Philip Cordery, député des Français du Benelux : "La France ne forme pas assez de professionnels de santé"

Propos recueillis par Virginie Bertereau Publié le
Philip Cordery, député des Français du Benelux : "La France ne forme pas assez de professionnels de santé"
Philip Cordery, député des Français du Benelux © Assemblée nationale // © 
Alors que les préprojets sur les expérimentations en PACES (première année commune aux études de santé) doivent être remis à Geneviève Fioraso le 4 octobre 2013, des députés français ont décidé de s’attaquer au numerus clausus. Parmi eux, Philip Cordery, député des Français du Benelux. Témoin des flux d’étudiants en santé qui existent entre la France et la Belgique, il s’explique.

Que pensez-vous du numerus clausus en PACES ?

Le numerus clausus n'est pas du tout adapté aux besoins médicaux en France. Le pays ne forme pas assez de praticiens. On le voit au pourcentage d'étudiants français des filières médicales, paramédicales et vétérinaires qui partent étudier à l'étranger et reviennent s'installer une fois diplômés. Ce pourcentage s'élève à 85%. En 2012-2013, 11.541 jeunes Français sont venus se former en Belgique : l'équivalent de l'effectif d'une université.

Quelle est la politique actuelle de la Belgique ?

Pour préserver ses professions de santé, la Belgique maintient des quotas de non-résidents dans un certain nombre de filières. Par exemple, on ne peut pas dépasser les 30% en orthophonie, sage-femme ou vétérinaire. Le pays compte comme non-résident toute personne qui y habite depuis moins de quinze mois.

J'ai rencontré des jeunes Français venus s'installer en Belgique un an auparavant, qui vivaient parfois de petits boulots, pour gagner leur statut de résident. Cette stratégie de contournement de la PACES – qui peut se révéler aussi une piste de réorientation – pose des problèmes sociaux liés aux études à l'étranger (logement à payer, absence d'aides sociales, etc.). Mais cela ne fait pas perdre plus de temps qu'une année de prépa privée en France.

En 2012-2013, 11.541 jeunes Français sont venus se former en Belgique : l'équivalent de l'effectif d'une université

Quels sont les freins à l'augmentation du nombre d'étudiants en santé ?

Former plus d'étudiants ne signifierait pas produire des chômeurs. Il y a du travail pour tout le monde. L'argument de l'abaissement du niveau n'est pas non plus recevable : quand on voit le nombre de professionnels formés à l'étranger, dont la France ne contrôle pas la formation...

Reste la question des stages. Sur ce point, nous n'avons pas de propositions toutes faites. Avec Philippe Baumel, député de Saône-et-Loire dont la circonscription est de plus en plus touchée par la désertification médicale, et d'autres parlementaires, nous allons réfléchir à des alternatives au numerus clausus. Nous ferons des propositions au gouvernement d'ici trois ou quatre mois.

Que pensez-vous de l'ouverture d'antennes d'établissements privés étrangers en France ?

Ce n'est pas une bonne idée, mais cela pointe du doigt le même problème du manque de places dans les filières santé. Certains étudiants ont vraiment l'envie, la passion de travailler dans ce secteur. Ces établissements privés jouent avec cela, en profitent pour demander des frais d'inscription scandaleux.

Propos recueillis par Virginie Bertereau | Publié le