APB : 2016, année à hauts risques

Natacha Lefauconnier, Camille Stromboni - Mis à jour le
APB : 2016, année à hauts risques
Nouveauté 2016 d'APB : l’instauration de “candidatures groupées” pour les licences universitaires les plus en tension : droit, psychologie, Staps et Paces. Ce qui n'est pas sans poser question aux acteurs. // ©  Patrick Allard / R.E.A
À quelques jours de l'ouverture du portail APB (Admission postbac), le 20 janvier 2016, les inquiétudes restent nombreuses. Notamment celle du bug technique, à cause de la série de nouveautés mises en place dans un délai plus que serré.

Après les difficultés de la session 2015, APB (Admission postbac) va-t-il tenir le choc de l'année 2016 ? Une batterie de mesures a été annoncée en décembre 2015 pour adapter le portail de pré-inscription des futurs bacheliers dans l'enseignement supérieur. Mais, à quelques jours de l'ouverture des candidatures, le 20 janvier, plusieurs questions demeurent.

"En tant que technicien, ce que l’on craint le plus, c’est le bug et les conséquences que cela pourrait entraîner sur les candidats", résume Bernard Koehret, maître d’œuvre d'APB, lors d'une rencontre avec l'Ajéduc (Association des journalistes éducation-recherche), le 7 janvier 2016. Son équipe de sept personnes travaille d’arrache-pied pour que tout soit en place dans les temps. Mais d'importants développements techniques ont été nécessaires pour un délai de mise en œuvre pour le moins réduit.

Une filière non sélective obligatoire pour les bacs généraux  

Premier changement majeur impliquant des développements techniques conséquents : tous les futurs bacheliers généraux auront désormais l’obligation de choisir sur APB au moins une filière dite “libre” de son académie, c’est-à-dire non sélective et n'ayant pas une capacité d'accueil limitée, à savoir les licences universitaires.

Une mesure qui doit permettre à chaque bachelier d'avoir au moins une proposition d'admission en juin prochain. Ces licences "libres" d'une académie seront identifiées par une pastille verte dans APB.

"Les bacheliers technologiques ou professionnels ne sont pas concernés par l’obligation de choisir une licence", prévient toutefois Bernard Koehret. Ces bacheliers ayant des taux d'échec dramatiquement élevés à la fac. La mesure ne résout donc pas le problème pour eux : ils pourront se retrouver, comme les années précédentes, sans proposition d’admission sur APB si les formations sélectives (comme les BTS ou les DUT) dans lesquelles ils postulent ne retiennent pas leur dossier.

Les quotas de bacheliers techno et pro en BTS ou DUT, ou encore les places réservées aux bacheliers les plus méritants, n'empêchent pas un grand nombre desdits bacheliers de se voir toujours refuser l'entrée dans ces filières sélectives.

Ces mesures techniques sont utiles, mais nous ne sommes pas rassurés pour autant. Le cœur du problème reste la différence entre le nombre de places disponibles et le nombre de candidats. (W.Martinet - Unef)

candidatures groupées = un temps de trajet qui explose ?

Deuxième nouveauté redoutée par les acteurs de l'enseignement supérieur : l'expérimentation de “candidatures groupées” pour les licences universitaires les plus en tension : droit, psychologie, Staps (Sciences et technologies des activités physiques et sportives) et Paces (Première année commune aux études de santé).

Dans ces filières, les bacheliers effectueront désormais une seule candidature par filière, et non plus un vœu par établissement. Au sein de cette candidature, ils devront classer toutes les universités proposées – de l'académie, de la Comue (Communauté d'universités et établissements) ou de la région, pour l'Île-de-France – par ordre de préférence.

Cela maximisera leurs chances de trouver une place mais les forcera aussi à classer des facs dans lesquelles ils n'auraient peut-être pas voulu postuler. Ainsi un candidat parisien voulant suivre une licence de droit devra classer les 12 licences proposées dans la région Île-de-France. Y compris les cursus d'universités géographiquement très éloignées de son domicile.

"Les choses sont encore floues, mais nous sommes un peu inquiets sur les filières en tension, reconnaît Frédéric Dardel, président de l’université Paris 5. Le temps de trajet entre le domicile et la fac est un facteur important pour la réussite d'un étudiant et nous ne savons pas à quoi peut aboutir la moulinette APB..."

"L’algorithme continuera d’affecter les places selon les mêmes critères : l’académie d’origine du candidat et l’ordre du vœu (ou du "sous-vœu", pour ces candidatures groupées)", rassure tout de même Bernard Koehret. Avec le recours au tirage au sort lorsqu'il reste des candidats à départager.

Quid de la PROcédure complémentaire ?

Un autre risque de taille découle de ce nouveau système : un étudiant voulant s'inscrire en droit placera donc ce vœu groupé en première position, en ordonnant les 12 facs franciliennes. Il aura de très grandes chances d'obtenir une place. S'il l'obtient dans une fac particulièrement éloignée, l'ensemble de ses autres vœux inférieurs dans d'autres filières s'annuleront, puisqu'il aura décroché son vœu 1.

S'il juge le campus trop éloigné de chez lui et préfère suivre une autre filière plus proche géographiquement, aura-t-il une porte de secours ? Peut-être avec la procédure complémentaire – qui s'ouvre le 24 juin. Et dont les modalités seront définies... "dans une réunion prochaine", indique Bernard Koehret.

"Ces mesures techniques sont utiles, elles devraient assurer aux bacheliers au moins une inscription certaine à la fac, réagit William Martinet, président de l'Unef. Mais nous ne sommes pas rassurés pour autant. Le cœur du problème reste la différence entre le nombre de places disponibles et le nombre de candidats. Et il n'a reçu aucune réponse politique." 

L'inconnu pour la Paces en Île-de-France
Pour la première fois, l’inscription en Paces (Première année commune aux études de santé) ne garantira pas une place à chaque candidat francilien. En effet, la filière sera cette année "à capacité limitée". Et les candidats devront désormais classer tous les UFR de médecine d’Île-de-France, alors qu’ils ne devaient en classer que quatre sur sept jusqu'ici.

Un candidat accepté en Paces lors des phases d’admission d’APB en juin ne connaît l'université dans laquelle il va étudier qu’à la mi-juillet. Et en classant sept UFR au lieu de quatre, l’incertitude quant à son futur lieu d’études s’accroît.

Natacha Lefauconnier, Camille Stromboni | - Mis à jour le