EdTech : 5 start-up qui réinventent l'évaluation et la certification

Étienne Gless Publié le
EdTech : 5 start-up qui réinventent l'évaluation et la certification
Charles Zhu et Clément Régnier, cofondateurs de TestWe : leur start-up spécialisée dans la digitalisation des processus d'examen a été appelée à la rescousse par Paris-Nanterre au plus fort du blocage de l'université au printemps 2018. // ©  Test We
L'Observatoire des EdTech, dont EducPros est partenaire, a présenté mardi 12 juin une dizaine de start-up qui réinventent l'évaluation et la certification, version numérique. EducPros a repéré 5 pépites EdTech sur ce créneau porteur. Le point commun de ces projets déjà aboutis ou très prometteurs : un business modèle reposant majoritairement sur des revenus tirés d'établissements de formation privés ou d'entreprises.

1. Alternative Digitale veut créer le "Toeic des compétences numériques"

La start-up fondée en 2015 par une serial entrepreneure, Anne-Laure Vincent (fondatrice jadis du site Marmiton.org), se positionne sur le créneau de la "digital literacy", la culture générale en mode digital. "Notre objectif est de mesurer les compétences digitales des étudiants et salariés et de les matérialiser grâce à un certificat reconnu par le ministère du Travail et inscrit au RNCP [Répertoire national des certifications professionnelles]."

La société édite le certificat Digitt. Ce test de niveau cible le public des actifs au sens large : étudiants, salariés ou indépendants. "Le test passé en conditions d’examen dure une heure trente. Il vous donne un score sur 1.000 et un radar sur les 9 problématiques du digital", précise Anne-Laure Vincent. "Notre référentiel de compétences est déposé à l’Inventaire de la CNCP [Commission nationale de la certification professionnelle]."

Si la start-up travaille avec des établissements du supérieur comme l'IUT de Paris ou l'école de commerce EMLV qui souhaitent certifier les compétences digitales de leurs étudiants et ainsi valoriser leur diplôme final, ses clients se situent surtout dans le monde professionnel : Air France, SNCF, France Télévisions l'utilisent pour établir un baromètre des compétences digitales de leurs équipes et accompagner leur transformation digitale. "Nous sommes rentables et nous nous autofinançons", confie la créatrice.

2. Pix, la start-up d'État dont les tests permettent aussi d'acquérir des compétences

Le programme de Pix ? "Aider tout un chacun à cultiver ses compétences numériques tout au long de la vie." Lancé en juin 2016, le projet est public et vise à construire une plate-forme de développement et de certification des compétences numériques. "Le projet Pix est sorti des silos habituels des ministères de l'Éducation nationale et de l'Enseignement supérieur et de la Recherche", remarque son directeur Benjamin Marteau. "Comme les autres start-up d'État, nous développons des projets publics sans cahier des charges avec une pression forte : si la valeur n'est pas confirmée par le public au bout de cinq mois, le projet s'arrête."

Deux mois après sa première ligne de code, Pix en version bêta était déjà testé dans des établissements scolaires. "Historiquement, on utilise le C2i [certificat informatique et internet] pour évaluer les compétences numériques de nos élèves, témoigne ainsi Christophe Lacroix, professeur de STMG au lycée Siegfried de Paris. Passer le C2i avec Pix a rendu l'évaluation beaucoup plus interactive et progressive. L'étudiant est toujours face à des questions auxquelles il peut a priori répondre. Sinon des capsules de formation vidéo lui permettent de passer ce cap. Ainsi on ne met pas l'étudiant devant un échec, on lui montre qu'il y a une progressivité."

3. TestWe aide les établissements du supérieur à digitaliser leurs examens

"Nous aidons les établissements d’enseignement à digitaliser leurs process d’examen", explique Clément Régnier, cofondateur avec Charles Zhu de TestWe. Fondée en 2014, la start-up propose une salle d'examen sécurisée offline : il s'agit notamment de permettre aux candidats d’utiliser leur propre matériel (ordinateur portable) et de sécuriser l’interface pour les empêcher de tricher en accédant à d’autres contenus en ligne. "Grâce à notre plate-forme les administrations des établissements peuvent créer, gérer et corriger les examens, le contrôle des connaissances et les concours", détaille Clément Régnier.

Au printemps dernier, l’université Paris-Nanterre a même contacté TestWe en urgence pour les partiels du second semestre, lors du blocage de son campus et une tentative avortée de délocalisation des examens au centre d'Arcueil. "Pour faire passer des tests en ligne à 2.000 ou 6.000 personnes, nous n'avions pas de solution en interne", confie Aurélien Saidi, vice-président chargé du numérique à l'université Paris-Nanterre.

Si les équipes de TestWe ont répondu présent pour dépanner l'université publique, Clément Régnier confie se concentrer sur des clients privés comme les écoles de commerce ou le centre de formation aux métiers du notariat : "Les décisions s'y prennent plus vite. Nous n'avons que quelques année d'existence. Si on doit attendre deux ans une décision d’un établissement public, on va couler !"

4. Isograd déploie son test de compétences bureautiques à l'international

"Nous avons développé le Tosa (Test on Software Applications), un certificat de compétences bureautiques et digitales reconnu en France par la CNCP", explique Marc Alpérovitch, fondateur et président d'Isograd. La société revendique 5.000 écoles et entreprises utilisant son test Tosa pour évaluer le niveau en Excel (bureautique), DigComp ou HTML5 et CSS3 et autres langages de programmation. "Nous avons 1.200 centres d'examen dans le monde. Le Tosa est la troisième certification la plus passée en France par les salariés derrière le Toeic et le Bulats, deux tests de niveau en anglais. Notre business modèle est simple : nous vendons des crédits de tests à des organismes de formation, à des écoles et à des entreprises", précise Marc Alpérovitch.

Le Tosa, proposé en quatre langues, se développe à l'international. Il est reconnu au Royaume-Uni et aux Pays-Bas. Approché pour participer à un joint-venture en Inde, Isograd préfère pour le moment se concentrer sur le marché nord-américain, où la start-up a une filiale qui déjà conquis 230 clients et est en cours de reconnaissance par deux États. L'entreprise est rentable depuis plusieurs années, selon son fondateur.

5. Pipplet invente des tests de langue nouvelle génération

"Nous proposons aux entreprises d’évaluer en ligne la capacité écrite et orale d'un candidat à communiquer dans un contexte professionnel", explique Baptiste Derongs, cofondateur en 2015 de Pipplet.

Selon son promoteur, les entreprises sont parfois déçues du niveau de pratique en langue de candidats ayant obtenu un bon niveau aux test d'anglais Bullats ou Toeic : "Un test qui évalue la grammaire peut donner un bon candidat en bachotage et faire manquer un candidat excellent praticien de la langue", argumente Baptiste Derongs. Le test inventé par Pipplet évalue donc si un candidat peut vraiment utiliser la langue dans son quotidien professionnel : animer une réunion, écrire un mail, commander à déjeuner…

Le business modèle de la start-up repose là encore sur la vente aux entreprises de crédits de tests. Elle revendique 70 clients, qui utilisent l'outil pour leurs recrutements.


D'autres start-up EdTech à suivre

ForMetris : cette start-up propose des outils digitaux pour mieux mesure l'impact des actions de formation des entreprises principalement.
Prep Academy : cette plate-forme ambitionne de moderniser le business de la préparation des concours par correspondance.
PrepMyFuture : la plate-forme d'e-learning est spécialisée dans la préparation d'examens et de tests (du Toeic au GMAT).
GlobalExam : cette start-up propose une pédagogie alternative pour s'entraîner aux tests de langues indispensables à une mobilité internationale. Elle a été créée par un étudiant traumatisé d'avoir manqué de cinq points son niveau en Toeic pour partir étudier à l'étranger.

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