A.Fuchs (PSL) : "La sélection reste un critère qui favorise fortement la réussite"

Clémentine Rigot Publié le
A.Fuchs (PSL) : "La sélection reste un critère qui favorise fortement la réussite"
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Première université sélective de France, PSL (Paris Sciences et Lettres) affiche ses ambitions d’excellence. Son président, Alain Fuchs, dresse sa vision d’une université internationale qui garde à cœur d’œuvrer pour l’égalité des chances.
Alain Fuchs, président de PSL, répond aux questions d'EducPros
Alain Fuchs, président de PSL, répond aux questions d'EducPros © Université PSL – Marie Soribas

Quelle est la particularité de PSL dans le paysage de l’Enseignement supérieur français ?

L’idée que toutes les universités se ressemblent, délivrent les mêmes diplômes, est une fiction totale. Le constat est aujourd’hui de considérer le paysage de l’enseignement supérieur comme diversifié. Nous faisons tous des choses assez différentes, avec en toile de fond recruter des étudiants, les former aux meilleurs niveaux, les diplômer et leurs procurer du quoi agir comme des citoyens responsables.

PSL fait partie des universités lauréates IDEX (initiatives d’excellence), nous sommes donc considérés comme une université qui a une visibilité réelle à l’international. Une des singularités de PSL c’est de réunir sous la même bannière des établissements qui sont des grandes écoles, des écoles d'art. L'ensemble de ces établissements ont été créés en marge de l'université française.

C’est cela la particularité de PSL : ce sont des établissements réunis – et pas fusionnés – dans une université.

L’université est très demandée par les étudiants, notamment en licence, et est censée être, dans la majorité des cas, non sélective. Pourquoi sélectionner les étudiants ?

Nous sélectionnons d’abord parce que nous n’avons pas des capacités d’accueil à hauteur de la demande. Ensuite, choisir ses étudiants est accepté partout dans le monde. En France, on est habitué à une certaine forme de rôle social de l’université où pendant un certain temps on pouvait y entrer dès lors qu’on avait le baccalauréat, peu importe lequel. Il y avait cette idée d'ouverture sociale et de gratuité.

Prétendre qu’on donne une grande liberté à des bacheliers en leur disant qu’ils ont la capacité de s'inscrire n'importe où, c'est leur mentir. Dans un certain nombre de filières universitaires en France, on atteint encore un taux d’échec de 50% en licence.

Accueillir des étudiants qui n’auront pas la capacité de réussir leurs trois ans d’étude ce n’est pas très correct vis-à-vis d’eux. La sélection reste un critère qui favorise fortement la réussite. Et l’université doit être le lieu le plus prestigieux pour se former et étudier, comme c’est le cas dans le reste du monde.

Dans un certain nombre de filières universitaires en France, on atteint encore un taux d’échec de 50% en licence.

Les formations premier cycle PSL (le cycle pluridisciplinaire d'études supérieures dit CPES et les licences de Dauphine – PSL) sélectionnent sur dossier, basé sur des critères d’excellence. Nous voulons des étudiants motivés, qui ne sont pas là par dépit. Sélectionner raisonnablement, avec des entretiens par exemple et des dispositifs d’égalité des chances nous donne des formations de qualité et reconnues.

Comme toutes nos composantes sont sélectives, cela fait de nous la première université sélective de France.

Etes-vous favorable à ce que toutes les universités françaises soient sélectives ?

Je me méfie de toute généralisation. Le modèle de PSL n’est pas universel. Je crois aussi au rôle social des universités qui sont plus réticentes à sélectionner. Il ne s’agit pas d’empêcher les jeunes bacheliers d’entrer à l’université. Parcoursup ce n’est pas de la sélection, ce n’est pas présenté comme tel, mais c’est une procédure qui conduit à ce que les bacheliers fassent des choix et in fine soient admis ou pas. C’est tout de même une avancée considérable.

Je crois aussi au rôle social des universités qui sont plus réticentes à sélectionner.

Ces choix, de la part des étudiants comme des universités, sont importants pour lutter contre la règle du premier arrivé, premier servi. Choisir ses étudiants, ce n’est pas de la discrimination. C’est choisir des étudiants qui auront le plus de chances de réussir leur licence en trois ans. C’est aussi demander aux candidats de réfléchir à leurs compétences et aux filières dans lesquelles ils ont envie de s’inscrire et où ils ont les capacités

Comment œuvrez-vous pour l’égalité des chances ?

Plusieurs dispositifs existent. Au niveau du premier cycle, dans les filières CPES, une invention PSL, ou les licences Dauphine – PSL, nous identifions et recrutons via nos lycées partenaires des Cordées de la réussite des élèves boursiers avec un très bon niveau.

Après sélection, on se retrouve, selon les années, avec entre 30% et 50% de boursiers en CPES PSL. Excellence et égalité des chances sont deux choses compatibles et non pas contradictoires. C’est pour cela que PSL n’est pas une université élitiste, mais une université qui a pour ambition de former l’élite. Ce n’est pas la même chose.

Des frais de scolarité modulés à Dauphine

Dans une logique d'égalité des chances, l'université de Dauphine-PSL a modifié aussi la modularité de ses frais de scolarité à la rentrée 2023. Cette université bénéficie depuis 2004 du statut de Grand établissement, ce qui lui permet de déroger à règle générale en matière de sélection à l'université et qui lui donne aussi la possibilité d'avoir des droits de frais d’inscription qui lui sont propres.

"Depuis 2010, le grand établissement avait mis en place des droits d'inscription modulaires en fonction des revenus des parents", expliquait El Mouhoub Mouhoud, à l'Etudiant, en mai 2023. Mais ce système avait des effets de seuil importants, d'où l'évolution de ce système dans certaines formations pour faire peser la charge financière sur les très hauts revenus et aboutir ainsi à davantage d'équité et justice sociale.

Quelles sont les ambitions de PSL pour l’avenir ?

Nous cherchons à construire une université multidisciplinaire. Nous avons récemment initié la démarche d’intégration de deux nouveaux établissements-composantes : l’École des Arts Décoratifs et l’Ecole nationale supérieure d’architecture Paris-Malaquais [le conseil d'administration de PSL a voté, le 14 décembre 2023, la démarche d'intégration des deux établissements].

Nous ne sommes pas dans une logique d’accroissement de la taille de l’université, qui sera à terme d’environ 20.000 étudiants. L’ambition de PSL c’est d’être une université internationale adossée à la recherche, qui attire des étudiants internationaux, participant à la circulation des cerveaux et des idées.

Clémentine Rigot | Publié le