Gilbert Béréziat (délégué général de Paris Universitas) : « Il faut simplifier radicalement la loi LRU »

Propos recueillis par Céline Manceau Publié le
Gilbert Béréziat (délégué général de Paris Universitas) : « Il faut simplifier radicalement la loi LRU »
23207-bereziat-gilles-original.jpg // © 
L’actuel vice-président des relations internationales à l’UPMC (université Pierre-et-Marie-Curie), Gilbert Béréziat, a présidé cette université de 2001 à 2006. Son mandat a été marqué par de profondes réformes, dont certaines préfigurent la loi LRU. Une loi votée un an trop tard... pour qu’il puisse se représenter. Il conserve cependant une oreille attentive auprès de son successeur Jean-Charles Pomerol, dont il est proche, et s’investit dans l’Opération campus, via ses fonctions de délégué général de Paris Universitas. Pour Educpros.fr, il revient sur son parcours.

Vous racontez comment vous êtes devenu président, mais vous ne dites pas pourquoi ?

Je n’ai jamais eu de plan de carrière. Pendant mes études de médecine, j’avais déjà renoncé à faire l’internat pour m’orienter vers la biologie. Je dirais même que j’avais « tout faux » pour être président. Moi, le fils d’ouvrier, ancien « anar »... Et finalement, l’accession à la présidence s’est avérée moins compliquée que d’être nommé professeur. J’ai du charisme, je connaissais beaucoup de monde, surtout au Snesup, et j’ai été le premier président de Jussieu à être élu après avoir dirigé un laboratoire.

Vous avez conduit de nombreuses réformes à l’UPMC. Avez-vous une méthode pour convaincre ?

J’ai de l’autorité, mais je ne suis pas autoritaire. Je suis assez adepte de la méthode gaulliste qui consiste à initier les réformes politiques et à penser que l’intendance suivra. C’est ce que nous avons fait pour le LMD. Mon université a été l’une des premières grandes universités à mettre en place cette réforme, prenant de vitesse le ministère. Il est dommage que les universités ne soient pas plus audacieuses, quitte à se faire rappeler à l’ordre par le gouvernement si elles franchissent les lignes.

Durant votre mandat, vous avez eu des rapports de force avec les syndicats : est-ce le quotidien d’un président ?

Comme j’avais réduit le nombre de conseils d’administration, ils étaient beaucoup plus denses avec des débats plus longs, mais essentiels. Mieux vaut une assemblée large avec des minorités qui s’expriment, plutôt que des conseils restreints, comme le veut la loi LRU. Le risque est de se retrouver avec une seule force d’opposition, beaucoup plus virulente, ou à l’inverse, sans opposition. Les syndicats doivent jouer leur rôle d’aiguillon. Au président de s’assurer les appuis nécessaires pour faire voter les décisions.

Que changeriez-vous à la loi LRU ?

Il faut la simplifier radicalement. La loi LRU ne devrait pas définir aussi précisément comment les universités doivent s’organiser. Cette question concerne directement les statuts de chaque établissement, en fonction de ses objectifs de recherche et de formation qui ne sont pas les mêmes pour tous. La loi Pécresse ne laisse aucune place à la diversité. Et la loi Goulard est encore pire. Les PRES ont été corsetés par l’État.

Quelles sont les qualités indispensables d’un président d’université ?

Il doit avant tout être paranoïaque. Il faut qu’il soit en permanence sur la défensive pour détecter ses alliés et ses ennemis, parmi les grandes écoles ou au gouvernement. Mais il ne doit pas être un paranoïaque solitaire, il doit s’avoir s’entourer. Il faut aussi qu’il ait de l’ambition, à la fois pour lui et pour son établissement. Et mieux vaut aussi qu’il soit persévérant et n’ait pas besoin de beaucoup de sommeil !

Votre mandat a été marqué par l’épisode de la motion Palestine. Est-ce votre principal regret ?

Même si j’ai été à deux doigts de démissionner, je maintiens que nous avons eu raison de prendre position. Je n’ai donc pas de regrets, seulement un remords. Sur la méthode. J’ai été pris au dépourvu. Je n’avais pas compris qu’un mouvement de boycott des universités israéliennes avait été lancé depuis plusieurs mois au sein de grandes universités américaines, je ne savais pas que notre directrice de la recherche était en train de négocier le renouvellement de notre accord de coopération franco-israélien. Enfin, j’ignorais qu’une même motion avait été déposée à Paris 7, mais que la discussion avait été renvoyée. C’est de ce défaut d’informations que m’est apparue la nécessité de créer un service des relations internationales.

De quelles actions êtes-vous le plus fier ?

Avant mon arrivée, l’UPMC était l’université la plus grosse et la plus riche. Elle était jalousée. Aujourd’hui, elle est enviée. Et je suis fier du double cursus que nous avons mis en place avec Sciences po, qui nous a permis à la fois d’amener à l’université des bacheliers avec mentions et de développer des actions auprès de lycées situés en ZEP.

Gilbert Béréziat est l'auteur de "Quand l’université se réveille, tout devient possible", L’Harmattan, octobre 2008. Il vient aussi de lancer son blog .

Propos recueillis par Céline Manceau | Publié le