Laurent Wauquiez et l’enseignement supérieur : ce qu'il en a dit

Sophie Blitman Publié le
Laurent Wauquiez et l’enseignement supérieur : ce qu'il en a dit
Laurent Wuquiez // © 
Quelles sont les déclarations faites par Laurent Wauquiez sur le supérieur avant son arrivée rue Descartes ? Formations trop théoriques, plaidoyer en faveur de l'alternance, soutien aux classes moyennes pour l'accès aux bourses d'études... Alors qu’il lui revient désormais de préparer le budget 2012 des universités et que d’importants chantiers engagés par Valérie Pécresse (Investissements d’avenir, opération Campus, plan Réussite en licence…) demandent à être poursuivis sans délai, reste à voir ce que le nouveau ministre parviendra à mettre en œuvre d’ici à l’élection présidentielle de mai 2012.

30 juin 2011, ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche : lors de la passation de pouvoir découlant du remaniement, Laurent Wauquiez a affirmé s’inscrire « dans la continuité » et vouloir « intensifier l’élan » impulsé par Valérie Pécresse. En particulier, le nouveau – et jeune – ministre de l’Enseignement et de la Recherche a annoncé une « accélération » sur la question du logement.
Au-delà de cette première et brève prise de parole, petit tour d’horizon des déclarations que Laurent Wauquiez a pu faire dans le domaine de l’enseignement supérieur.

Critique sévère des formations trop théoriques


« Je déconseille toutes les formations purement théoriques »

Confiant qu’à 7 ans, il souhaitait être aviateur, Laurent Wauquiez, alors secrétaire d’Etat chargé de l’Emploi, déclarait sur RTL le 16 août 2010  : « Je déconseille toutes les formations purement théoriques, dans lesquelles il n'y a aucun stage pratique, long, de 4 à 6 mois, des vrais stages, pas du stage pipeau café ou photocopieuse. »
Au contraire, il faut, selon lui, « essayer de s’orienter sur des fonctions type des cadres de maintenance ou ingénieurs (…) qui sont des métiers où l’on sait qu’il y a de très forts besoins de recrutement ». Et de préciser : « Je décommande le métier de journaliste. »
Interrogé sur la réforme majeure à mener en matière d’emploi, Laurent Wauquiez affirme : « On voit très bien que les jeunes qui ont des difficultés à trouver un job, c’est des jeunes qui ont fait des formations trop théoriques. »

Cette condamnation des formations théoriques, c’est un peu le cheval de bataille de Laurent Wauquiez qui l’exprime régulièrement sous des formes différentes, parfois assez directes…
En 2007, lors de la campagne présidentielle, il déclarait à des étudiants de l’UNI  : « Pour réussir une insertion professionnelle, ce qu’il faut, c’est éviter de laisser un étudiant pendant cinq, six ans sur des études complètement théoriques qui sont on the moon et au moment où il va devoir atterrir sur le marché de l’emploi, tout le monde va lui dire : “Vous êtes gentil, mais votre recherche sur l’herméneutique de l’apocalypse, ça nous intéresse moyennement.” »

« Vous êtes gentil, mais votre recherche sur l’herméneutique de l’apocalypse, ça nous intéresse moyennement »

Même critique en février 2010, dans une interview donnée au Bondy Blog  : « On a constaté qu’en France un jeune diplômé met six ans, en moyenne, à décrocher son premier poste stable. En Allemagne, c’est deux fois moins. Ma conviction, c’est qu’en France, on fait des études trop théoriques. Si dans vos études, il n’y a pas de points de contact avec l’entreprise, c’est un peu la machine à pistons qui joue après. » Et d’insister : « En France, on pense que les seules "études belles", c’est quand on ne met pas les mains dans le cambouis. Or, l’objectif des études c’est bien de trouver un job. »

Pour Laurent Wauquiez, les entreprises ont également leur part de responsabilité dans les difficultés d’insertion des jeunes : « Concernant les jeunes diplômés, il faut obliger les grandes entreprises à bouger. En France, il y a le culte du CV, qui génère plein de discriminations. Nous nous sommes enfermés dans des pratiques RH qui font que l’on recrute des CV “papier idéal” et non pas des gens. »

Promouvoir l’alternance

« La réforme majeure, c’est celle sur l’emploi des jeunes »

Contrepoint de ces formations jugées trop théoriques, l’alternance a reçu toutes les faveurs de l’ancien secrétaire d’Etat chargé de l’Emploi. « Je crois beaucoup à l’alternance, pour moi, la réforme majeure, c’est celle sur l’emploi des jeunes, de booster l’alternance », expliquait Laurent Wauquiez en août 2010 sur RTL .

Pour développer ce système, « il est essentiel que les services d’orientation recommandent davantage l’alternance, une voie qui permet de payer ses études, un vrai outil d’intégration et d’ascension sociale, qui permet d’aller jusqu’au niveau bac + 5 ! », déclarait-il à Educpros le 20 mai 2010 . Côté entreprise, « il faut mettre en avant l’acquisition d’une formation et d’une première expérience professionnelle à vendre aux recruteurs ».
Objectif affiché par Laurent Wauquiez : former un jeune sur cinq en alternance d’ici à 2015.

Aider les étudiants des classes moyennes

Auteur d’un rapport en 2006 sur les conditions sociales des étudiants , Laurent Wauquiez est chargé, lors de la campagne présidentielle l’année suivante, d’apporter « la touche nouvelle génération », comme il le dit lui-même, et de travailler sur les thématiques étudiantes et la génération des 18-30 ans.
Répondant le 23 février 2007 aux questions des étudiants de l’UNI , il dressait alors les priorités auxquelles les étudiants étaient selon lui confrontés : « On va essayer de mettre en place un système de prêts cautionnés qui vous permettra de monter votre projet. » De fait, Valérie Pécresse a mis en place un prêt sans condition de ressources ni de caution .

« Il faut déplafonner, notamment des bourses de mérite mention très bien »

Sur les conditions de vie, « les étudiants qui aujourd’hui doivent être aidés, c’est ceux qui appartiennent aux classes moyennes », affirmait-il, toujours face aux étudiants de l’UNI . Pour cela, Laurent Wauquiez leur listait une série de propositions du candidat Sarkozy, en particulier liées au système de bourses. Il faut, expliquait-il, « décaler les bourses pour permettre d’aider mieux les classes moyennes qui sont aujourd’hui oubliées » et « déplafonner, notamment des bourses de mérite mention très bien : il n’y a pas de raison, ce n’est pas parce que vos parents gagnent, en revenus additionnés, 2.000 € que, si vous passez votre bac avec une mention très bien, vous n’avez pas le droit à la reconnaissance de la République ».

En 2008, Valérie Pécresse a élargi la tranche « zéro » des bourses sur critères sociaux et, par ricochet, étendu la population pouvant prétendre à une bourse au mérite, puisque les critères d’accès sont les mêmes. Ce qui ne correspond cependant pas spécifiquement à un « déplafonnement » des bourses au mérite. Quant à la prime au mérite créée dans le cadre du plan licence pour les étudiants titulaires d’une mention très bien au baccalauréat, elle ne concerne que ceux dont les parents ne sont pas imposables.
En 2007 également, Laurent Wauquiez proposait de « ne plus avoir des aides qui s’arrêtent systématiquement sous votre nez parce que votre famille gagne 100 ou 150 € de trop ». Cela signifie-t-il que le nouveau ministre souhaite supprimer les seuils qui régissent l’attribution d’aides pour instituer un système totalement progressif ?

Parmi les autres propositions mises en avant pendant la campagne présidentielle : la création d’internats de la réussite et celle d’un « chèque santé » pour les étudiants à partir de 18 ans pour leur permettre de mieux prendre en compte leur santé et que celle-ci « ne soit pas la dernière roue du carrosse dans le budget d’un étudiant ». Une proposition qui reste encore à concrétiser.

Laurent Wauquiez, un étudiant « normal » ?

Laurent Wauquiez racontait en 2010 sur RTL que, lorsqu’il était étudiant, il avait des jobs rémunérés et d’autres non rémunérés : il était ainsi membre d’une association qui donnait des cours « pour des enfants qui avaient du mal à apprendre à lire, écrire et compter » et faisait des « jobs saisonniers, comme tout le monde », précise-t-il, notamment « dans un centre touristique où je me faisais de l’argent pendant l’été ».
Un parcours présenté comme classique, qui omet cependant de rappeler que, fonctionnaire-stagiaire, le jeune normalien a été rémunéré pendant quatre ans.
« Reçu premier à l’agrégation d’histoire, je suis entré à l’ENA [École nationale d’administration], dont je suis sorti major en 2001 », souligne-t-il sur son site , lui qui a affirmé en 2008 à L’Express avoir « toujours été choqué d'entendre de vieux fonctionnaires se vanter d'avoir été reçu à telle ou telle place ».

Le RSA et les « dérives de l’assistanat »

Alors ministre des Affaires européennes, Laurent Wauquiez avait soulevé la polémique le 8 mai 2011 en dénonçant, lors de l’émission BFM TV 2012-Le Point-RMC , les « dérives de l’assistanat » qualifiées de « cancer de la société française ».
Le fondateur du club de réflexion Droite sociale proposait de « plafonner le cumul de tous les minima sociaux à 75 % du SMIC, pas plus ». Et d’argumenter : « Aujourd’hui, un couple qui est au RSA, en cumulant les différents systèmes de minima sociaux, peut gagner plus qu'un couple dans lequel il y a une personne qui travaille au SMIC. Ça c’est la société française qui tourne à l’envers. » Quant aux étrangers, ils devraient selon lui avoir travaillé au minimum cinq ans en France avant de pouvoir accéder au système de protection sociale.
Enfin, défendant l’idée d’un équilibre entre « droits » et « devoirs », Laurent Wauquiez a exprimé sa volonté de voir les bénéficiaires du RSA « [assumer] chaque semaine cinq heures de service social ». 

Sophie Blitman | Publié le