Pierre Singaravelou (président de l'université Bordeaux 3 et du PRES) : «Nous devons laisser de côté nos ego»

Propos recueillis par Colette Goinere Publié le
Pierre Singaravelou (président de l'université Bordeaux 3 et du PRES) : «Nous devons laisser de côté nos ego»
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Confirmé dans ses fonctions de président de l'université Bordeaux 3 en mars 2008, Pierre Singaravelou est aussi président du PRES (pôle de recherche et d'enseignement supérieur) de Bordeaux. Il revient pour Educpros sur l’opération campus qui a sélectionné ce PRES et sur sa stratégie pour rapprocher les universités bordelaises. Dans cette perspective, ce professeur de géographie humaine explique comment il a conduit dans son établissement la réforme en faisant passer les UFR de 11 à 3. 

Dans l’appel à projet « Opération campus » Bordeaux est l’un des six projets à avoir été retenu...

Je crois que nous avons même été classés en tête des six premiers projets retenus par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. C’est une preuve que notre projet de dix pages tenait vraiment la route. Nous avons bénéficié du soutien sans faille des collectivités, ce qui n’est pas fréquent.  

Quel va être le projet de réhabilitation qui sera mené ?

Nous avons chiffré les besoins à 538 millions d’euros au minimum. Cela  permettrait de rénover en priorité les bâtiments de Bordeaux 1 et 2 qui sont vraiment vétustes. Mais au-delà des mètres carrés, notre ambition est de développer une offre de formation et de recherche en valorisant trois grands pôles : sur les sciences et technologies, sur la biologie-santé et sur les sciences humaines et sociales. En janvier 2009, un institut polytechnique de Bordeaux va être créé et regroupera les écoles d’ingénieurs du campus. Nous devons laisser de côté nos ego, travailler ensemble et éviter les doublons. En relation avec ces trois pôles, nous évoluons vers une nouvelle organisation des formations associant un niveau « Licence /DUT » à un ensemble de 7 graduate schools regroupant les masters, formations d’ingénieurs et doctorats.

Les PRES créés en mars 2007 se concrétisent peu à peu. Comment se dessine celui de Bordeaux ?

Dès le départ, nous avons voulu construire un PRES généraliste, avec toutes les disciplines. Nous voulons développer ensemble ce potentiel. Nous disposons sur un même site de 62 000 étudiants et d’une dizaine de milliers de professeurs et personnels administratifs. Les efforts de rapprochement se sont faits très tôt, dès 2000. Il y a eu une convergence de vue exceptionnelle, ce qui n’était pas le cas dix ans plus tôt. Tous les lundis soirs, les quatre présidents d’universités et les directeurs d’écoles se sont réunis pour aborder tous les sujets, sans tabous.

Ce que vous vivez là est une première étape avant la fusion des universités  bordelaises ?

Oui, c’est une première étape. Le PRES constitue un palier. C’est une période pendant laquelle nous mettons en place des services communs (documentation, relations internationales, service communication) et nous étoffons notre équipe de direction. Pour éviter de mettre en place un super-président, nous avons opté pour une présidence tournante annuelle. Pour la suite, plusieurs scénarii sont envisagés : fusion à terme d’ici trois ou quatre ans, à condition de bien la  préparer, maintien du statut quo avec redistribution des responsabilités, nomination d’un président permanent aux côtés des quatre autres. Nous essayons d’éviter cette dernière solution. La priorité pour les six mois à venir est de continuer à travailler ensemble.  

Dans votre propre université vous avez engagé un chantier pour rationaliser le nombre d'UFR. Comment s'est-il passé ?

L’ université Bordeaux 3 compte 16 500 étudiants et 11 UFR. C'est beaucoup trop. En prévision de la fusion, j’ai voulu rationaliser. Cela n’a pas été facile : certains ont peur de perdre leur identité disciplinaire, certains ont tout simplement peur du changement, d’un nouveau chef auquel ils seront confrontés… Même si elle peut être douloureuse, j’étais décidé à conduire cette réforme jusqu’au bout en y mettant toute ma conviction et en la préparant pendant 18 mois. C’est une aventure délicate, mais c’est aussi une façon de préparer l’université bordelaise de demain. J’ai engagé deux audits, l’un externe, l’autre interne. Chacun a pu les consulter et a reçu le projet de réforme. En septembre 2007, j’ai fait voter par le conseil d’administration le passage de onze à trois UFR. Si tout se passe bien, cette réforme sera appliquée début 2009.   

Propos recueillis par Colette Goinere | Publié le