"Class gift", la culture du don à l’école

Sarah Masson Publié le
Système de dons entre promotions, le class gift se développe dans les grandes écoles. Un moyen de collecter des fonds mais aussi, surtout, de construire un lien avec les anciens élèves, futurs donateurs.

Fédérer une communauté, participer au financement de bourses, instaurer une culture du don chez les futurs alumni... le class gift (ou "don de promotion"), venu des pays anglo-saxons, se développe en France depuis quelques années, principalement dans les grandes écoles de commerce et d'ingénieurs. "Le class gift est à la fois un outil de fundraising et un outil de relation avec les alumni", commente Yaële Aferiat, directrice de l'Association française des fundraisers (AFF). Le dispositif consiste en une collecte de fonds auprès de la promotion sortante et, dans certains établissements, auprès des cuvées antérieures. Dans la plupart des cas, les fonds récoltés sont réservés à l'attribution de bourses sur critères sociaux pour les nouveaux arrivants. À HEC, où les montants sont parmi les plus élevés, les class gifts permettent de subventionner 10 à 15 bourses par an. Mais ils servent également à financer des projets de recherche ou d'infrastructures. Ainsi, à Centrale Paris, ils représentent 5 à 7% des dons annuels et financent une partie de l'installation du futur campus à Saclay (91).

Encore balbutiante, la formule fonctionne particulièrement bien dans les établissements prestigieux, où le réseau d'anciens est le plus structuré et la tradition de mécénat déjà bien ancrée. L'INSEAD est pionnier en la matière : l'institution organise depuis une vingtaine d'années des reunion class gift à l'occasion des anniversaires de promotion. Par ailleurs, grâce à la campagne Robin des Bois, la promotion sortante finance une bourse pour un étudiant de la nouvelle promotion.

Une importance surtout symbolique

Pour les écoles, ces class gifts ont surtout une importance symbolique. "Le but n'est pas seulement de collecter des fonds, précise Léa Sarica, responsable du fonds annuel et des relations diplômés à la Fondation HEC. Le message principal, c'est qu'un maximum d'étudiants participe."

À HEC, environ 80% des étudiants contribuent au class gift, tandis que l'INSEAD affiche un taux d'environ 90%. Le montant des dons est assez variable (entre 20 et 100 € pour les plus jeunes, et souvent beaucoup plus pour les promotions antérieures). À Centrale, le Défi interpromos réunit toutes les promotions qui le souhaitent (des années 1950 à aujourd'hui) dans deux compétitions : le plus gros montant et le plus grand nombre de donateurs, pour ne pas désavantager les plus jeunes.

Une opération de sensibilisation

"Le class gift est avant tout une opération de sensibilisation, poursuit Léa Sarica. L'idée est de fédérer les étudiants et de les initier au don tant qu'ils sont encore sur le campus."

"Instaurer une culture du don le plus tôt possible, c'est aussi notre objectif", explique Nathalie Bousseau, directrice du mécénat à Centrale. Ce d'autant plus que les frais de scolarité sont faibles (583 € par an) et qu'une partie importante des projets de développement voient le jour grâce à des fonds privés. "C'est la notion de graine qu'on sème, résume Elisabetta Scanferla-Schmitt, directrice de la Fondation ESCP. Cela fait partie des messages qu'on vous laisse au moment de quitter l'école, il va germer et vous y serez sensible plus tard." Pour l'école, le class gift est un moyen de fédérer ses troupes et de consolider son image par la création d'un esprit de groupe. Une dimension essentielle à l'INSEAD, où plus de 70 nationalités se côtoient : "Ce qui prime, explique Céline Garsault, responsable de la collecte de fonds à L'INSEAD, c'est le sentiment d'appartenance à un groupe dont ils sont fiers."

C'est ce sentiment que les écoles souhaitent cultiver à travers les class gifts. "La communauté va apporter ses réseaux, ses financements, ses partenariats avec des entreprises dans lesquelles les diplômés de l'école vont faire carrière. Car in fine, ce dont on parle, c'est bien du rayonnement de l'institution et de son positionnement ", conclut Yaële Aferiat. En résumé : plus le système de class gift sera développé et son réseau d'anciens entretenu, plus l'école verra son prestige étendu.

Fundraising, un enjeu majeur
Face à une concurrence internationale accrue et dans un contexte de raréfaction de l'argent public, le fundraising est devenu un enjeu majeur dans l'enseignement supérieur. Les établissements, publics et privés, cherchent à diversifier leurs sources de financement. Outre le mécénat d'entreprise, les grandes écoles ont notamment pris conscience du potentiel de donateurs que constitue leur réseau d'anciens. Les universités commencent aussi à s'intéresser à la question, même si elles ne disposent pas encore des moyens nécessaires pour mettre en place une véritable politique de fundraising.

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