Réforme du lycée : le rapport en demi-teinte des inspections générales

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Le rapport des inspections générales sur la réforme du lycée a été présenté le 15 mars 2011. Six mois seulement après la mise en œuvre de la nouvelle classe de seconde à la rentrée. Leur conclusion : bien, mais peut mieux faire…

Les retours du terrain le laissaient présager : la mise en place de la réforme du lycée s’est opérée de façon inégale. Inégale sur la réussite des points clés de la réforme (accompagnement personnalisé, enseignements d’exploration notamment) et inégale selon les établissements. Pour résumer : « une réforme dont les composantes multiples se mettent en place progressivement », des avancées « réelles mais fragiles ». « Des hésitations, des débats, mais pas d’indifférence », lit-on dans le rapport des inspecteurs. Il faut dire que tout a été lancé très vite…

Enseignements d’exploration : les mentalités ont du mal à évoluer

Les enseignements d’exploration devaient amener les élèves de seconde à découvrir des matières, sans s’enfermer dans une voie d’orientation. Mais les représentations anciennes ont la vie dure… D’une part, les lycées ont peu ou proue garder leur identité (artistique, technologique, linguistique…), même si certains lycées généraux proposent de nouveaux enseignements technologiques. D’autre part, les élèves (bien que positifs sur le principe) restent influencés par leur représentation des poursuites d’études. Par exemple, ils choisissent les MPS (méthodes et pratiques scientifiques) en vue d’une première S. Ils s’interrogent également sur leur éventuel changement d’établissement selon le parcours choisi. Et ont du mal à comprendre les méthodes d’évaluation. « Dans un lycée, certains enseignants notent les enseignements d’exploration et cette note figure sur le bulletin ; d’autres ne notent pas, alors que les élèves sont dans la même classe », indique le rapport.
Les inspecteurs préconisent donc une meilleure information des lycéens (jugée trop partielle et tardive) et une meilleure complémentarité entre les établissements.

L’accompagnement personnalisé : au centre des inquiétudes

L’accompagnement personnalisé inquiète les professeurs car il touche « à leur cœur de métier ». Il leur faudra du temps pour trouver leurs marques. Le rapport salue « la remarquable créativité pédagogique » de certains, souligne qu’ils s’interrogent sur la façon de « mieux prendre en compte les besoins des élèves pour les faire réussir ». Les auteurs avertissent que « la déception des élèves, notamment en ce qui concerne l’accompagnement personnalisé qui ne répond pas à leurs besoins, doit être prise en compte rapidement. Il est regrettable qu’ils ne soient pas consultés plus souvent sur leurs études et les facteurs de leur réussite ». En moyenne, l’accompagnement personnalisé s’est vu attribué 1,5 heure en plus des deux heures prévues permettant de constituer ainsi des groupes à effectif réduit, selon les inspecteurs.

L’autonomie : bien intégrée

Les rapporteurs ont remarqué l’effort d’adaptation des établissements à leurs élèves, à leurs projets. Mais si la majorité des lycées ont misé sur la multiplication des groupes (et la complexe organisation des emplois du temps qui va de paire…) pour proposer un vrai accompagnement personnalisé et plusieurs enseignements d’exploration, d’autres ont gardé le principe de la classe (plus simple à gérer mais prédéterminant).

Les inspecteurs soulignent deux conditions pour la poursuite de la réforme : des compétences accrues pour les chefs d’établissement, « notamment en ce qui concerne le pilotage pédagogique » et le choix de la seule réussite des élèves pour « guider les choix en matière d’organisation, face aux multiples contraintes ».  Par ailleurs, le rapport souligne que « le rôle des inspecteurs dans l’accompagnement des établissements est essentiel et pour cela il doit évoluer vers une fonction de conseil ». A cette demande d’accompagnement des enseignants et proviseurs s’ajoute une demande de formation.

Et les autres points de la réforme ?

Le tutorat « est encore à construire dans la majorité des lycées ». Quant aux « véritables projets culturels, [ils] sont assez rares dans les lycées, même si les référents culture sont désignés ». La vie lycéenne ne semble pas s’être développée à la rentrée 2010. Et le rapport indique que « les élèves ne sont pas toujours répartis en groupes d’activités langagières (dits de « compétences »), souvent reportés après janvier ». Luc Chatel a déclaré que « la réforme était en marche ». Longue sera la route.



Une mission de suivi sur 7 académies

Ce rapport est le fruit d’une mission de suivi conduite par des inspecteurs de l’IGAENR et del’IGEN dans un échantillon de sept académies, de novembre 2010 à janvier 2011. L’équipe a mené des entretiens avec les autorités académiques, a visité 36 lycées, a échangé avec les équipes de direction, les équipes pédagogiques, les élèves et a observé des séances d’enseignement d’exploration et d’accompagnement personnalisé.

Moyens : les lycées ont arbitré en faveur de la seconde

La réforme du lycée a-t-elle changé la répartition des moyens ? Selon le rapport des inspections générales, la grande majorité des établissements ont donné priorité à la nouvelle classe de seconde. Ils ont ainsi « dépensé » 41 heures de dotation par division en moyenne (contre 39 heures normalement) quand ils disposaient de marges de manœuvre. Certains sont même montés jusqu’à 46 heures. Pour la rentrée 2011, les inspections générales ont prévenu : « les marges de souplesse seront plus réduites » et « la conciliation des objectifs et des contraintes plus difficile ».

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