Universités-recherche-entreprises : le "triangle d'or" de la croissance britannique

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Universités-recherche-entreprises : le "triangle d'or" de la croissance britannique
A. Vaissié, cofondateur du Cercle // © 
Comment le système université-recherche-entreprise permet de créer des emplois en Grande-Bretagne et comment la France devrait s’en inspirer. Telle est en substance le contenu du quatrième rapport du cercle d’outre-Manche. Ce think tank composé de dirigeants français de grands groupes internationaux installés au Royaume-Uni dresse un portrait flatteur des universités britanniques et stigmatise a contrario la « sélection par l’échec » des universités françaises et une recherche mal valorisée.

Pour le cercle d’outre-Manche, la démonstration est faite. La recette anglaise de la création d’emplois – 4 millions de plus qu’en France à population équivalente - vient des universités qui ont su allier les 3 C pour cerveaux commerce et capital. Avec 25 ans de retard, la France serait sur cette voie avec la loi LRU. Le rapport intitulé Du « brain drain » au « brain gain », Le triangle d’or université, recherche, entreprise ou Comment le Royaume-Uni fait de l’université et de la recherche des acteurs clefs dans la création d’entreprises propose six mesures visant à remédier aux blocages de l’université française. L’inspiration est toute britannique et toute libérale.  

Sélection, marque et droits d’inscriptions  

Concernant les universités, les auteurs suggèrent de créer des pôles universitaires multidisciplinaires de 20000-25000 étudiants palliant l’éclatement des structures d’enseignement supérieur, de créer des « marques » permettant d’attirer davantage d’étudiants étrangers et en particulier asiatiques et de leur appliquer des droits d’inscription 100 fois plus élevés et de sélectionner les étudiants à l’entrée des études. « La sélection, en France, s’opère entre 15 et 18 ans. Si on est bon élève à cet âge, on est assuré d’aller en prépa et dans une grande école. Certains individus peuvent se révéler à 20 ans ou plus tard encore. Mais les universités françaises ne permettent pas de faire sortir les talents. Au nom de l’égalité, le nivellement s’opère par le bas », estime Arnaud Vaissié, co-fondateur du cercle d’outre-Manche et président de la chambre de commerce française en Grande-Bretagne.

Autre tare à corriger : le faible niveau d'anglais des Français. « L’anglais s’apprend beaucoup plus facilement quand on est jeune et faire carrière sans maîtriser cette langue équivaut à un suicide professionnel. Je me souviens d’une étudiante française d’Assas qui est partie étudier un an en Grande-Bretagne. Elle s’est retrouvée dans la plus mauvaise fac de droit britannique. De retour à Paris, elle y a décroché un poste dans l’un des plus grands cabinets d’avocats américains », témoigne Arnaud Vaissié.  

Flexibilité des chercheurs et business angels  

Pour les chercheurs, des contrats à durée déterminée seraient préférés au statut de fonctionnaire. « Les universités britanniques sont incitées à exploiter directement la propriété intellectuelle et les applications commerciales de leur recherche…ce qui explique peut-être qu’à position équivalente en matière de dépôt de brevets, les chercheurs britanniques sont bien plus souvent associés au capital de start-ups que leurs homologues français », souligne le rapport. Les subventions données aux créateurs d’entreprises technologiques en France – via Oséo notamment - sont également pointées du doigt par rapport au capital privé britannique qui permettrait de créer quatre fois plus d’emplois. Les chercheurs ne seraient pas suffisamment entreprenants pour lancer leur star-up et préféreraient en France commercialiser leurs brevets à des entreprises existantes faute d’incitations suffisantes. Les 30000 business angels britanniques – contre 4000 en France - font figure de clé du succès dans ces transferts de technologies.    

Le rapport note que la moitié des universités britanniques ont un incubateur contre un tiers en France et que 20% des entreprises britanniques ayant reçu des fonds de capital risque sont nées dans les universités. Une capitalisation particulièrement avantageuse dans le domaine des biotechnologies, où la Grande-Bretagne a pris de l'avance.   

Quel manager pour opérer cette révolution ?

« Le « bon » président d’université est donc celui qui saura le mieux valoriser et faire fructifier la recherche de son université en lien avec le marché et l’entreprise », résument les auteurs. Seul problème, les présidents d’université français sont curieusement absents des experts consultés par le think tank…Les établissements cités en exemple pour la France sont les écoles de commerce, l’INSEAD, Sciences Po Paris ou le pôle d’innovation GIANT à Grenoble.  

Les débuts de la valorisation en France

Dans les universités françaises, les services d’innovation se sont généralisés depuis la loi sur l’innovation de 1999. Une quinzaine de dispositifs mutualisés régionaux entre établissements ont aussi vu le jour. Une structuration émergente dans le monde des brevets encore très récente pour les établissements qui en sont à chercher de l’argent pour en déposer. « Les discussions avec les industriels sont difficiles : avant ils venaient se servir dans les laboratoires universitaires, maintenant ils nous disent « ce que vous produisez est encore loin d’être industrialisable », témoignait un expert de la valorisation au dernier salon de la recherche et de l’innovation de Paris.

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