Frédéric Mion : "Sciences po a assaini sa situation financière"

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Frédéric Mion : "Sciences po a assaini sa situation financière"
À la tête de l'établissement depuis mars 2013, Frédéric Mion l'assure : Sciences Po a assaini sa situation budgétaire. // ©  Gilles ROLLE/REA
Quatre ans après avoir pris les rênes de l'institut d'études politiques parisien, Frédéric Mion se veut rassurant sur la gouvernance et les finances de l'établissement. Une situation "apaisée", qui lui permet de poursuivre sereinement les projets d'aménagement de l'hôtel de l'Artillerie, la réforme du premier cycle et le renforcement de la communauté scientifique.

Frédéric Mion - Sciences po - ©Vincent BlocquauxIl y a quatre ans, vous étiez nommé à la tête de Sciences po dans un climat de scandale financier et de crise de gouvernance sans précédent. Quelle méthode avez-vous employé et quel bilan faites-vous de votre action ?

À mon arrivée, il y avait une forme de sidération collective, l’institution était comme figée. Il fallait remettre cette maison en mouvement, retrouver les conditions d’un fonctionnement collectif apaisé. Je ne sais pas si on peut parler de méthode, mais elle procède de la nécessité d’écouter les uns et les autres, de définir des structures de gouvernance modernisées, en s’appuyant sur le collectif.

Les réformes menées – celles des statuts, du premier cycle, la création de nouvelles écoles – ont, à chaque fois, associé toutes les parties prenantes. Enfin, j’ai veillé à m’entourer de talents et à m’appuyer sur les compétences de mes collaborateurs et collaboratrices.

Quelle est aujourd’hui la situation financière de Science po ?

Nous avons eu un contrôle de suivi de la Cour des comptes dix-huit mois après son rapport de novembre 2012. La situation budgétaire est assainie : nous avons dégagé des résultats financiers satisfaisants nous permettant de poursuivre nos projets et de reconstituer nos marges d’autofinancement.

Durant cette période, la part de la dotation globalisée du ministère de l’Enseignement supérieur dans nos ressources est passée de 52 % à 41 %. L’autofinancement repose sur les revenus du mécénat et de la formation continue, les droits d’inscription et le financement de la recherche sur projet.

Notre défi est de conforter notre place d’université de recherche de rang mondial.

Où en est le projet de réaménagement de l'hôtel de l’Artillerie, à Paris ?

L'opération représente un investissement, travaux compris, de 200 millions d’euros, financé à 80 % par la dette. En maintenant sa note A+, l’agence Fitch a montré que ce projet était soutenable.

Nous avions lancé un avis d’appel public à candidature. Le 12 mai 2017, nous avons retenu quatre des 19 candidatures déposées à la mi-mars, chacune étant constituée de promoteurs immobiliers, constructeurs et architectes. Dans les huit prochains mois, nous entamerons une discussion pour parvenir à un projet très avancé. Nous lancerons ensuite une consultation avant le choix définitif du projet en janvier prochain. Nous envisageons de commencer les travaux en 2018 pour y emménager à la rentrée 2021.

Cette démarche, qui consiste à créer un campus, ne peut pas être conduite en chambre. Des groupes de travail thématiques, associant enseignants, salariés et étudiants, seront mis en place : qu’est-ce qu’un campus urbain ? Qu’est-ce qu’un campus innovant ? Quelle expérience étudiante proposerons-nous ? Ces questions sont stratégiques et les réponses des groupes de travail serviront de recommandations aux quatre candidats finalistes.

Quelles sont vos priorités stratégiques dans les années à venir ?

Notre défi est de conforter notre place d’université de recherche de rang mondial, de réussir notre projet immobilier de l’Artillerie et la réforme du premier cycle, tout en renforçant nos liens avec le monde professionnel, en développant notre communauté scientifique, afin de conforter notre vision d’une institution qui a une responsabilité particulière sur le plan civique.

Quels sont vos projets pour renforcer l’ouverture sociale de Sciences po, dans la continuité de l’action de votre prédécesseur ?

Nous souhaitons, tout en s’assurant que les dispositifs instaurés par Richard Descoings poursuivent leur finalité, développer d’autres outils de façon à renforcer notre diversité sociale et à accompagner les élèves plus défavorisés vers l’enseignement supérieur. Nous avons ainsi lancé, pour les lycéens boursiers, un programme d’accompagnement sur nos campus en région, ayant lieu l'été ou pendant les petites vacances, avec un encadrement assuré par nos professeurs et des professeurs du secondaire. Nous testons ce programme à Reims avec une soixantaine de lycéens boursiers.

Ces élèves issus de la procédure CEP (convention éducation prioritaire) réussissent-ils leur cursus dans les mêmes conditions que les autres ?

Pour la première année et la deuxième année du collège universitaire, les taux d’échec des étudiants issus des procédures CEP sont de 2 à 3 points supérieurs aux taux d’échec des autres élèves.

En matière d’insertion professionnelle, nous ne notons pas de différence. La seule différence réside dans les choix d’orientation : ils s’orientent moins volontiers dans les filières d’affaires publiques.

Pour quelles raisons ?

Il y a une forme d’autocensure et des raisons économiques : quand vous avez fait des études longues, à un moment donné, vous avez besoin d’un retour sur investissement. Le secteur privé est plus lucratif que l'administration.

Aller plus loin :
- Lire la biographie EducPros de Frédéric Mion
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