Valérie Piau (avocate) : « Droits de l’élève : les parents ne souhaitent pas aller jusqu’au contentieux »

Propos recueillis par Sophie de Tarlé Publié le
Que faire quand les cours ne sont pas assurés ? Mon enfant s’est fait casser la figure, que faire ? Comment contester une décision d’orientation ? À la demande de ses clients – des parents d’élèves –, souvent démunis face aux problèmes liés à l’école, Valérie Piau, avocate (1), s’est plongée dans les arcanes de l’éducation afin de mieux faire connaître les droits de l’élève. Un sujet d’actualité à l’heure où la réforme sur les sanctions à l’école doit entrer en vigueur le 1er septembre 2011. Un ouvrage (2) qui devrait également intéresser les enseignants car, bien souvent, leur responsabilité est engagée.


Les parents portent-ils davantage plainte qu’auparavant ?

Les plaintes des parents au niveau pénal restent très marginales. En quinze ans, je n’en ai eu qu’une poignée. En réalité, la plupart d’entre eux ne souhaitent pas du tout aller jusqu’au contentieux. Ils sont par contre de plus en plus nombreux à souhaiter faire valoir leurs droits. Ils sont souvent désemparés lorsque quelque chose qui leur paraît anormal arrive à leur enfant. Ils ne savent pas quoi faire, à qui s’adresser. Ils ont aussi souvent peur d’agir, par crainte que leur enfant devienne le bouc émissaire de l’enseignant. En réalité, c’est tout le contraire qui se passe. En envoyant une lettre circonstanciée – que je mets en modèle dans le livre – où l’on rappelle les faits et la loi, dans la plupart des cas, la situation se dénoue. Et l’on parle alors d’un malentendu.

En quoi ce livre peut-il servir aux professeurs ?
Je veux tout de suite rassurer les enseignants pour leur dire que ce livre n’a pas été fait contre eux. L’objectif est plutôt de pacifier les rapports entre les élèves et les professeurs. En sachant exactement ce qu’ils ont droit de faire ou non, les enseignants seront plus à l’aise face aux parents et aux élèves. En réalité, c’est tout bénéfice pour les enseignants. Car, face à une sanction injuste, illégale, se développe un sentiment d’injustice. Et il s’en suit bien souvent des problèmes de violence déjà dénoncés dans le rapport d’Alain Bauer , remis en mars 2010 au ministre de l’Éducation nationale. C’est d’ailleurs suite à cette étude que Luc Chatel a souhaité une réforme sur les sanctions à l’école.

Pensez-vous que les enseignants soient assez formés ?
Le rapport d’Alain Bauer montrait que beaucoup d’éléments du Code de l’éducation, qui date de 2000, ne sont pas appliqués. Ainsi, alors que cela fait dix ans que copier des lignes est interdit pour sanctionner les élèves, beaucoup d’enseignants continuent d’en demander. Les enseignants n’ont plus le droit de mettre de zéro pour une absence ou une indiscipline, ni de baisser la note. Peu d’entre eux savent également qu’on ne peut pas mettre un jeune à la porte dans le couloir sans prévoir une prise en charge par un surveillant ou un enseignant. Et, pourtant, ce sont des pratiques encore très courantes.

(1) www.cabinet-piau.fr.
(2) Les Droits de l’élève (François Bourin éditeur), 19 €.

Propos recueillis par Sophie de Tarlé | Publié le