Des nouvelles de la planète MOOC : de la constance d'étudier – ou comment perdurer dans son univers d’étudiant connecté

Laura Maclet Publié le
Des nouvelles de la planète MOOC : de la constance d'étudier – ou comment perdurer dans son univers d’étudiant connecté
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La seconde édition du MOOC "ABC de la gestion de projet" a débuté mi-septembre 2013. Parmi les 8.000 participants inscrits à cette formation qualifiante, Laura Maclet, une jeune professionnelle en gestion de projet, qui relate sur EducPros son expérience d'e-apprenante. Malgré sa motivation, elle se retrouve très vite confrontée au problème de la gestion du temps et de l'assiduité, difficulté inhérente au fait de suivre un cours en ligne seul chez soi. C'est ce qu'elle explique dans son second billet, qui l'amène à poser la question des méthodes d'apprentissage.

Laura MacletAux alentours du 27 septembre

Inscrite à la seconde édition du MOOC "ABC de la gestion de projet" conçu par Rémi Bachelet, j'entame la deuxième semaine de cours en poursuivant mon "double objectif" : me former aux bases de la gestion de projet et acquérir le certificat classique de l'École centrale de Lille.

Arrivée à la fin de la première semaine, je réalise avec stupeur que je ne me suis pas encore penchée sur les cours du module 2. J'ai en effet laissé filer la semaine, happée comme tant d'autres par la frénésie des journées et soirées déjà planifiées. J'entre alors au cœur d'un processus sournois que l'étudiant connaît bien : la culpabilité de ne pas travailler entraînant le non-courage de "s'y (re)mettre". Aux marges de la procrastination, je me connecte à la plate-forme Unow.

Décidée à ne pas être "no show", je repense à la gestion du temps de travail annoncé par le professeur au démarrage du MOOC – deux heures hebdomadaires pour le certificat classique – et qui est donc aussi et bien sûr soumise à l'autodiscipline. Je me rappelle simplement que le simple cadre posé du cours, déjà très structurant, ne suffit pas à être efficient. À mon inscription, et en entamant le premier module, je songeais à la logique du menu... C'est désormais à celle de la discipline que je m'arrête. La méthode, la volonté ne suffisent pas. Il faut également savoir gérer son temps.

La méthode, la volonté ne suffisent pas. Il faut également savoir gérer son temps.

Je me demande si la gestion du temps est une évidence – et si ce n'est pas, surtout, une compétence. Convaincue que je pourrai rattraper les chapitres en retard en mettant en œuvre mes "stratégies personnelles d'apprentissage" (ne pas regarder une vidéo entièrement, passer tout de suite au questionnaire) pour reprendre ultérieurement les contenus – formidable initiative de Rémi Bachelet de proposer son cours en Creative Commons –, je bénéficie par ailleurs du plan détaillé du module hebdomadaire qui me permet d'appréhender de manière synthétique la progression des notions à assimiler. Et donc, de m'y préparer.

Je me rassure en transformant mon retard en une formidable occasion de travailler ma "zone proximale de développement", concept développé par Lev Vygotski(1), qui consiste à acquérir un savoir, une compétence ou une notion non maîtrisée par le biais de l'accompagnement d'une personne experte, et dans un apprentissage collaboratif.  Comme si viser un peu trop haut, mais ensemble, permettait en quelque sorte d'avancer.

En me confrontant à ce que je ne sais pas encore, j'obtiens "l'assurance" de ne pas être seule à ne pas être en complète maîtrise, au regard de messages sur les FAQ et les réseaux sociaux.

Ainsi, grâce au parcours et au cadrage didactiques impulsés par le professeur, fluidifiés par l'ergonomie de la plate-forme Unow et "solidifiés" par les questionnaires immédiats à passer après chaque module, je reprends mon souffle, je rattrape mon retard, et j'exploite le cours.

Mais je m'interroge quant à mon début de semaine inactif et cette "reprise en main pédagogique".

Un MOOC est assimilable à une véritable petite fourmilière éducative, avec une répartition des rôles bien définie

Actuellement, au cœur du développement des MOOC se pose la récurrente question de l'assiduité réelle de l'étudiant. Pour cela, des solutions servant à établir son identité sont à l'étude – dont le fameux typing pattern qui consiste à vérifier l'identité par la frappe de l'étudiant sur son clavier.

Au centre de cette réflexion sont explorés les "indicateurs d'usage" – tel le nombre de clics de souris ou de vidéos regardées – qui permettent aussi d'identifier les étudiants actifs, qui à leur tour sont en mesure d'assurer des tâches encadrantes. Je me dis qu'un MOOC est assimilable à une véritable petite fourmilière éducative, avec une répartition des rôles bien définie.

Vérifier l'identité et repérer les usages à des fins encadrantes et éducatives, donc. Mais comment impulser, anticiper, garantir la mise en œuvre du travail d'apprendre – celui-là même qui demande à l'élève en présentiel de se présenter en classe pour recevoir et assimilier des contenus, grâce à une régularité nécessaire et imposée ?

L'émergence et le développement des MOOC garantissent un accès à la formation et au savoir grâce à la gestion de son temps, au sein d'un cadre didactique donné, mais n'élude pas la question du "savoir travailler", qui consiste à trouver ses ruses d'apprenti-étudiant.

L'accès à l'éducation en ligne ne pallie peut-être pas encore complètement l'inégalité d'accès au savoir : un MOOC est en effet ouvert à tout le monde – mais est-ce que tout le monde peut s'en emparer ?

Suivre un MOOC requiert finalement un moteur identique à suivre puis réinvestir un cours en présentiel : la méthode – sa méthode. La plus-value d'un MOOC se situe bien toutefois dans la possibilité de rejouer le cours, mais ce n'est pas tout. Il faut être en possession de ses clés méthodologiques – et ce "joker" pédagogique est personnel : il se construit à l'école, mais aussi dans l'implicite, grâce au contexte familial et social, qui forge aussi les représentations et les habitudes.

Le dimanche 29 septembre : fin du module 2

Il s'en est fallu de peu pour être "no show", cette semaine.

En souriant, je découvre le post de ma grand-mère (82 ans) qui, sur Facebook, partage son retour sur le cours que je suis et que j'ai partagé sur mon mur : "Top ton lien vers le MOOC  […] merci et du coup, j'apprends !"

L'éducation partagée en ligne répond à la première promesse d'un rêve éducatif : tout le monde peut, à tout âge, apprendre. La méthode reste néanmoins un défi à explorer dans cet univers encore expérimental.

(1) Lev Vygotski (1896-1934), psychologue biélorusse, auteur notamment de Pensée et langage, 1933.

Pour en savoir plus
La home page du MOOC.
Le site de Rémi Bachelet : tous les cours du MOOC y figurent et sont en Creative Commons.
Une carte heuristique sur tout ce que contient le MOOC (auteur : Xavier Pigeon).
Le fil twitter #MOOCGdP.
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