France Business School : un projet ambitieux semé d'embûches

Jessica Gourdon Publié le
France Business School : un projet ambitieux semé d'embûches
l'ESC Amiens // © 
Cinq campus et un budget de 65 millions d’euros. Telle est la carte de visite de France Business school, nouvelle école de commerce issue de la fusion de quatre établissements, et qui devrait voir officiellement le jour au 1er janvier 2013. Un projet d'ampleur pour lequel les obstacles à franchir sont encore nombreux.

Toujours plus gros, toujours plus fort ? Le projet de fusion de quatre écoles de commerce (ESC Amiens, Brest, Clermont et Escem Tours-Poitiers), présenté à la presse le 22 mai 2012, vise à créer un acteur de poids dans le système des grandes écoles de commerce.

France Business School (FBS), qui devrait exister officiellement au 1er janvier 2013, rassemblera 7 000 élèves, 600 salariés dont 170 professeurs permanents. Son réseau d’anciens rassemblera 30 000 diplômés.

Avec de tels chiffres, cette nouvelle école se positionnera comme l’une des plus grosses écoles de commerce en France. Son budget de 65 millions d’euros la placera en 4e position, derrière HEC, l’Essec et l’ESCP Europe, et devant l’EM Lyon. Avec 103 enseignants docteurs, elle se situerait, là encore, dans le « top 5 ». Dans le palmarès Educpros 2012 consacré à la recherche dans les business schools (basé sur le nombre de publications académiques « étoilées »), FBS arriverait 6e, égalité avec l’ESCP Europe.

Cette croissance ne devrait pas s’arrêter là : si France Business School a perdu, au début du mois de mai, l’un de ses partenaires (l’ESC Pau), elle est déjà en discussion pour agréger deux ou trois nouveaux membres. « L’idée serait d’arriver à un ensemble de 100 millions d’euros de budget et de 10 000 étudiants », avance François Duvergé, président de l’Escem et initiateur du projet.

Pédagogie : « revenir aux fondamentaux de la grande école française »

"Le modèle dominant de la business school qui mise tout sur l’académique nous semble dépassé" François Duvergé 

Côté pédagogie, FBS entend « revenir aux fondamentaux de la grande école française ». « Le modèle dominant de la business school qui mise tout sur l’académique, avec un développement massif du corps professoral permanent, nous semble dépassé, insiste François Duvergé. Dans cette course, les grandes écoles ont eu tendance à perdre leurs spécificités, à savoir la pédagogie, l’accompagnement personnalisé, les soft skills, le lien intense avec les entreprises, l’équilibre entre théorie et pratique. »

Sans vouloir pour autant retourner à l’époque où les cours étaient assurés exclusivement par des professionnels, FBS veut « revaloriser la pédagogie », et veut s’inspirer des « Compagnons du devoir » (apprentissage via le voyage, la communauté, la réalisation de projets, parrainage par des professionnels). 

Au-delà des cours gestion, FBS proposera des enseignements de sciences politiques, sciences humaines et sociales, culture scientifique, design et art.

L’école veut aussi changer la manière d’apprendre, et entend s’appuyer sur les réseaux sociaux et les nouvelles technologies (classes virtuelles, simulations, e-learning, etc.). « L’ère du teaching est révolue, l’ère du co-learning s’ouvre », prédit François Duvergé.  

Recrutement : vers un concours post-bac

A partir de la rentrée 2013, FBS offrira un programme grande école unique sur tous ses campus, via un concours commun. L'école précisera à la rentrée 2012 dans quelles banques d’épreuves elle se positionnera (BCE, Ecricome, Passerelle, Tremplin…). Les étudiants admis formuleront des voeux de campus, et seront affectés selon leurs résultats. 

FBS veut aussi diversifier son recrutement, attirer davantage d'étrangers, et de profils passés par l’université.

Les responsables planchent également sur la création de classes préparatoires intégrées au programme grande école, ou d’un double niveau d’entrée bac et bac +2 (BTS, DUT, classes prépas classiques), comme le fait l’EM Normandie.

Mais si le programme grande école sera unifié, les bachelors (cursus en trois ans post-bac) resteront spécifiques à chaque site, les étudiants venant avant tout de la région. Quants aux mastères spécialisés et MBA, ils seront peu à peu harmonisés.

Un parcours semé d'embûches

Reste qu'avant sa mise sur orbite, France Business School devra surmonter un certain nombre d'obstacles. Tout d'abord, arriver à "remplir" ses promotions, alors que plusieurs de ses composantes (ESC Clermont, ESC Brest, ESC Amiens) n'ont pas fait le plein lors des derniers concours, et se sont retrouvés avec de nombreuses places vacantes. 

Les écarts de niveau perçus entre les campus, reflets des classements (voir ici celui de l'Etudiant ), et la création d'une hierarchie interne, seront un autre  problème. « Certes, au début, les campus resteront marqués par leurs images anciennes. Ce fut le cas à l'Edhec entre Lille et Nice, à l'Escem entre Tours et Poitiers. Mais cela va s’estomper quand les étudiants verront qu’ils auront tous le même diplôme, qu’ils suivront la formation, et qu’ils pourront passer d’un campus à l’autre », assure François Duvergé.

En outre, les écoles de FBS devront s'occuper du passage du personnel sous statut consulaire à statut de droit privé. La nouvelle direction devra également gérer la gestion de plusieurs sites à distance, la redéfinition des missions des ex directeurs devenus "directeurs de campus", les différences de culture entre les sites... Et enfin, résoudre la question des accréditations (l'Escem et l'ESC Clermont sont accréditées AACSB, les autres non). Du pain sur la planche !

Pour plus de détails, sur la gouvernance, le projet pédagogique et les ambitions de FBS, consultez le dossier de presse .

Gouvernance : « une construction à parité »
FBS sera une association dirigée par Patrick Molle, et présidée par Isidore Fartaria, président de la CCI de Clermont-Ferrand, PDG de la société Titel (produits chimiques destinés aux artisans). Le directeur sera basé à Paris, dans les locaux de l’Escem (tour Montparnasse) aménagés à cet effet.
Chaque école sera représentée à parité dans l’assemblée générale (4 représentants par membre) et dans le conseil d’administration. « Il n’y aura aucune absorption d’une école par une autre », assure François Duvergé.

Une conférence de presse….sans le directeur de FBS.
Patrick Molle, actuel directeur général de l’EM Lyon, a été nommé directeur de FBS il y a plusieurs semaines. C’était pourtant le grand absent de la conférence de presse de ce 22 mai, organisée au Crillon.  En introduction, Isidore Fartaria s'est empressé de justifier cette absence étonnante : "Patrick Molle est encore rémunéré par son employeur, c'est ce qui explique son absence aujourd'hui".

Jessica Gourdon | Publié le