Baromètre l’Etudiant-BVA : les réformes et la crise sanitaire ont atteint le moral des étudiants

Thibaut Cojean Publié le
Baromètre l’Etudiant-BVA : les réformes et la crise sanitaire ont atteint le moral des étudiants
La crise sanitaire a renforcé le sentiment d'appréhension envers l'avenir des 15-20 ans. // ©  JackF/Adobe Stock
Le baromètre de la rentrée 2021 de confiance dans l’avenir de l’Etudiant et BVA montre que si les jeunes restent majoritairement optimistes, cet état d’esprit perd du terrain au profit du stress et de l’appréhension. La crise sanitaire, la crise écologique, mais aussi les réformes successives dans l’éducation pourraient expliquer ce mal-être.

Les jeunes Français n’ont pas abordé la rentrée 2021 très sereinement. Selon le baromètre de la confiance dans l’avenir de l’Etudiant et BVA, qui a interrogé 2.000 personnes scolarisées de la seconde à bac+2, la moitié seulement a démarré l’année avec enthousiasme (51%). Et ils sont minoritaires à se déclarer confiants (36%) ou épanouis (44%).

Succession de réformes

A l’inverse, 61% voient l’année arriver avec appréhension, et elle génère du stress chez 64% d’entre eux. Les résultats détaillés montrent que les lycéens sont les plus sujets à l’angoisse des études. Un constat observé sur le terrain par Dounia Addad, secrétaire générale de la FIDL (Fédération indépendante et démocratique lycéenne). "Oui les lycéens sont stressés, appuie-t-elle. Beaucoup sont de moins en moins motivés."

Selon elle, les différentes réformes de ces dernières années, notamment celles du bac et Parcoursup, n’y sont pas étrangères. D’abord, en raison de leurs effets concrets sur la scolarité. "Le stress arrive de plus en plus tôt. Dès la seconde, on doit choisir nos spécialités alors qu’on a 14 ans, parfois 13 ans." La représentante lycéenne fustige également la célérité de mise en place de ces réformes, qui a laissé peu de place à la préparation. "Sur le bac, on a su en janvier le barème du grand oral, souffle-t-elle. Même les professeurs ne savaient pas comment nous aider, certains s’excusaient de ne pas être assez préparés."

Enfin, le manque de dialogue est une nouvelle fois pointé du doigt, avec des "changements qui arrivent à la dernière minute". De quoi soulever une ironie : "On nous demande de nous projeter dès la seconde sur les études supérieures en choisissant des spécialités, mais le ministère ne peut pas prévoir un bac sur deux ans."

Effets post-covid sur le stress de l'orientation

Désormais étudiante en première année, Dounia Addad souligne également "le manque d’accompagnement", notamment dans l’orientation. "Même si beaucoup d’étudiants ont une orientation dans le supérieur, ça ne veut pas dire que c’est ce qu’ils voulaient faire." Rien de neuf cependant. "Il y a un problème dans l’orientation qui dure depuis des années et qui s’est aggravé avec les réformes et avec le Covid", reconnaît l’ex-lycéenne. En effet, l’impact de la crise sanitaire sur le moral des lycéens et étudiants est avéré : 64%, près de deux sur trois, disent en souffrir.

Le stress arrive de plus en plus tôt. Dès la seconde, on doit choisir nos spécialités alors qu’on a 14 ans, parfois 13 ans. (D. Addad, FIDL)

Là aussi, les remontées de terrain confirment ce ressenti. "Les psychologues de l’association nous disent que les étudiants sont très stressés", étaie Laurentine Véron, cofondatrice d’Apsytude, association spécialisée dans le soutien psychologique aux étudiants. Elle-même psychologue, elle considère que la crise sanitaire et les confinements ont aggravé l’état d’esprit des jeunes. "Les étudiants sont épuisés. Même si le gros de la crise est passé, les inquiétudes sont toujours présentes."

Si environ deux tiers des nouveaux étudiants abordent les études en ayant amélioré leurs méthodes de travail personnel, "certains n’ont jamais connu les études normalement". Pour Dounia Addad, cela se traduit par exemple sur des lacunes techniques. "Quand on me demande de faire une dissertation de 14 pages, je dois m’appuyer sur une méthodologie que j’ai vue toute seule à la maison."

Être seul à la maison est pour certains "une forme de confort et d’évitement", traduit la psychologue. C’est là un autre facteur de stress : retrouver une vie sociale. "Rencontrer d’autres personnes est épuisant et ils ont en ont perdu l’habitude."

Les jeunes misent sur eux-mêmes

Mais pour Laurentine Véron, l’épidémie ne doit pas être l’arbre qui cache la forêt. "La moitié des étudiants n’est pas sûre de son orientation professionnelle", rappelle-t-elle. Une statistique "d’avant-Covid". De plus, la crise écologique joue elle aussi sur le moral des jeunes. "Parmi les motifs de consultation, l’éco-anxiété a flambé pendant la crise sanitaire". Une hausse à relativiser, étant donnée la médiatisation donnée à l’accompagnement psychologique pour les étudiants, mais une problématique bien réelle.

Et se montrent résilients

Malgré tout, les étudiants se montrent résilients. Dans le baromètre l'Etudiant-BVA de rentrée, une majorité se déclare encore optimiste (67%, contre 71% en 2020) et motivée (66%, contre 77%). Des ressources qu’ils vont plus facilement chercher dans leur travail que dans leur accompagnement. Parmi les raisons d’avoir confiance en l’avenir, la moitié des jeunes interrogés misent sur un solide socle de compétences et de connaissances (49%), le développement de leurs qualités personnelles (48%) et une bonne connaissance du milieu professionnel (47%). Ce sont les trois facteurs les plus cités, devant le carnet d’adresses (38%), l’accompagnement étudiant (31%) et l’accompagnement professionnel (24%).

Thibaut Cojean | Publié le