Apprentissage : menaces sur la rentrée 2013 ?

Sandrine Chesnel Publié le
Le gouvernement a annoncé, le 17 juillet 2013, une économie de 550 millions d’euros sur les dispositifs de soutien à l’embauche des apprentis, dans le cadre de mesures de simplification et de modernisation de l’État. Une annonce mal accueillie par les acteurs de l’apprentissage, qui redoutent une rentrée difficile. Face à la fronde, le gouvernement a fait savoir le lendemain que la prime supprimée serait remplacée par une aide pour les très petites entreprises.

Multiplier par deux le nombre d’apprentis dans les universités, c’est l’objectif affiché depuis plusieurs mois par la ministre de l’Enseignement supérieur, Geneviève Fioraso, objectif conforté par la volonté du président de la République de porter le nombre d’apprentis à 500.000 dans les trois ans, contre 408.000 aujourd’hui.

Un objectif qui pourrait être mis à mal par l’une des mesures de simplification et de modernisation de l’État annoncées le 17 juillet 2013 par le CIMPA (Comité interministériel pour la modernisation de l'action publique). Est notamment prévue une économie de 550 millions d’euros sur les dispositifs de soutien à l’embauche des apprentis.
Une mauvaise nouvelle pour les établissements qui privilégient l’alternance ? Frédéric Toumazet, vice-président enseignements et professionnalisation à l’université Paris-Est Marne-la-Vallée (20% d’apprentis), reste prudent dans l’attente d'informations plus précises, mais redoute malgré tout un impact négatif sur la rentrée : "Dans notre université, nous travaillons main dans la main avec les chambres de métiers et la chambre de commerce du Val-de-Marne pour placer nos jeunes. Supprimer ces aides à l’embauche risque de compliquer encore la recherche d’entreprise, en dépit des partenariats que nous avons tissés au fil des années. De plus, faire cette annonce alors que beaucoup de jeunes sont en train de chercher une entreprise pour la rentrée n’est pas un signal positif…"
Chaque année, les jeunes qui souhaitent se former en apprentissage ont trois mois avant le début de leur formation, et jusqu’à trois mois après, pour signer leur contrat avec une entreprise. Le mois de juillet est donc un temps fort de leur recherche de contrat.

Les petites entreprises finalement épargnées

Du côté des entreprises, cette annonce a fait l’effet d’une douche froide en pleine période de recrutement. "Former un jeune en apprentissage est un investissement rentable à long terme, mais coûteux explique Michel Moutot, directeur général de l’Assemblée permanente des chambres de métiers et d’artisanat. Les tuteurs en charge d’un apprenti, surtout dans les petites entreprises, doivent y consacrer du temps pour l’encadrer. Cet investissement en temps entraîne une baisse immédiate de leur productivité que nous avons évaluée à 30%. Si l'on supprime les aides à l'embauche des apprentis qui sont censées compenser en partie cette chute de productivité, beaucoup d'entreprises ne vont plus vouloir signer de contrats d’apprentissage."

Jeudi 18 juillet 2013, le gouvernement semble avoir entendu en partie la colère des représentants des entreprises, puisqu'il a annoncé que la prime supprimée serait remplacée par une aide, pour les très petites entreprises uniquement.

Transférer la charge du financement de l’alternance ?

S'il est trop tôt pour savoir quel sera le véritable impact de la suppression de cette prime sur les recrutements en alternance des PME et des grandes entreprises, Frédéric Toumazet suggère qu’elle pourrait cependant entraîner un mouvement de repli des recruteurs vers les contrats de professionnalisation, l’autre contrat en alternance, financé par les OPCA (organismes paritaires collecteurs agréés), alors que le contrat d’apprentissage est financé par les régions, via la taxe d’apprentissage.

Fin mai 2013, d’après les chiffres du ministère de l’Emploi, le nombre de nouveaux contrats d’apprentissage signés entre janvier et mai 2013 a reculé de 7,5% par rapport à 2012, alors que les contrats de professionnalisation restaient stables sur la même période.
Cette décision de supprimer les aides à l’embauche des apprentis pour les grandes entreprises et les PME pourrait donc être un "coup de billard à trois bandes" : en diminuant relativement l’attractivité de l’apprentissage au profit du contrat de professionnalisation, le gouvernement accompagnerait sans le dire un transfert du financement des formations en alternance des régions vers les OPCA.
Affaire à suivre alors que le gouvernement a annoncé pour la fin de l’année 2013 une nouvelle loi sur la formation professionnelle et l’apprentissage.

Conventions de stages 100% numériques et visioconférence au bac

Une autre des mesures de simplification et de modernisation de l’État annoncées dans le cadre du CIMAP concerne directement les étudiants et les responsables d’établissement d’enseignement supérieur : à partir de la rentrée prochaine, les conventions de stage seront dématérialisées et enregistrées en ligne via le site mon-stage-en-ligne.fr.

Quant aux lycéens, ils pourront désormais passer certaines épreuves orales obligatoires du baccalauréat, notamment les langues vivantes, par visioconférence ou webconférence. Objectif affiché : "Assurer un service exhaustif d’évaluation dans toutes les académies françaises de métropole et d’outre-mer comme dans les centres d’examen situés à l’étranger" et "simplifier l’organisation de l’examen, notamment pour les épreuves de langues vivantes".

 

Sandrine Chesnel | Publié le