Jean-René Fourtou (président de la fondation Bordeaux Université) : "Les universités ont des capacités de veille et de recherche que n'ont pas les grandes écoles"

Propos recueillis par Olivier Monod Publié le
Jean-René Fourtou (président de la fondation Bordeaux Université) : "Les universités ont des capacités de veille et de recherche que n'ont pas les grandes écoles"
Jean-René Fourtou // © 
Jean-René Fourtou est président du conseil de surveillance de Vivendi et président de la fondation Bordeaux Université. Cet ancien polytechnicien découvre avec enthousiasme les avantages du milieu universitaire sur celui des grandes écoles en termes de fundraising. Il est l’invité de marque de la VI sup>e Conférence de fundraising pour l’enseignement supérieur et la recherche (9-10 février 2011).

Quels sont les atouts d'une fondation d'université face aux fondations des grandes écoles ?

Il est beaucoup plus facile pour les entreprises de créer des partenariats avec les universités qu'avec les grandes écoles. Ces dernières demandent de l'argent et c'est tout. Mais donner pour donner est une approche très limitée. Les universités ont des capacités de veille et de recherche que n'ont pas les grandes écoles. Il y a plus de possibilités de partenariats concrets.

Quand j'étais président de Rhône-Poulenc, nous n'avions des partenariats scientifiques qu'avec des laboratoires d'universités. Il y a très peu de recherche proprement dite dans les écoles. Cela dit, les grandes écoles profitent d'un réseau d'anciens très fort sur lequel les universités ne peuvent s'appuyer. Nous nous adressons à un public moins ciblé et moins identifié.

Avec l'autonomie des universités et la présence des grandes écoles, les fondations se retrouvent en concurrence pour attirer les entreprises. Quels sont les arguments à mettre en avant ?

Plus on a de projets, plus on a d'argent. En arrivant à Bordeaux, j'ai dit : « Donnez moi des projets, je vous trouverai de l'argent. » Quand je fais du fundraising, je passe plus de temps à mettre en place des projets qu'à lever des fonds ! Ma volonté est d'ouvrir l'université à la société.

L'université est désireuse de cette ouverture. Nous avons ainsi organisé des stages d'étudiants en lettres dans des PME. Il a fallu convaincre les deux parties, mais au final la rencontre a été très enrichissante. Nous avons eu de la médiatisation sur cette initiative et nous avons donc pu lever des fonds.

La communication doit être permanente. Il faut faire redécouvrir au monde une université qui était historiquement fermée sur elle-même. Grâce à ces nouveaux liens, nous mettons en place des partenariats effectifs de recherche et des chaires adaptés aux besoins des entreprises environnantes.

Pourquoi avez-vous décidé de vous investir dans une fondation universitaire ?

L'université vit un instant historique avec l'autonomie. J'ai été séduit en découvrant des présidents d'université entreprenants, dynamiques et ouverts sur l'extérieur. De plus, des sommes considérables vont être dépensées dans le cadre du Plan campus et du grand emprunt. Le moment est donc très intéressant ! Si l'on n'accompagne pas ce mouvement maintenant, quand le fera-t-on ?

Pour un ancien de grande école comme vous, vous avez découvert une nouvelle culture ?

Je trouve les universitaires plus aériens. Mes collègues d'écoles sont des bêtes de travail, mais le bachotage ne favorise pas forcément l'épanouissement des caractères. Dans l'industrie, on demande de l'imagination et de l'initiative. Au final, le caractère nous intéresse plus que les savoirs. Les deux systèmes forment des éléments brillants. Il faut savoir repérer la crème, même si elle ne se situe pas forcément dans la tête de classe.

Propos recueillis par Olivier Monod | Publié le