Réforme des services, frein financier, santé mentale… Où en est l'accès des étudiants aux soins de santé ?

Rachel Rodrigues Publié le
Réforme des services, frein financier, santé mentale… Où en est l'accès des étudiants aux soins de santé ?
Les services de santé universitaires en ont été transformés en services de santé étudiante au printemps dernier. // ©  Arnaud HEBERT/REA
Une réforme gouvernementale entrée en vigueur au printemps dernier a entériné la transformation des services de santé universitaires en services de santé étudiante, élargissant par là-même leur public et leurs missions. EducPros fait le point sur l'accès des étudiants aux soins de santé, dans le cadre de son classement des meilleures villes étudiantes qui intègre un nouveau critère sur l'accessibilité à la santé.

"La situation est alarmante", déplore Salomé Hocquard, de l'Unef. Interrogée sur l'état des lieux de l'accès des étudiants aux soins de santé, l'étudiante en charge des affaires sociales pour le syndicat étudiant est catégorique. "Les étudiants sont trop nombreux à se détourner des soins dont ils ont besoin". En 2020, une étude de l’Observatoire de la vie étudiante (OVE) a montré que 33% des étudiants interrogés avaient renoncé à un suivi médical faute de moyens. Selon cette étude, 16,3% des étudiants n'avaient pas vu un médecin généraliste dans les 12 derniers mois.

À l'occasion de la sortie du classement des meilleures villes étudiantes de l'Etudiant, qui intègre un nouveau critère autour de la santé, EducPros fait le point sur la réalité de l'accessibilité des étudiants aux professionnels de santé.

Un frein financier

Dans son enquête sur le coût de la vie étudiante 2022, l'Unef pointe du doigt un frein financier de taille pour les étudiants, qui ne peuvent souvent pas se permettre de consulter les médecins spécialistes. "Les frais d'honoraire des dentistes, des gynécologues ou des ophtalmologues représentent un coût difficile à assumer sans mutuelle", détaille Salomé Hocquard.

Elle rappelle que, selon leurs calculs, le taux d'étudiants couverts par une complémentaire santé a chuté de 85 à 69%, entre 2017 et 2019.

À ce titre, l'Unef, comme la Fage, autre syndicat étudiant, demandent à ce que les étudiants boursiers, "a minima", puissent accéder à la complémentaire santé solidaire, explique Salomé Hocquard. Ce dispositif, qui remplace depuis 2019 la Couverture maladie universelle (CMU), fournit une aide pour payer les dépenses de santé aux personnes les plus modestes, selon un plafond maximum de ressources.

 

Réorganisation des services de santé universitaires

En parallèle, depuis le 1er janvier, les 62 services de santé universitaires (SSU), qui font office de relais santé sur les campus, sont devenus des services de santé étudiante (SSE). Ils sont désormais ouverts à tous les étudiants, y compris ceux qui ne sont pas inscrits à l'université (écoles de commerce, BTS, etc.).

La réforme de ces services prévoit d'allouer des moyens financiers supplémentaires pour leur réorganisation, revalorisant "les rémunérations des médecins directeurs et des personnels" et "soutenant la création de postes", précise le site du ministère.

Un des problèmes majeurs reste que "les médecins des SSE ne peuvent pas fournir de soins en tant que médecins traitants", détaille Félix Sosso, porte-parole de la Fage en charge des questions de santé. Tels qu'ils sont conçus, "les SSE ne sont majoritairement pas organisés pour effectuer des actes de soins curatifs".

Leur mission est "d'assurer le suivi sanitaire préventif des étudiants", précise Hervé Jami, directeur du SSE de l'université de Créteil (UPEC). Cet accompagnement comprend le suivi des vaccins, le dépistage de certaines pathologies, l'accueil des étudiants internationaux et un accompagnement psychologique, quand le service est doté de psychologues.

Les premiers pas d'une réforme "qui va dans le bon sens"

Sur le volet de la santé mentale, "il reste encore beaucoup à faire", affirme Cécile Guiral, psychologue libérale, installée dans le Tarn. Selon l'étude de l'OVE, 30% des étudiants avaient présenté des signes de détresse psychologique dans les quatre semaines précédant l'enquête.

Plusieurs dispositifs ont été mis en place ces dernières années : le "chèque psy", initié pendant la crise sanitaire, donne accès à huit séances de suivi psychologique gratuit pour tous les étudiants. Un "bon début", mais Cécile Guiral, qui propose ses services via la plateforme santepsy.etudiant.gouv.fr, l'admet : si "ça peut suffire à certains patients, pour d'autres il faudrait un travail plus long". 

Pour Félix Sosso, il faudrait également mieux communiquer sur ces dispositifs. "Quasiment aucun étudiant ne sait à quoi il a droit sur la plateforme. Résultat : le taux de recours reste faible".

Rachel Rodrigues | Publié le