Des taux d’échec anormalement élevés en troisième année de médecine

Guillaume Mollaret Publié le
Des taux d’échec anormalement élevés en troisième année de médecine
La faculté de médecine de l'université de Tours. // © 
Plusieurs facultés de médecine, notamment celle de Caen, voient les redoublements passer la barre des 20% en troisième année. Des échecs qui préoccupent étudiants et enseignants.

Est-ce une épidémie ou une hémorragie passagère ? Toujours est-il qu'à la session 2013, de nombreuses universités ont vu doubler le taux d’échec en troisième année de médecine. À l’université de Caen, ce taux atteint les 26%. À celle d’Amiens ce taux dépasse également les 20%. Un pourcentage d’échec deux fois plus élevé qu’à l’accoutumée, qui préoccupe les doyens de facultés et les carabins comme l'a relevé Le Quotidien du médecin.

"On ne connaît pas pour l’heure les résultats des jurys de l’ensemble des universités, il est donc trop tôt pour dresser un vrai diagnostic, mais les chiffres sont tout de même préoccupants", note Mathieu Levaillant, président de l’Association nationale des étudiants en médecine de France et étudiant à Angers. Président de la Conférence des doyens des facultés de médecine et PU-PH à Tours, Dominique Perrotin avance plusieurs explications "qui pour l’heure relèvent de l’impression car nous n’avons pas encore toutes les données à notre disposition".

Le passage au LMD en 2007, puis la réforme de la PACES (première année commune aux études de santé) en 2010 auraient modifié la donne. "Avant, un étudiant collé en deuxième année n’accédait pas à la troisième année. Or aujourd’hui, suite à la réforme, il est possible d’accéder à la troisième année avec des modules de dette. Cela accroît la charge de travail en troisième année. Et réduit le taux d’accès en quatrième année."

Côté étudiant, on confirme que la réforme joue un rôle : celle-ci "a entraîné une réduction du nombre d’heures de cours. Or, le contenu de ces cours est resté le même", avance Mathieu Levaillant. Les enseignants seraient-ils devenus plus sévères ? Doyens et carabins ne le pensent pas.

Baisse de niveau ou de motivation ?

En revanche, la hausse du nombre d’admis dans certaines universités aurait eu un impact. "Dans l’Ouest et le Nord – Lille, Amiens, Caen, Rouen, Tours, Angers, Nantes, Poitiers, Brest –, on a augmenté le numerus clausus. Il faut être très prudent car ce n’est qu’une impression, mais peut-être que le niveau général a un peu diminué, analyse Dominique Perrotin. À Tours, le nombre d’admis en deuxième année est passé de 81 à 235 en dix ans. Or, le taux d’encadrement, lui, est resté le même."

Autre raison invoquée pour expliquer cette hausse nouvelle du taux d’échec en troisième année : ce que le doyen Perrotin appelle "le syndrome grandes écoles". "C’est un phénomène qui, psychologiquement, est très français et qui est lié à notre modèle de sélection. En médecine, on a tendance à considérer que le plus dur est fait, une fois passé le cap de la PACES, de la même manière qu’on peut estimer que le plus dur n’est pas de sortir d’une grande école, mais d’y entrer. Mon sentiment de vieux professeur est qu’il peut y avoir une baisse de motivation chez certains à ce moment-là car ils sont quasiment assurés de devenir médecin, puisque personne n’abandonne une fois passé la première année. Or, il faut se mettre à l’esprit que c’est en deuxième année que le travail commence", commente-t-il.

Guillaume Mollaret | Publié le