Les élèves ingénieurs veulent faire de la R&D... et les étudiants en école de commerce ne veulent pas vendre. Le baromètre montre un décalage entre les aspirations des futurs diplômés et la réalité de l’emploi. 39 % des élèves en écoles d’ingénieurs veulent travailler dans la R&D. Dans les faits,seuls 27 % sont recrutés dans ce secteur. Les autres se répartissent dans la production (aussi très appréciée) et dans l’informatique et le conseil, beaucoup moins demandés. Les élèves en école de commerce sont, eux, attirés à parts égales par la gestion-comptabilité-finance et le marketing. Or cette famille de métiers a des postes à offrir sans pour autant satisfaire tout le monde. Le marketing propose beaucoup moins de postes que ne l’espèrent les étudiants. Et c’est le secteur du commerce et de la vente, cité par seulement 7% des étudiants, qui finalement embauche 15 % d’entre eux.
Des métiers de rêve... Ce constat ne surprend pas Bruno Carrias. « Les jeunes méconnaissent les besoins des entreprises, mais, surtout, ils n’ont pas une bonne perception de ce que recouvrent les métiers auxquels ils aspirent, précise-t-il. De même que les petits garçons veulent devenir policiers et les petites filles infirmières... Les schémas se reproduisent dans les grandes écoles. Le marketing est un métier noble aux yeux des étudiantes, alors que la vente, très peu prisée, offre d’énormes opportunités de carrière. Les chercheurs sont placés sur un piédestal, mais tous ne décrochent pas le Nobel ! J’espère juste que les élèves de dernière année sont mieux informés que ceux de première ou deuxième année, car les entreprises sont quand même très présentes tout au long du cursus, surtout dans les grandes écoles, beaucoup moins dans les universités. Il est important de ne pas créer de frustrations chez les candidats à l’emploi. »
...dans des entreprises qui ne font pas rêver. Cette vision erronée des métiers (ou des secteurs) auxquels les jeunes diplômés se destinent constitue le premier facteur de choix dans une recherche d’emploi. « Seuls 8 % des étudiants orientent en priorité leur recherche vers une entreprise spécifique », mentionne l’IPSOS. Les enquêteurs pointent alors un autre décalage : celui entre le message des entreprises essentiellement axé sur une communication corporate et les souhaits des candidats qui attendent une description précise des métiers. « Je suis d’accord avec le constat, mais pas avec la conclusion, relève Bruno Carrias. Le rôle d’une entreprise est bien de Les principales aspirations confrontées aux communiquer sur réalités des recrutements (en % des réponses) son image car elle apporte des éléments de différenciation au candidat pour emporter sa décision finale. »
Quels arguments pour séduire ? «Parallèlement – et très en amont – une communication sur les métiers est indispensable, poursuit-il, mais elle ne saurait être l’œuvre d’une seule entreprise. C’est à plusieurs, avec l’appui des syndicats ou fédérations, qu’il faut, au sein d’un même secteur d’activité, communiquer sur les métiers. Les entreprises attireraient ainsi un maximum de candidats pour se partager une plus large part de gâteau à l’heure de recruter. Ce travail devrait être réalisé dans les collèges et lycées, avec des professionnels proches des adolescents, ayant de deux à quatre ans d’expérience, qui viendraient raconter leur quotidien. Alors que dans le primaire, les enfants participent à des dispositifs ludiques tels que la « Main à la pâte » animés par des chercheurs, dans le secondaire, c’est fini. Pour choisir leur avenir, les lycéens lisent des fiches-métiers ! Une fois intéressés par une profession, les jeunes pourraient alors se tourner vers telle ou telle entreprise sur la base de sa communication en matière de recrutement. Il importe alors, qu’à ce moment, les entreprises puissent valoriser leur performance – plus que leur notoriété – et la dimension humaine de leur management. »
(1) Ce baromètre est réalisé auprès d’un panel d’étudiants en écoles de commerce, d’ingénieurs et à l’université. Le dernier date du 16 janvier 2007.
(2) Elle regroupe quatre syndicats professionnels : les études et le conseil (dont le recrutement), l’ingénierie, les services informatiques, la formation professionnelle. Elle représente 1 250 sociétés.