Bilan du quinquennat : Macron a-t-il tenu ses promesses en matière de vie étudiante ?

Amélie Petitdemange Publié le
Bilan du quinquennat : Macron a-t-il tenu ses promesses en matière de vie étudiante ?
De nombreux étudiants, touchés par la précarité, ont eu recours à l'aide alimentaire lors de la crise sanitaire. // ©  Teresa SUAREZ/REA
A deux semaines de l'élection présidentielle, EducPros dresse le bilan du gouvernement sortant quant aux mesures et aides mises en place en faveur de la vie étudiante. Marqué par la crise sanitaire et la précarité étudiante, l'accompagnement n'a pas été à la hauteur, selon la Fage et la Cour des comptes.

Un bilan mitigé concernant l'action du gouvernement en faveur de la vie étudiante... C'est le constat que dresse Paul Mayaux, président de la Fage (Fédération des associations générales étudiantes). Il note des avancées, comme la fin du régime de sécurité sociale des étudiants, qui ont gagné en pouvoir d'achat avec leur affiliation au régime général. Une réforme qui devait cependant être assortie d'une réforme des bourses, "tant de fois promise mais jamais engagée", rappelle-t-il.

Même constat pour le plan de "60.000 logements étudiants sur le quinquennat" promis. "On en est bien loin", affirme Paul Mayaux. En effet, seulement 37.000 logements avaient été construits à la fin de l'année 2021.

Soutien aux étudiants pendant la crise : insuffisant et tardif

La Cour des comptes a elle aussi dressé un bilan du soutien à la vie étudiante, notamment sur la période de crise sanitaire. Dans son bilan annuel 2022, elle considère qu'il a été "décevant" dans l'ensemble. "Le soutien n'a pas été à la mesure des enjeux car il a été trop tardif et trop circonscrit en termes de publics et de vulnérabilités", explique une source à la Cour des comptes.

Un constat partagé par Paul Mayaux de la Fage. Selon lui, le soutien du gouvernement n'a pas été à la hauteur. "La précarité déjà présente a été exacerbée. L'action du gouvernement a été tardive et incohérente et les mesures ponctuelles, alors que le besoin était permanent".

Le Cour des comptes évoque notamment l'aide exceptionnelle aux boursiers de 150 euros qui n'a été versée qu'à partir de décembre 2020. "C'était en retrait par rapport à des aides pour les non étudiants, ouvertes dès juin 2020", souligne-t-elle. Quant aux repas du Crous à un euro, les étudiants non boursiers ont dû attendre début 2021 pour bénéficier de cette mesure. Elle note que la réactivité a été plus grande à l'international, avec des aides dès le mois de juin au Danemark et en Allemagne.

Précarité : une méconnaissance des besoins des étudiants

"En termes de précarité visée, c’était circonscrit aussi", indique la Cour des comptes. L'aide à la perte d’emploi avait par exemple une cible de 510.000 étudiants mais a profité à 23.429 d'entre eux. "Les critères, choisis pour limiter les effets d’aubaine, ont été à l’origine du faible impact du dispositif", note la Cour des comptes.

Un soutien insuffisant qui s’explique, selon la Cour, par la méconnaissance de la situation et des besoins des étudiants. Mais aussi par des défauts structurels, comme la multiplicité des acteurs et les limites des dispositifs de bourses. Les sages de la rue Cambon préconisent de baser la bourse sur les revenus de l'année précédente, et non deux ans auparavant.

Et pour compléter le tableau, la Fage a aussi observé la précarisation des étudiants de classe moyenne qui n'entraient pas dans les critères de bourse, avec notamment des nouveaux publics dans les épiceries solidaires.

La Fage salue enfin le gel des loyers Crous, qui n'ont pas augmenté pour la quatrième année consécutive. Un "marqueur assez fort" mais qui n'a pas enrayé la problématique des étudiants sans logement. Les actions du gouvernement, bien qu'existantes, ont donc été insuffisantes, en particulier lors de la crise sanitaire.

Un accès aux services de santé universitaires inégal

La Cour des comptes et la Fage notent par ailleurs le manque d'accompagnement psychologique. Le chèque psy a été plébiscité mais le dispositif a finalement été décevant. "Quatre mois après l'annonce de Macron, une trentaine de services de santé universitaires ne l'avaient toujours pas mis en place", rappelle Paul Mayaux.

La Cour des comptes souligne dans son rapport le faible recours à ce service. En cause : la méconnaissance du dispositif et un nombre de psy insuffisant. "Le rythme de recrutement s'est tassé dans le temps alors que la demande progressait sensiblement. Les professionnels nous ont dit que l'attrait était trop faible, notamment en termes de rémunération", explique la Cour des comptes.

D'une manière générale, les services de santé universitaires restent sous-dotés. Un manque de moyens qui ne garantit pas aux étudiants un accès égal aux services de santé.

Une évolution positive sur la santé mentale

Elle relève cela dit des mesures positives pour la santé mentale des étudiants, comme la lutte contre la stigmatisation des troubles psychiatriques, des campagnes de sensibilisation à la santé mentale, et le développement de formations premiers secours sur la santé mentale. Le recrutement de 80 psychologues en 2021 a aussi été favorable mais la mise en place a été progressive à cause du manque de moyens et de locaux.

"Nous sommes désormais à un psy pour 15.000 étudiants contre un pour 30.000 avant les recrutements. Mais il y a encore du travail pour atteindre la recommandation d'un psy pour 1.000 à 1.500 étudiants", souligne Paul Mayaux.

Certaines mesures considérées comme rétrogrades

Mais au-delà de la crise sanitaire qui a mis en exergue la précarité étudiante, le président de la Fage pointe aussi des mesures "rétrogrades" comme la baisse des APL et la loi de programmation de la recherche qui "précarise les emplois, notamment avec les chaires de professeur junior".

Enfin, il condamne le plan Bienvenue en France, qui prévoit une augmentation drastique des frais d'inscription à l'université pour les étrangers. Une hausse "totalement incohérente alors que les étudiants internationaux sont les premiers à souffrir de la précarité".

Amélie Petitdemange | Publié le