Parcoursup : la course au classement pour les formations du supérieur

Pauline Bluteau Publié le
Parcoursup : la course au classement pour les formations du supérieur
Les établissements ont eu un peu plus d'un mois pour examiner près de 7 millions de vœux sur Parcoursup. // ©  plainpicture/Maskot
Après un long mois de réflexion, les établissements ont rendu leur verdict. Ce sont près de 7 millions de vœux qui ont dû être analysés entre le 3 avril et le 13 mai 2019 sur Parcoursup. Retour sur le travail intensif des commissions d’examen des vœux.

Mercredi 15 mai à 19 heures, les 885.000 candidats inscrits sur Parcoursup recevront leurs premières propositions d’admission. Mais avant d’en arriver là, depuis début avril, un bon nombre d’enseignants, formateurs, responsables pédagogiques et directeurs ont planché sur les dossiers de leurs futurs étudiants. Un travail indispensable pour établir, in fine, leur propre classement.

Commissions restreintes

Pour cette deuxième session de Parcoursup, les formations l’affirment, elles sont désormais rodées à l’exercice. Certaines d’entre elles ont même réduit leur commission d’examen des vœux cette année. "En 2018, nous avions trois ou quatre personnes par commission, cette année, seuls les responsables du parcours et de la mention ont examiné les dossiers", détaille Yves Markowicz, directeur du département des licences en sciences et technologies à l’université Grenoble Alpes.

Que ce soit pour des formations sélectives ou non, les commissions d’examen sont, en effet, très restreintes au vu du nombre de candidatures à examiner. À la faculté de lettres, langues et sciences humaines de l’université d’Angers, chaque commission (une par licence) est constituée de trois à cinq membres. "La taille est fonction du nombre de candidatures : elles peuvent aller de 200 à 3.000 pour la licence de psycho par exemple", complète Alexandre Laurent, enseignant dans cet établissement.

Faire confiance à l’algorithme

Chaque établissement est libre d'organiser ces commissions d'examen. Certains, à l'instar de l'université de Bordeaux, privilégient l’outil d’aide à la décision disponible sur Parcoursup. Il s’agit d’un algorithme qui établit un pré-classement des dossiers en fonction des attendus des formations. Classement des notes, évaluation de la fiche Avenir, adéquation entre la formation et le projet professionnel du candidat... ce premier classement sert de base de travail à la commission.

De son côté, l’université Grenoble Alpes a préféré se constituer un algorithme local en se basant sur les résultats des étudiants obtenus ces dernières années. "La commission doit ensuite vérifier la qualité de l’algorithme et être attentif à la représentation statistique des bacheliers scientifiques car ce sont ceux qui réussissent le mieux en sciences et technologies", précise Yves Markowicz.

En 2018, nous avions trois ou quatre personnes par commission, cette année, seuls les responsables du parcours et de la mention ont examiné les dossiers.
(Y. Markowicz)

Pour les formations sélectives comme les écoles d’ingénieurs, le fonctionnement est, en revanche, un peu différent. À Polytech, un premier classement des candidats est réalisé début avril grâce à un algorithme qui trie, d'un côté, ceux qui passeront les épreuves écrites et, de l'autre, ceux qui passeront un entretien. L’école a d’ailleurs fait le choix de publier son algorithme sur son site pour en expliquer le fonctionnement aux candidats. Le jury, constitué de 7 directeurs de Polytech, se réunit à nouveau en mai pour valider le classement définitif des 21.000 candidatures en s'appuyant, cette fois, sur la note du dossier et les résultats au concours.

Les cas particuliers passés à la loupe

Mais tout ne se passe pas exclusivement derrière un ordinateur. À l’université, en plus du travail de vérification, les commissions doivent examiner en détail les candidatures incomplètes ou spécifiques. "On diffuse les dossiers sur un vidéoprojecteur et chacun donne son avis. Toutes les données du dossier sont exploitées. C’est du sur-mesure pour chaque étudiant", assure Alexandre Laurent. À l’université d’Angers, un service spécial, la DPE (Direction du pilotage et de l’évaluation), est d’ailleurs chargé de présenter des études statistiques aux commissions. Le but étant d'identifier au mieux les étudiants en difficulté pour leur offrir le meilleur accompagnement possible en licence.

Car si l’université doit permettre d’accueillir tous les étudiants, les établissements doivent tout de même établir un classement. "Tous les dossiers sont traités de manière individualisée et, en particulier, les candidats en parcours "Oui-si" qui sont réintégrés à la main au classement général, selon le dispositif qu'on leur propose (remise à niveau ou L1 en deux ans)", constate Pascal Lecroart, directeur de l’université de Bordeaux.

Ce classement est ensuite transféré au rectorat, qui se charge de rectifier le classement en fonction des quotas de boursiers ou hors-secteur. "Pour nous, les candidatures sont anonymes, seul le rectorat a accès à ces informations", tient à préciser le responsable bordelais.

Un travail colossal

D’autres formations, telles que les BTS ou les Ifsi (Institut de formation en soins infirmiers), traitent l’intégralité de leurs dossiers à la main. Florence Cirillo, responsable pédagogique en BTS MCO (management commercial opérationnel) au lycée Albert Calmette à Nice explique que seuls trois professeurs examinent les 1.500 candidatures. "On s’est réparti les dossiers en fonction du bac d’origine, précise-t-elle, puis, on regarde l’avis du conseil de classe, le bulletin et le comportement du candidat à travers la lettre de motivation et les appréciations."

La responsable pédagogique passe environ cinq minutes par dossier, et là encore, la commission se réunit exclusivement pour les dossiers spécifiques. "Même si nous avons défini les critères en amont avec notre directeur, on se pose des questions lorsqu’un élève a un comportement irréprochable mais des notes moyennes. Il faut savoir trancher."

En Ifsi, le traitement est encore différent. Les dossiers sont centralisés au niveau régional, puis redistribués aux différents instituts, qui n’ont que deux semaines pour traiter les candidatures avant de les transférer à nouveau. À La Rochelle, les formateurs, qui faisaient passer les oraux aux candidats jusqu’à l’année dernière, examinent désormais une quarantaine de dossiers chacun.

"On a une grille de notation où il faut évaluer le parcours scolaire (notes), les activités et centres d’intérêts, et le projet de formation motivé", explique Marie-Paule Guibert, formatrice à l’Ifsi de La Rochelle. Chaque formateur examine donc seul les dossiers dont il a hérité. Une procédure que déplore Marie-Paule Guibert. "Il y a une injustice à privilégier certains critères plutôt que d’autres, observe la formatrice. Cela aurait été bien qu’on soit deux sur certains dossiers. Ceci dit, par rapport à Parcoursup, le concours n'était pas forcément plus juste."

Pauline Bluteau | Publié le