Grève des enseignants-chercheurs : le rattrapage des cours en négociation

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Grève des enseignants-chercheurs : le rattrapage des cours en négociation
Manifestation du 24 mars 2009 à Paris // © 
L’année universitaire sera-t-elle compromise pour les étudiants dont les enseignants-chercheurs ont fait grève ? La mobilisation dure depuis plus de deux mois et la question occupe désormais les esprits. Valérie Pécresse a demandé le 25 mars 2009 aux présidents d’université de faire en sorte que les examens puissent se tenir et que soient organisés des cours de rattrapage. Le même jour, la Conférence des présidents d'université (CPU) a abondé dans ce sens, estimant que les enseignements devaient maintenant reprendre. Un vœu pieux pour certaines universités, où le mouvement se radicalise (voir encadré). Quatre présidents (1), connus pour leur engagement contre les réformes en cours, ont même contredit la CPU, appelant à poursuivre la mobilisation. Au coeur de ces rapports de force, l'organisation des rattrapages des cours reste en suspens.

Est-ce déjà trop tard pour obtenir son deuxième semestre ? L’Unef, principal syndicat étudiant, affirme le contraire. « Nous avons la conviction que la validation du deuxième semestre est encore possible », déclare Jean-Baptiste Prévost , son président, qui condamne cette « dramatisation inutile de Valérie Pécresse, qui cherche à faire diversion et à monter les étudiants les uns contre les autres ».

Deux à trois semaines de cours de retard en moyenne, selon l'Unef

Le président de l'UNEF voit en effet de nombreux leviers pour rattraper le retard pris : les vacances d’avril, la semaine sans cours avant les partiels, le report des examens de quelques semaines, etc. Autant de moyens à la disposition de chaque université pour assurer la validation des diplômes. Le volume de cours supprimés depuis le début de la mobilisation n’excède d’ailleurs pas, en moyenne, deux à trois semaines, selon Jean-Baptiste Prévost.

Très hétérogène, la grève ne touche pas de la même manière les 83 universités françaises, ni même les différentes filières au sein de chaque université. Le ministère estimait que la tendance générale était maintenant à la baisse des perturbations dans les universités, avec des reprises de cours, mais aussi avec quelques noyaux de radicalisation (voir encadré ci-dessous).

Du cas par cas, composantes par composantes

Certains étudiants n’ont pris aucun retard, tandis que d’autres cumulent près de deux mois blancs, comme les juristes de Paris 8 ou les étudiants de Rennes 2. Difficile pour l’instant de quantifier précisément le retard à rattraper. Certaines modalités de la « grève active » menée par les enseignants-chercheurs, comme les cours hors-les-murs, ajoutant à la confusion.

Comment vont s’organiser les rattrapages de cours ? « Les équipes pédagogiques sont en train de discuter avec les étudiants », indique Jean-Loup Salzmann , président de l’université Paris 13-Nord. Certaines composantes devraient organiser individuellement les rattrapages, comme à Paris 8. D'autres s'interrogent sur l'opportunité de repousser certains examens en septembre. Le temps est à la réflexion, sans trop d’inquiétudes pour l’instant.

« Nous sommes encore dans une situation où il est possible de récupérer le maximum de cours, en tirant un peu sur le mois de juin par exemple, avec des rattrapages intensifs. Il y a aussi la solution des cours en ligne, que nous utilisons déjà », note Pascal Binczak , président de Paris 8. « Je ne suis pas inquiet, indique Jean-Loup Salzmann, nous allons trouver des solutions ».

Un mois et demi de cours à rattraper à Montpellier 3

A Montpellier 3, la présidente Anne Fraïsse y voit déjà plus clair. Toutes les composantes sont en effet touchées de la même manière, avec un blocage général du campus qui dure depuis plus de deux semaines et demi. Pendant les cinq premières semaines de mobilisation, l’université participait au mouvement de contestation, sans que la tenue des cours n’en soit affectée.  

« Nous ne sommes pas dans une situation trop dramatique, estime Anne Fraïsse, il nous reste moins de six semaines de cours à faire pour finir le deuxième semestre. Le principe est donc simple. Quand nous sortirons de la crise, nous rattraperons les six semaines de cours, suivies des examens. »

Pas de diplôme au rabais

Néanmoins, la deuxième session [les rattrapages pour les premier et deuxième semestres ndlr] devrait vraisemblablement être déplacée en septembre. « Il n’est pas question de distribuer des diplômes au rabais », assure la présidente de Montpellier 3. Un souci partagé par ses confrères. « L’important, c’est que les compétences qui vont avec un diplôme soient acquises et validées par l’étudiant », précise Jean-Loup Salzmann.

(1) Pascal Binczak (Paris 8), Bernadette Madeuf (Paris 10), Georges Molinié (Paris 4) et Philippe Rollet (Lille 1), Anne Fraïsse (Montpellier 3)

Une situation tendue avec des blocages persistants

Le ministère estimait jeudi 26 mars 2009 que quelques noyaux de radicalisation se maintenaient, malgré une tendance générale à la baisse des perturbations dans les universités. Plusieurs établissements restaient en effet fortement perturbés, en fin de semaine, avec des cours toujours suspendus.

Les blocages - total ou partiel, dans certaines composantes ou sur l’ensemble du site – se poursuivaient ainsi à Rennes 2, Caen, Poitiers, Tours, Orléans, dans les trois universités toulousaines, à l’université de Bourgogne ou encore l’université de Strasbourg, dont certains locaux ont été vandalisés... Lieu symbolique, la Sorbonne a également été occupée jeudi par une centaine de personnels de Paris 1, Paris 3, Paris 4, l’EPHE.

Selon Jacques Fontanille, président de l’université de Limoges et vice-président de la Conférence des présidents d’université (CPU), la radicalisation du mouvement se focalise surtout sur les SHS, alors qu’il était au départ plus général. Il évalue néanmoins à plus de 60 % le nombre de composantes qui n’ont connu aucun mouvement.

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