A Sciences po, une formation continue pour les syndicalistes

Sophie Blitman Publié le
Depuis janvier 2010, Sciences po accueille des étudiants d’un genre un peu particulier : des responsables syndicaux d’entreprises ou de collectivités publiques. L’objectif de cette formation continue, qui aboutit à une certification, est de faire reconnaître les compétences des syndicalistes, afin que cet engagement ne soit pas un frein à leur évolution de carrière.

Des syndicalistes sur les bancs de Sciences po Paris ? Au départ, l’idée a pu faire jaser. Pourtant, au-delà de l’aspect médiatique, cette initiative pourrait transformer en profondeur les relations en entreprise, d’une part en "dédiabolisant" le syndicalisme et, d’autre part, en permettant de prendre en compte cette activité dans le parcours professionnel des salariés.

C’est ce qu’explique Philippe Bourgallé, directeur de Dialogues , l’association à l’origine du projet, qui rassemble des responsables patronaux et syndicaux. "Convaincus qu’il faut un syndicalisme, nous avons lancé ces formations afin d’aider les syndicalistes à acquérir, développer et faire reconnaître leurs compétences".

Les grandes entreprises premières intéressées

Après Axa et la mairie de Suresnes, LCL, Veolia propreté et La Banque postale se sont lancées dans l’aventure, tandis que PSA, Saint-Gobain et Veolia Environnement s’apprêtent à démarrer des formations. La BNP, la Société générale et Capgemini seraient également intéressées. Pour l’heure, "70 personnes sont passées ou passent par ce cursus", recense Ambroisine Bourbon, la responsable du projet à Sciences po : "une maison, dit-elle, sensible par tradition à tout ce qui touche au syndicalisme. De plus, il y a toujours eu dans l’ADN de Sciences po ce souci d’ouverture et de progression sociale".

Au programme : méthodologie, culture économique et relations sociales

L’Institut d’études politiques gère l’ensemble des contenus pédagogiques : à partir d’un programme préétabli, identique pour toutes les promotions, des ajustements spécifiques peuvent ensuite avoir lieu, en fonction des problématiques propres à l’entreprise, par exemple autour des seniors, de la retraite ou de la parité.

La formation, qui s’inscrit dans le cadre du DIF (droit individuel à la formation), se concentre sur l’efficacité personnelle et la méthodologie (expression écrite et communication orale, négociation, management de projet, gestion du temps…), la culture économique et financière (lecture d’un bilan, compréhension des comptes de résultats, situation de l’activité de l’entreprise sur le marché…) ainsi que sur la culture sociale et syndicale (histoire des relations sociale, mise en perspective au niveau international…).

Des séminaires sont organisés dans les locaux de Sciences po rue Saint-Guillaume et animés par Guy Groux, directeur de recherche au Cevipof (Centre de recherches politiques) . "L’objectif est de conjuguer les apports théoriques et pratico-pratiques", souligne Ambroisine Bourbon.

Une certification à la clé

A l’issue de la formation, les stagiaires doivent rendre une note professionnelle et passer un oral afin de valider leur certification. "C’est important qu’ils obtiennent un diplôme", insiste Philippe Bourgallé. En effet, cette formation vise tout d’abord à faciliter les évolutions de carrière et les reconversions en interne. De fait, certains salariés de la première promotion d’Axa ont (re)pris goût aux études et envisagent de s’inscrire en master.

D’autre part, il s’agit aussi de préparer la relève syndicale : "cela peut redonner confiance à ceux qui sont juste derrière les numéros 1 ou 2, et qui n’ont pas forcément les compétences de leader car ils sont jusqu’à présent restés dans l’ombre", poursuit le directeur de Dialogues, heureux du développement de ces formations : une dizaine de nouvelles sessions devraient ainsi voir le jour en septembre 2011.

La formation en chiffres

13 jours de cours répartis sur une année
10 à 12 salariés par promotion
Coût pour l’entreprise : environ 4 000 € par stagiaire, soit entre 40 000 et 45 000 € pour une promotion.

Sophie Blitman | Publié le