L'autre déclin de l'empire américain

Emmanuel Davidenkoff Publié le
L'autre déclin de l'empire américain
Le campus de Harvard // ©  Emmanuel Vaillant
Tout invite les universités américaines à inventer d'urgence des solutions innovantes et, pour les rentabiliser, à les diffuser à l'étranger. La chronique d'Emmanuel Davidenkoff, directeur de la rédaction de L'Etudiant.

L'enseignement supérieur américain et, à sa suite, mondial est à l'orée d'une brutale "ubérisation" - l'irruption, comme sur le marché du transport de personnes avec Uber, d'un acteur suffisamment "disruptif" pour bouleverser les règles du jeu et ébranler les monopoles les mieux établis.

C'est la thèse que déploie Ryan Craig, dans un ouvrage récemment paru aux Etats-Unis [College Disrupted. The Great Unbundling of Higher Education. Palgrave Macmillan, mars 2015]. Elle mérite attention, non seulement car elle bat en brèche bien des idées reçues sur l'université américaine, mais surtout parce que ses effets pourraient nous affecter plus vite que prévu.

Un arbre luxuriant cache une forêt dévastée

Les idées reçues, pour commencer. La première tient à la réputation d'excellence des établissements américains, portée notamment par le célèbre classement de Shanghai, dont les 20 premiers rangs sont colonisés par les universités états-uniennes, au nombre de 16, dont le MIT, Harvard, Stanford, Berkeley, Princeton, etc. Or ces dernières appartiennent au cercle très restreint des établissements dits "de recherche", qui ne représente pas plus de 1% de l'enseignement supérieur américain.

Cet arbre luxuriant cache une forêt dévastée : si 90% des étudiants de ces facs d'élite obtiennent leur diplôme, 55% de leurs homologues jettent l'éponge, dans le reste des universités du pays, avant d'obtenir le précieux parchemin - un taux d'abandon qui monte à 71% dans les filières courtes. La norme, sur un campus américain, est l'échec, pas la réussite.

La deuxième idée reçue découle de la première : hypersélectives et riches à milliards, les universités d'élite imposent au marché l'onéreux règne des "4 R" - Research (recherche), Rankings (classements), Real estate (immobilier) et Rah! (sports) -, régime qui est en train de ruiner un système que l'on croit florissant. Pour se conformer à ce modèle, des centaines d'établissements se sont en effet lancés dans une course aux équipements et au recrutement de sportifs de haut niveau, qui a conduit à une augmentation de 600% du coût des études entre 1980 et 2010.

La conséquence est connue : avec 511% d'augmentation depuis 1999, le montant de la dette étudiante américaine avoisine 1 300 milliards de dollars, et dépasse celui des encours des cartes de crédit. Or, selon Ryan Craig, aucun de ces investissements n'est directement consacré à la réussite académique des étudiants !

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