Les régions réaffirment leur implication dans les politiques d’éducation et de formation

Sarah Nafti Publié le
Les régions réaffirment leur implication dans les politiques d’éducation et de formation
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Régions de France a organisé une conférence de presse le 31 août dernier pour faire le point sur les enjeux en matière d'orientation, d'apprentissage, de formation professionnelle et de pénuries de main d'œuvre, domaines au cœur des missions de ces collectivités locales. L'association a aussi évoqué les inquiétudes autour de la réforme du lycée professionnel.

Peser sur les décisions concernant l'orientation, l'éducation et la formation. C'est l'ambition des Régions de France qui ont vu leurs compétences en la matière s'élargir, en 2018. Pour ce faire, elles ont rappelé, lors d'une conférence de presse le 31 août dernier, leurs différents enjeux du moment - apprentissage, réforme du lycée pro, pénurie dans certains secteurs et métiers de leurs territoires - mais aussi leurs actions pour soutenir concrètement le pouvoir d'achat des familles.

Ainsi, les dispositifs de gratuité des manuels scolaires "ont été maintenus même en période difficile". Des aides à l’équipement, notamment en lycée professionnel où il peut coûter cher, existent aussi au niveau régional.

La réforme de l'apprentissage crée de la concurrence

Alors que les régions se sont vues déposséder de leurs prérogatives en matière d'apprentissage avec la "loi Avenir", François Bonneau, président de la commission éducation, orientation, formation et emploi des Régions de France, est revenu sur les conséquences de la réforme. Il rappelle ainsi le coût élevé des mesures incitatives - notamment les aides exceptionnelles à l'embauche - pointé par la Cour des Comptes et regrette que la hausse de l’apprentissage se concentre essentiellement sur l’enseignement supérieur.

"La réforme (de 2018) n’est pas équitable, il manque un pilotage public", estime ainsi François Bonneau. L'un des écueils de cette réforme concerne la multiplication des CFA liée à la libéralisation de l’offre incluse dans la loi qui "crée de la concurrence".

Ce que confirme David Margueritte, président délégué de la commission, qui cite l’exemple d’un CFA "qui ouvre à 100 mètres d’un lycée professionnel, et propose le même type de formation, alors que nous avons investi dans la rénovation du plateau technique".

Corriger les faiblesses du système de la formation professionnelle

David Margueritte constate aussi trois écueils fondamentaux depuis la réforme de la formation professionnelle :
- le fait que l’apprentissage bénéficie surtout à l’enseignement supérieur,
- l’effet d’éviction des contrats de professionnalisation
- l’effet d’aubaine lié aux aides massives aux entreprises.

"Nous voyons les faiblesses du système, qu’il faut corriger d’urgence", résume François Bonneau, qui relève "une tension entre l’offre et les besoins en compétence". Certains domaines, comme l’hôtellerie-restauration ou actuellement le transport, peinent à trouver de nouveaux profils.

Inquiétudes autour de la réforme du lycée pro

L'association Régions de France évoquent aussi la réforme du lycée professionnel évoquée depuis plusieurs mois par le gouvernement. Encore une fois, les Régions de France craignent la mise en concurrence des deux systèmes : l'apprentissage et le lycée pro.

Le projet de réforme prévoit en effet une augmentation du temps passé en stage rémunéré en entreprise pour les lycéens professionnels. Les régions craignent que cette évolution décourage les entreprises d’embaucher un apprenti, qui leur coûte davantage et se tournent vers des stagiaires de lycée pro.

La réforme (de 2018) n’est pas équitable, il manque un pilotage public. (F. Bonneau, Régions de France)

Et les Régions demandent un vrai pilotage public qui limiterait la concurrence entre les CFA et certains lycées professionnels préparant des diplômes similaires. "Nous considérons qu’il y a une cohérence entre le développement économique et la simplification du champ de la formation professionnelle que nous appelons de nos vœux", abonde David Margueritte.

Les régions au centre de l'orientation dès le collège

Lors de la conférence de presse, les régions ont aussi souhaité évoquer leurs actions en faveur de l'orientation, dont les régions ont récupéré la compétence dès le collège.

"Notre objectif est d’aller à la rencontre des collégiens pour les informer de l’existence de certains métiers, parfois en tension, sur leurs bassins de vie", explique Kamel Chibli, vice-président de la commission éducation, orientation, jeunesse et sports.

Mais cela nécessite un grand travail de coordination avec les établissements scolaires. En Auvergne-Rhône-Alpes, par exemple, un bus de l’orientation permet d’aller à la rencontre du public sur tout le territoire.

Former des demandeurs d'emploi dans les métiers en pénurie

Les Régions de France font également part de leur inquiétude sur le transport scolaire, indispensable dans l’accès au service public de l’éducation. Pour pallier le manque de conducteurs, les régions ont formé des demandeurs d’emploi en y dédiant une partie de leur budget formation et en prenant appui sur le PIC (Plan d’investissement dans les compétences).

Nous voyons les faiblesses du système, qu’il faut corriger d’urgence. (F. Bonneau)

"C’est un métier qui connaît beaucoup de temps partiel subis, avec amplitudes horaires importantes - 6h-19h30 -, pour un salaire de 60% du smic", rappelle François Bonneau, qui insiste sur l’importance "d’améliorer la situation sociale".

Pour former davantage, il souhaite l’élargissement et l’assouplissement du PIC, par exemple en l’étendant au-delà des demandeurs d’emplois : "Il est paradoxal que des aides-soignants voulant devenir infirmiers doivent passer par la case chômage pour en bénéficier, alors que le métier est en tension", précise ainsi François Bonneau.

Participer à l'évolution de Parcoursup

Les Régions de France ont également évoqué la question de Parcoursup, et souhaitent ouvrir le dialogue avec les ministères de l’Education et de l’Enseignement supérieur.

François Bonneau regrette notamment la trop grande place laissée aux seuls algorithmes et souhaite "davantage d’humain" dans le processus de sélection, pour mieux prendre en compte la diversité des parcours.

Sarah Nafti | Publié le