Vous connaissiez les antiques échanges de lettres de correspondance entre élèves ? Deux professeurs, l’un, David Cordina, apprenant le français à des étudiants chinois à l’université Lille 1, et l’autre, Laurence Juin, le français, l’histoire et la géographie à La Rochelle à des élèves de terminale bac pro commerce, révolutionnent le genre grâce à Twitter . Les deux enseignants ont donc eu l’idée de faire dialoguer leurs élèves en « e-tandem » sur Twitter pendant une semaine. Et les effets ont parfois dépassé les bienfaits pédagogiques attendus.
Fans de réseaux sociaux, ces deux professeurs n’ont pas pour autant oublié la dimension pédagogique, au cœur de leur projet. Les bacs pro étudient la Chine, inscrite au programme de terminale, et peuvent ainsi éprouver une situation interculturelle. Les étudiants chinois peuvent quant à eux chatter pour améliorer leur français. « Les bacs pro ont pris conscience qu’il fallait écrire correctement pour être compris de leurs interlocuteurs chinois, qu’il y avait des règles à respecter dans ces situations de communication », explique David Cordina , qui a déjà expérimenté ces e-tandems avec des étudiants en Arménie et dans la région du Léon en Espagne.
Apprendre le français en réseau
Au départ, les deux enseignants se sont rencontrés... sur Twitter. Par hasard... en apparence. Chacun était déjà engagé avec sa classe dans un projet pédagogique associé aux TICE. Également ingénieur pédagogique, David Cordina utilise son réseau social dédié Foreignersinlille avec ses étudiants étrangers pour améliorer leur français à l’écrit. Chaque élève y alimente un blog, écrit sur des forums et ses textes sont améliorés au fur et à mesure avec les corrections en ligne des profs de FLE (français langue étrangère) de la Maison des langues de Lille 1. Rien d’anecdotique : plus de 4.000 articles ont été postés en deux ans et le site reçoit chaque jour quelque 800 visites !
« Les articles sont imposés ou libres. L’une de mes étudiantes chinoises en a écrit 52 en un an et elle est passée du niveau A2 à C1, soit de débutant à avancé, alors que les étudiants chinois peuvent rester au niveau intermédiaire pendant très longtemps », se réjouit le pédagogue, avant de renchérir : « Lorsqu’on est étranger, on a envie de témoigner, de raconter ce qu’on vit. L’écrire rend visible l’apprentissage et les étudiants aiment regarder les corrections des profs sur les textes des autres élèves. Le contraire des ressources numériques en langue qu’on trouve partout sur Internet et sur lesquelles les élèves ne vont pas car il s’agit d’un dialogue homme-machine. »
Une dizaine d’enseignants de FLE ont mordu à l’hameçon de ce réseau, formés en grande partie par David Cordina. L’université a commencé également à soutenir le projet. Elle verse une subvention de 5.000 € pour payer en heures supplémentaires les enseignants les plus investis dans ce tutorat.
Twitter, c’est comme une salle de classe
Du côté de la Rochelle, au lycée Pierre-Doriole, Laurence Juin utilise un compte Twitter (baptisé la dernière année https://twitter.com/laderniereannee) avec ses terminales bac pro pour la prise de notes en cours, alimenter des débats en dehors de la classe, suivre des élèves en stage …. Un réseau social de classe que Laurence Juin définit simplement ainsi : « Twitter, c'est comme une salle de classe : mêmes règles (d'expression, de langage, de culture, de respect, de pédagogie), il n'y a que le support qui est innovant. »