Idex : Lyon dans l'incompréhension

CS et SB Publié le
Lyon : recalé. La première sélection de l’Initiative d’excellence était inattendue pour le mastodonte lyonnais. Résultat : de nombreuses incompréhensions et questions en suspens chez les acteurs du projet, ainsi qu’un fort sentiment de lassitude.

Questions et incompréhensions

Y avait-t-il un seul modèle institutionnel possible pour gagner ?

Au commissariat général à l’investissement (CGI), on assure que non. « Tout est dans l’appel d’offre, l’important est de développer un projet réellement transformant pour l’enseignement supérieur français, explique Thierry Coulhon, directeur au CGI, en charge des briques Idex, Labex et Equipex. Le jury n’a absolument pas de modèle a priori en tête. Il ne faut pas surinterprêter ce premier résultat , surtout sur ce petit échantillon. »

"Le jury n’a absolument pas de modèle a priori en tête. Il ne faut pas surinterprêter ce premier résultat, surtout sur ce petit échantillon"

Et pourtant … Chez les Lyonnais, on a bien l’impression que certains types de modèles restent exclus du jeu, en l’occurrence le leur. « Toutes les propositions d’universités fédérales ont pour l’instant été repoussées, observe Michel Lussault, président du PRES lyonnais. C’est ce qui semble achopper pour notre projet, puisque la qualité scientifique, les thématiques, les objectifs ou même la gouvernance prévue pour l’Idex semblent convenir au jury. La possibilité d’innovation semble ainsi s’arrêter avant la case institutionnelle. »

Sans mettre en cause leur excellence scientifique, « force est de constater que les modèles retenus sont des sites resserrés et surtout très intégrés », avance Jean-Michel Jolion, chargé des grands projets à l’Université de Lyon qui s’interroge : « est-ce qu’il reste encore une place pour les grands sites universitaires ? ».

Entre le jury international et l’Etat : comment se prend vraiment la décision ?

« Le jury n’a pas eu de directives sur le nombre de projets à retenir pour cette sélection, il s’agit simplement des dossiers qui les ont totalement convaincus. Pour une première vague avec un tel enjeu, il est normal de retenir uniquement les dossiers notés A », indique Thierry Coulhon.
Or, cette position surprend Jean-Michel Jolion qui « attend un message » de la part de l'exécutif : « l'Etat a-t-il délégué sa compétence au jury ou compte-t-il décider politiquement de quelque chose ? ». Et de rappeler que l'Etat était intervenu précédemment sur les Labex, en sélectionnant un certain nombre de dossiers notés B .

Quel rôle doit jouer l’Idex ?


Il y a sur ce sujet encore une incompréhension côté lyonnais. « Je vois l’Idex comme un instrument d’accentuation de notre démarche de convergence entre établissements, ajoute Michel Lussault. J’ai pourtant l’impression qu’elle est ici conçue comme une récompense de processus déjà bien engagés ».
« On croyait que l'Idex devait accompagner un processus avec une certaine prise de risque, pas un projet déjà finalisé, et que cela allait au-delà de la restructuration », renchérit Jean-Michel Jolion. D'autant que, poursuit-il, «il n'y a pas besoin de donner 30 millions par an à un site s'il s'agit seulement de le restructurer... ».

"En quelques semaines, ce sont des questions lourdes. Il existe une possibilité qu’on ne soit pas au rendez-vous du second tour, même si on fera tout pour"

Et après ?

En attendant le rapport du jury, les responsables envisagent la suite de l’Idex avec difficulté. « Il va falloir tirer le bilan et voir s’il existe une porte de sortie », indique Michel Lussault. Serait-il prêt à aller jusqu’à la fusion des établissements ? Etant données l’échelle, l’organisation et la complexité du site lyonnais, cela semble difficilement envisageable. « En quelques semaines, ce sont des questions très lourdes. Il existe une possibilité qu’on ne soit pas au rendez-vous du second tour, même si on fera tout pour », affirme-t-il.

Le sentiment de lassitude semble en effet de plus en plus fort dans les universités. « C’est une grande déception. Cela fait des mois que tout le monde est sur le pont, en plus du reste. Tout ça a des limites, les équipes sont fatiguées », exprime Khaled Bouabdallah, président de l’université de Saint-Etienne, qui assure tout de même qu’ils restent bien sûr mobilisés pour le second tour.

"Ces délais intenables nous forcent à contourner les instances démocratiques. Comment voulez-vous réunir tous nos conseils en plein été ?"

Même son de cloche à Lyon. « Même si l’échec est relatif, puisqu’il y a une seconde vague, mes collègues sont à genoux, avec l’impression que les efforts n’ont pas été appréciés. C’est très difficile si on ne veut pas se faire de nouveau retoquer, un nouvel échec serait vraiment dur… Lors des réunions avec les collègues, ils pensent qu’il faut tenter le coup, mais uniquement si l'on a de vraies chances de réussir », estime Michel Lussault.

« On ne va pas se présenter 10 fois…, insiste Jean-Michel Jolion. Il faut que l’on nous dise si notre dossier est a priori recevable ou non. De plus, ces délais très resserrés nous forcent à contourner les instances démocratiques de l’université. Comment voulez-vous réunir tous nos conseils en si peu de temps et en plein été ? ».

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