours Angers Sciences de la Santé) à la rentrée 2015. Seulement quatre ans après la mise en place de la Paces (première année commune aux études de santé), l'établissement a décidé de mettre fin à cette année couperet. "Avec la réforme de la Paces, nous sommes passés d'un système de 700 étudiants dans un amphi à un système de 700 étudiants dans un amphi. Cela n'a pas changé grand-chose en matière d'orientation", résume Jean-Paul Saint-André, le président de l'université. L'établissement a profité de la loi sur l'Enseignement supérieur et la recherche du 22 juillet 2013 pour changer la donne.

De l'orientation plus que de la réorientation

Ainsi, à la rentrée 2015, le parcours de deux ans PluriPASS devient la voie d'accès aux filières maïeutique, médecine, odontologie, pharmacie et kinésithérapie à Angers. Principal changement : à la différence de la Paces, PluriPASS permet aux étudiants de valider des semestres et donc de ne pas redoubler, voire repartir à zéro, s'ils ne parviennent pas à entrer en filière santé. L'idée est donc de faire plus d'orientation que de réorientation. Ils pourront poursuivre directement en 3e année dans l'une des 15 licences de la fac d'Angers ou du Mans (physique-chimie, biologie, informatique, maths, psychologie, droit, économie, etc.) ou tenter d'intégrer une école d'ingénieurs partenaire (ISTIA, ENSIM, Centrale Nantes, mines de Nantes...).

DEs  Moyens COnséquents

En première année, le programme, pluridisciplinaire, se compose ainsi de trois grands champs : les sciences du vivant, les sciences pour l'ingénieur (maths, physique, chimie...), les sciences humaines et sociales (droit, psychologie...), avec aussi l'anglais, la culture numérique et des UE (unités d'enseignement) optionnelles. En prime, il comprend un module "projet personnel et professionnel de l'étudiant".

Une (r)évolution également pédagogique : PluriPASS va réduire les cours magistraux et donner une part plus importante aux enseignements dirigés en petits groupes, aux ressources numériques à travailler chez soi, mais également au tutorat. Pour mettre l'expérimentation en œuvre, l'université compte créer 8 postes d'enseignants et d'enseignants-chercheurs et 3 postes d'ingénieurs pédagogiques. L'établissement s'appuie sur les moyens accordés par les collectivités locales (notamment 400.000 € de la région des Pays de la Loire) et les 35 postes accordés par le ministère. "Historiquement sous-dotée, l'université a absolument besoin du maintien de ces créations de postes chaque année pour poursuivre l'expérimentation", glisse Jean-Paul Saint-André. Des moyens conséquents qui expliquent qu'Angers soit la seule université à avoir choisi de supprimer la Paces.

Le lancement officiel de PluriPASS à l'université d'Angers

Le lancement du parcours Pluripass le 14 novembre 2014

La fin des concours couperets

À l'issue de la première année, les étudiants seront classés sur la base de leurs notes obtenues en contrôle continu et, si besoin, d'oraux complémentaires. Une façon de limiter le bachotage et d'évaluer davantage sur le savoir-faire et le savoir-être des candidats. 75 % des places disponibles dans les filières santé – le numerus clausus, lui, ne disparaît pas – seront alors attribuées. Les 25 % de places restantes seront proposées en fin de 3e semestre. Une seconde chance pour les étudiants. Au final, ceux qui ne seront pas admis en santé bénéficieront d'un 4e semestre de remise à niveau pour poursuivre dans une autre filière, jusqu'au bac +5 s'ils le souhaitent.

UNE Diversification des profils compliquée

L'autre objectif de l'expérimentation est de "permettre à un public plus large de rejoindre les études de santé". Et c'est là que le bât blesse... "Il n'y aura pas de diversification des profils. Dans le cadre de l'orientation active, l'université recommande fortement aux candidats d'être titulaires d'un bac S avec mention assez bien ou mieux ou d'un autre bac général avec mention bien ou mieux", relève Dominique Perrotin, président de la Conférence des doyens des facultés de médecine, qui salue néanmoins l'ambition de l'université angevine.

Autre souci souligné par Dominique Perrotin, également doyen de la faculté de médecine de Tours : "Tout le monde va vouloir s'inscrire en PluriPASS à Angers". L'UA compte donner la priorité aux néo-bacheliers de l'académie de Nantes et plus précisément des trois départements Maine-et-Loire, Mayenne et Sarthe ou d'un établissement français à l'étranger. Isabelle Richard, doyen de la faculté de médecine : "cet afflux d'inscriptions ne se produira probablement pas dès la rentrée 2015. Et avoir trop de succès est un faux problème !" Éléments de réponse dès l'ouverture d'APB fin janvier 2015.

Paces : près d'un tiers des facultés de médecine expérimentent des modèles alternatifs

Comme l'UA, neuf autres universités vont proposer entre les rentrées 2014 et 2015 des alternatives à la Paces : Auvergne, Paris 5, Paris 7, Paris 13, Poitiers, Rouen, Saint-Étienne, Tours et Strasbourg. Leurs objectifs sont identiques : améliorer les conditions de réorientation des étudiants après un échec aux concours et diversifier le profil des futurs professionnels de santé en créant de nouveaux modes d'entrée en deuxième ou troisième année d'études. Souvent donné en exemple par le gouvernement, le projet de l'université d'Angers reste unique. Les autres établissements ne suppriment pas la Paces.
Virginie Bertereau | Publié le