C’est lors de son discours de clôture du congrès de rentrée de France Universités, mercredi 30 août, à l’Institut du Monde arabe, que Sylvie Retailleau, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, a choisi de faire ses annonces, sous le signe de la "franchise", face aux présidents d'université.
"Le contexte des finances publiques est tendu. L'inflation reste importante même si elle se ralentit et la dette de la France s’alourdit", a rappelé la ministre. C’est dans ce contexte de crise économique que Sylvie Retailleau a préparé les universités à devoir, pour l’année à venir, ralentir leurs dépenses.
"Je vais être franche ou directe. Le budget de notre ministère, même en augmentation, ne permettra pas de couvrir la totalité de ces mesures, ni en 2023 ni en 2024", a-t-elle déclaré.
Une allusion aux mesures annoncées par Stanislas Guerini, ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, afin de préserver le pouvoir d'achat de tous les fonctionnaires, notamment les catégories B et C. Elles comprenaient, entre autres, une hausse globale du point d’indice des agents de la fonction publique ou encore la création d’une prime dégressive dite "pouvoir d’achat".
Les universités devront puiser dans leurs fonds de roulement
Et la ministre de demander un effort de contribution aux universités, sur 2023-2024, qu’elle "sait difficile". "La situation financière de nos établissements qui affiche un niveau global de fonds de roulement et de trésorerie disponible important, interroge", a-t-elle développé, admettant par ailleurs avoir conscience de l’hétérogénéité des situations entre les différents établissements.
"Pour faire face à cette situation, j'ai donc demandé à mes services de faire de notre mieux pour vous compenser les moyens correspondants à ces nouvelles mesures", a annoncé la ministre, admettant cependant que "ces compensations ne pourront être que partielles". "Il nous faudra regarder ensemble comment mobiliser vos réserves non fléchées (…) et vos fonds de roulement".
Dans son discours, la ministre a enjoint les établissements à ne pas renoncer à leurs projets déjà en cours, notamment les "projets d'investissement qui ont déjà été votés dans vos conseils d'administration (…) ou bien les campagnes emploi". Pourtant, le mot d’ordre est clairement affiché : des efforts seront demandés aux établissements pour l'année 2024.
Les projets de rénovation thermiques perturbés
Concernant les projets de rénovation du bâti, notamment dans un contexte de crise énergétique, et alors que Guillaume Gellé, président de France Universités, rappelait que les universités représentaient 20% du patrimoine immobilier de l’État, la ministre a proposé des alternatives.
"Cette mobilisation des fonds de roulement vient percuter en partie le projet d'investissement que nous envisagions ensemble pour la rénovation thermique", reconnaît Sylvie Retailleau, assurant par ailleurs travailler, avec le ministre de la Transition écologique, Christophe Bechu, "pour proposer un modèle qui permettra de lancer ce chantier prioritaire pour cette année".
L’enseignement supérieur, priorité nationale
La ministre a conclu son propos en réexprimant la "volonté du ministère d'accompagner ces moments difficiles pour les budgets". Pour le ministère, le cap est maintenu et il souhaite "garder comme objectif la place de vos établissements et plus généralement de notre enseignement supérieur, recherche et innovation en haut de nos priorités gouvernementales et surtout en haut de son rayonnement national, européen et international".
France Universités accuse le coup
Si l’organisation "apprécie l’exercice de sincérité de la ministre », elle s’inquiète cependant des répercussions budgétaires des mesures Guerini qui, faute de compensation, "aggraveront la situation des établissements et de leurs étudiants".
"Le montant pour 2024 de ces mesures, estimées à 400 millions d’euros, auxquelles s’ajoutent le contexte inflationniste et les surcoûts importants liés à l’énergie, ne peut être absorbé par les établissements sans altérer, à court comme à long terme, l’accueil et la formation des étudiants, la recherche et l’innovation, et les projets de décarbonation des campus voulus par le Président de la République", alerte France Universités dans un communiqué.
L’organisation parle même d’un "signal négatif envoyé à notre jeunesse, à l’heure où le gouvernement a lancé un chantier important de la réforme des aides sociales". Et France Universités de réclamer, dans le cadre de la discussion parlementaire sur le Projet de loi de finances 2024, que "l’État finance a minima les mesures qu’il décide et ne les laisse pas à la charge des universités".