Loi Travail. Manuel Valls prolonge les bourses des jeunes diplômés sans emploi

Camille Stromboni, Sarah Hamdi Publié le
Loi Travail. Manuel Valls prolonge les bourses des jeunes diplômés sans emploi
Si Manuel Valls a présenté aux syndicats étudiants et lycéens des mesures en direction des jeunes, il n'est pas question pour autant de retirer le projet de loi Travail. // ©  Hamilton / REA
Après un mois de mobilisation contre le projet de loi Travail, Manuel Valls a détaillé, le 11 avril 2016, un bouquet de mesures scellant "l’acte 3 de la Priorité Jeunesse". Parmi elles : la prolongation des bourses, quatre mois après l'obtention du diplôme. Même s'ils saluent ce soutien financier, plusieurs universitaires estiment qu'il faut aller plus loin.

Après plus d'un mois de contestation et six manifestations lycéennes et étudiantes contre la loi Travail, Manuel Valls a annoncé, le 11 avril 2016, une enveloppe de 400 à 500 millions d’euros afin de financer onze mesures pour la jeunesse. Il a reçu huit organisations, dont l'Unef, l'UNL et la Fidl, aux côtés de Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'Éducation nationale, Myriam El Khomri, ministre du Travail, et Patrick Kanner, ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports.

"Avec ce plan, le gouvernement mobilise des moyens exceptionnels," a déclaré le Premier ministre. Non pas pour enrayer le mouvement contre le projet de réforme,"mais pour être à la hauteur des demandes de la jeunesse". En revanche, pas question de retirer la loi Travail, a-t-il prévenu.

Quatre mois de bourses pour trouver son premier emploi

Parmi le bouquet de propositions, une mesure phare pour l'insertion professionnelle des diplômés, dès la rentrée 2016 : la prolongation des bourses, quatre mois après la fin des études. Cette aide, appelée "Arpe" – pour Aide à la recherche du premier emploi –, sera destinée aux diplômés d'origine modeste (les boursiers de toutes filières confondues) entrant sur le marché du travail en situation d'inactivité. Au total, 126.000 jeunes seraient concernés.

Pour les diplômés de l'enseignement supérieur (BTS, DUT, licence, licence professionnelle, master et diplôme d'ingénieur), le montant de l'Arpe devrait être équivalent à celui de la bourse sur critères sociaux perçue au cours de la dernière année du cursus avant l'obtention du diplôme (de 100 à 550 euros par mois). Pour les jeunes diplômés de CAP et de bac professionnel, le montant de l’Arpe sera de 200 euros par mois. Coût total estimé pour cette mesure : 130 millions d'euros par an.

Un cap important de franchi, pour l'Unef

"Les jeunes ont réussi à obtenir des mesures fortes, je crois qu'aujourd’hui nous avons franchi un cap important", souligne William Martinet. Le président de l’Unef, chef de file de la mobilisation contre la loi El Khomri, maintient néanmoins l'appel au rassemblement prévu le 28 avril. "Nous restons solidaires de l'intersyndicale. Mais les formes de mobilisations changeront notamment en raison des partiels et des vacances scolaires," explique-t-il.

"Cette aide à la recherche du premier emploi est une vraie avancée, ajoute-t-il. Elle répond à une discrimination : les jeunes n’ont ni RSA, ni allocation-chômage."

Attention au budget 2016 des universités

Pour la Fage, qui salue également ces mesures positives, cette prolongation des bourses vers le premier emploi comporte un autre volet fondamental, promis par Manuel Valls : "l’accompagnement personnalisé des jeunes diplômés vers le premier emploi, qui va être expérimenté, notamment avec l’Apec".

Avec une inquiétude cependant. "Cet acte 3 de la Priorité Jeunesse n’est cohérent que si le gouvernement effectue un investissement sur le vrai levier de l’accompagnement des jeunes vers le premier emploi : le service public de l’enseignement supérieur ! Ce qui signifie augmenter le budget des universités. Sinon, ce filet de sécurité ne pourra être réellement efficace".

Accompagner plus fortement les jeunes diplômés vers l'emploi

Du côté des universitaires, les réactions semblent favorables. "Toute mesure d’aide aux étudiants est la bienvenue, réagit Alain Beretz, président de l’université de Strasbourg. Mais il ne faut pas seulement se préoccuper du soutien financier, l’aide à l’insertion professionnelle est, elle aussi, importante. C’est le rôle de l’université, et l'augmentation de nos moyens pour cela, en parallèle, serait évidemment utile".

Pour la présidente de l’université Montpellier 3, Anne Fraïsse, si cette mesure est une "bonne chose", "on se demande quelle sera son efficacité. Cela me laisse un peu perplexe", reconnaît-elle.

Une expérimentation des facs pour accompagner ces jeunes diplômés ?

Le président de la Courroie (Conférence universitaire des responsables de l’orientation et de l’insertion professionnelle), Jean-Claude Piat, préconise, lui, de s'appuyer aussi sur deux autres leviers. Tout d'abord en renforçant la place des modules d'insertion professionnelle dans la formation des étudiants, afin de développer leur participation à ces heures d'accompagnement.

Ensuite, le professeur agrégé en génie mécanique à l'université Paris 13 soumet l'idée d'associer les universités à cet accompagnement des jeunes diplômés. "Nos services ont un rôle à jouer, souligne-t-il. Pourquoi ne pas lancer un appel à projets pour des expérimentations dans le suivi et l'encadrement de ces jeunes dans la recherche d'emploi après le diplôme, par territoire mais aussi par secteur professionnel ?"

Logement, santé, lycée… Le gouvernement veut toucher "toute la jeunesse"
Parmi les mesures proposées par Manuel Valls le 11 avril, les bourses lycéennes devraient également être augmentées de 10% dès la rentrée 2016. Soit 63 euros supplémentaires par an. Une première en France depuis 24 ans.

Autres annonces : la création de 2.000 places supplémentaires en BTS chaque année pendant cinq ans, la mise en place des quotas de bacheliers technologiques en IUT et une meilleure rémunération des apprentis âgés de 16 ans à 20 ans. 

Avec la mise en place d'un droit universel à la garantie locative pour les moins de 30 ans, le gouvernement souhaite faciliter l'accès au logement et protéger les propriétaires des loyers impayés. Côté santé, le gouvernement souhaite accélérer l'accès à la CMU-C (Couverture maladie universelle complémentaire) des moins de 25 ans disposant de faibles ressources et ne vivant plus avec leurs parents.

Le gouvernement a également promis d'amender le projet de réforme de la loi Travail afin de rendre obligatoire la surtaxation des CDD et ainsi inciter les employeurs à privilégier les CDI. Actuellement, les contrats à durée déterminée représentent 87% des embauches.

À lire sur letudiant.fr : Loi Travail : Apprentis, bourses, santé... 500 millions d'euros pour calmer la jeunesse

Camille Stromboni, Sarah Hamdi | Publié le