Pierre Aliphat (CGE) : “Le terme de master est protégé, quelle que soit sa phonétique”

Propos recueillis par Céline Manceau. Publié le
Confrontée à une recrudescence de détournement des termes “master” et “mastère spécialisé”, la CGE (Conférence des grandes écoles) passe à l’offensive. Son délégué général, Pierre Aliphat, rappelle les règles à respecter et précise les moyens qui vont être mis en œuvre pour faire le ménage.

Pierre AliphatLa CGE publiait, en avril 2012, un communiqué dénonçant l'usurpation des mots "master" et "mastère spécialisé". Depuis, la situation ne semble guère avoir évolué...

Le nombre d'établissements qui ne respectent pas la règle du jeu est considérable. Et cela commence déjà au sein des écoles membres de la Conférence des grandes écoles. Certaines assurent délivrer des MS (mastères spécialisés) sans avoir sollicité notre habilitation. Jusqu'à présent, nous n'avions pas les moyens d'établir une veille, mais nous allons recruter une personne pour traquer toutes les écoles contrevenantes.

Quels sont exactement les termes protégés ?

L'État protège le diplôme et le grade de master, à la fois de manière orthographique et phonétique. Plus clairement, une école ne peut pas délivrer, sans habilitation du ministère, un diplôme ou grade de master ou mastère ou mastaire, etc. De notre côté, nous avons déposé auprès de l'INPI [Institut national de la propriété industrielle] : mastère spécialisé (MS et MSc), master en sciences et master of science. Là encore, quelle que soit la phonétique du mot "mastère".

En revanche, il est impossible de protéger un ensemble de mots, tels que "programme de mastère" ou "cycle master". À notre niveau en tout cas. L'État en aurait peut-être la possibilité. Sur ce point, je pense que l'on va toutefois alerter la DGCCRF [Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes], car il pourrait bien s'agir de contrefaçon.

Le nombre d'établissements qui ne respectent pas la règle du jeu est considérable.


De quels moyens d'action disposez-vous pour contraindre les écoles à respecter la règle du jeu ?

Quand nous estimons que l'utilisation du terme "master" est usurpée en tant que grade ou diplôme, nous prenons contact avec le ministère, qui intervient ensuite au niveau des rectorats pour un rappel à l'ordre. Quand il s'agit d'un terme déposé par la CGE, nous intervenons directement auprès de l'établissement concerné. Le premier recours passe par l'envoi d'une lettre recommandée demandant une mise en conformité. Si l'établissement ne réagit pas, nous envoyons une seconde lettre par l'intermédiaire de notre avocat. En général, c'est suffisant. Mais des poursuites peuvent toujours s'engager. Pour une école membre de la CGE, l'exclusion est une des sanctions possibles. Au-delà de la répression, nous avons aussi un travail de communication essentiel. Le détournement de la terminologie "master" est préjudiciable aux familles et aux étudiants, et c'est inadmissible.

Certains établissements jouent parfois sur l'ambiguïté d'appartenir à un réseau pour s'enorgueillir de labels qu'ils n'ont pas obtenus pour leurs formations...

Ces dernières années, les regroupements d'établissements ont entraîné de grandes modifications dans le paysage des écoles, si bien que nos statuts, qui ne datent que de 2008, sont à réviser. Aujourd'hui, un PRES [Pôle de recherche et d'enseignement supérieur] ou un institut polytechnique, ne peut pas être habilité à délivrer un MS. Ce label est accordé exclusivement à une école. Faut-il changer la donne ? Que faire également quand plusieurs écoles fusionnent ? Est-ce que le nouvel établissement ainsi formé devient automatiquement membre de la CGE ? D'ici à fin 2013, nous allons proposer des solutions.

Propos recueillis par Céline Manceau. | Publié le