Comment l’Auvergne a créé son campus des métiers et des qualifications

Cécile Peltier Publié le
Vincent Peillon et Arnaud Montebourg ont lancé, le 14 octobre 2013, les "campus des métiers et qualifications". Définis comme des "regroupements d'acteurs de la formation professionnelle autour d'une thématique industrielle qui a du sens au niveau régional", douze projets ont été labellisés par le gouvernement. Parmi eux, celui de l'Auvergne qui ouvrira à la rentrée 2014 le deuxième "Aerocampus" de France après celui d'Aquitaine. Un complexe qui fédère emploi, formation et recherche et dédié à la maintenance aéronautique, secteur d’avenir en manque de bras.

Après deux ans et demi de travail, la région Auvergne va créer son "Aerocampus des métiers et des qualifications". Mise en service prévue en septembre 2014. Objectifs : fédérer l'ensemble des acteurs de la formation et de la recherche et les entreprises aéronautiques de la région autour d'une marque et créer des synergies.

Le concept, emprunté à l'Aquitaine, détentrice d'un premier Aérocampus ouvert en 2011, rencontre la volonté récente de l'État de labelliser un campus des métiers et des qualifications par région.
Côté Auvergne, toutefois, l'idée portée avec le rectorat, le lycée Roger-Claustres et l'IFMA (Institut français de mécanique avancée) est dans les cartons depuis quelque temps. "Nous n'avons pas attendu l'appel à projet du ministère de l'Éducation nationale, remarque le président (PS) de la région, René Souchon. Il y a deux ans déjà, nous avions spécialisé l'un de nos lycées [Roger-Claustres]. Mais l'Aquitaine a été la première à déposer le concept d'Aerocampus. Le projet bordelais correspondant parfaitement à ce que nous voulions faire, nous nous sommes rapprochés d'eux et avons signé le 19 juin un partenariat de cession pour utiliser le concept et la marque déposée avec leur assistance."
"Concrètement, précise Jérôme Verschave, directeur général d'Aerocampus Aquitaine, on les aide à développer le projet et, en entrant dans la gouvernance, on vérifie que ce que fait Aerocampus Auvergne est en adéquation avec nos valeurs."

En pleine santé à l'échelon international, l'aéronautique a été proclamée priorité régionale par la région des volcans. Avec pas moins de 96 entreprises (AIA-DGA, Michelin, Safran...), spécialisées essentiellement dans le travail des métaux, des matériaux composites, la maintenance et les activités d'électronique et de câblage, l'Auvergne est la 5e région en matière d'aéronautique. La filière représente en effet 11.000 emplois et un chiffre d'affaires de 1,2 milliard d'euros en 2012.
"De l'ouvrier qualifié au responsable de production, il y a d'énormes besoins de main d'œuvre qualifiée et spécialisée non satisfaits", affirme René Souchon, qui compte aussi sur la reprise d'Auvergne Aéronautique par ACE, pour pérenniser et développer l'emploi du secteur. "La fonderie Aubert&Duval ou Constellium, à Issoire, sont en pénurie constante. Airbus a beaucoup d'entreprises sous-traitantes à Clermont qui nous supplient depuis longtemps de développer les formations", poursuit l'élu. Or, beaucoup de formations existantes sont "vides", reconnaît-il.

L'Auvergne est la 5e région en matière d'aéronautique

"Les chaudronniers ne font plus de chaudrons..."

Une désaffection imputée par cet ancien conseiller psychologue d'éducation à la mauvaise information des jeunes, des familles et des en­seignants et, plus globalement, à un système d'orientation par l'échec. "Quand vous parlez à un prof de troisième, il ne sait pas ce qu'est un chaudronnier... Ils ne font plus de chaudrons depuis longtemps ! Les chaudronniers travaillent sur la cellule mécanique des avions chez Airbus, avec des salaires importants à l'embauche. Il est urgent d'améliorer l'information sur ces métiers ", ajoute-t-il.

Redonner visibilité et image de marque à ces formations sera la mission de l'Aerocampus. Sur le modèle de son précurseur, il fédérera en effet sur un même site : formation initiale du CAP au doctorat en maintenance civile et militaire, mécatronique et matériaux et ensembles mécaniques ; formation continue, entreprises et laboratoires de recherche. Un réseau articulé autour du lycée Roger-Claustres qui accueillera à la rentrée le BTS aéronautique.
Début juillet, la région a posé à côté de l'aéroport d'Aulnat la première pierre du futur centre de formation, symbole de ce nouveau campus.

À Bordeaux, après deux ans d'activité sur un bassin d'emploi "plus marqué par la culture aéronautique" (Aero­space Valley), le campus récolte déjà les fruits de son travail de communication sur ces métiers : "La première année, nous avions 85 élèves, dont beaucoup de jeunes qui avaient été refusés ailleurs. Cette année, on atteint huit demandes pour une place", se félicite Jérôme Verschave.

L'Aerocampus d'Aquitaine INNOVE
Jérôme VerschaveEn 2010, la Région rachetait le centre de formation aéronautique de la DGA à Latresne (Gironde) pour le transformer en campus "international" dédié à la maintenance aéronautique : "Il y a aujourd'hui 18.000 avions civils, il y en aura 25.000 dans 4 ans et on a plus besoin de mécaniciens que de pilotes", résume Jérôme Verschave. L'association qui gère la structure comprend des organismes de formation, des industriels, des écoles et des universités. Centre de formation initiale et continue, le site accueille aussi des séminaires d'entreprises. "Nous sommes passés de 85 à 220 élèves, sans compter les 12.000 personnes reçues pour des formations techniques et du campus Entreprises."

Crédit photo : Alban Gilbert
Les 12 campus des métiers et des qualifications labellisés par thématique

- Aéronautique : Aquitaine, Auvergne, PACA, Pays-de-la-Loire
- Travaux publics : Nord-Pas-de-Calais
- Energie : Basse-Normandie ( industrie des énergies), Haute-Normandie (énergie et efficacité énergétique), Lorraine (énergie et maintenance), Rhône-Alpes ("Grenoble énergie campus" : énergies renouvelables), Languedoc-Roussillon (habitat, énergies renouvelables et éco-construction)
- Plasturgie : Rhône-Alpes ("Plasticampus"), Picardie (métallurgie et plasturgie)

Pour en savoir plus, consulter le site du ministère de l'Education nationale.
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